SILENCE (Bill Kaulitz)

26. Nos amours...

Trois jours après,
23 juin, 13h18
Institut Gustave Roussy, Villejuif

- Salut Leon !, dit joyeusement Didier. Nouveau look ?

Bill venait d'arriver au foyer. Il s'approcha de son ami et hocha la tête.

- Ça te va très bien.
- Merci.

Le jeune homme crut percevoir la même lueur paternelle qu'il avait déjà vue auparavant dans son regard. Didier posa une main sur son épaule et les deux hommes regardèrent la pièce.

- Tu sais, ça va me manquer.
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- On a des liens, les uns avec les autres. Regarde Christine et Raymond.

La femme jouait du piano sous le regard admiratif de Raymond, son seul public. Les deux étaient assis au piano. Bill sourit face à cette scène.

- Je crois qu'il l'aime bien.
- Évidemment, confirma Didier. Il attend probablement le bon moment pour le lui dire. Mais est-ce que le bon moment existe vraiment ?
- Bonjour Leon !, dit une voix derrière eux. Didier, vous n'êtes pas supposé être en repos aujourd'hui ?

Ils se tournèrent et virent Jade. Elle avait passé la tête dans l'encadrement de la porte et Bill remarqua une mèche de cheveux qui lui était tombée sur le visage. Le jeune homme dû résister à l'envie de la remettre à sa place. Dans son ventre, il ressentit une légère contraction, et son cœur se mit à battre un peu plus vite.

- Bonjour, Jade, dit poliment Didier.

Il consulta sa montre. Quatre secondes. C'était la durée du regard entre Jade et Bill. Quatre secondes durant lesquelles ils se perdirent dans le regard l'un de l'autre, avant que celui qui tenait la chandelle ne finisse par les ramener à la réalité.

- J'avais envie de passer un peu de temps au foyer. Bill, tu veux qu'on fasse quelque chose avant ta séance de radiothérapie ? Tu en es où dans ton traitement, d'ailleurs ?

Bill cligna des yeux et secoua la tête, revenant à lui-même.

- Euh, à la moitié. Je suis à la fin de ma troisième semaine. Où est Jacques, au fait ?

Jade pinça les lèvres.

- Quoi, il est en traitement ?, tenta de deviner le jeune homme.
- Non, il est... (elle choisit précautionneusement ses mots) il s'est éteint dans la nuit.

Bill sourit, n'y croyant pas. Finalement, devant l'air grave de l'étudiante et de son ami, il réalisa qu'elle disait la vérité. Son sourire s'évanouit peu à peu.

- N-non, c'est pas possible... De quoi il est... ?
- De son cancer. Je suis désolée.
- C'est malheureux, dit Didier. Jacques y était préparé. Il avait mis ses affaires en ordre.

Bill n'avait jamais été proche de Jacques, mais il savait qu'il était veuf et n'avait jamais eu d'enfants. Il avait été soldat pendant la Seconde Guerre mondiale puis gendarme, et s'était accommodé de sa vie jusqu'à la mort de sa femme, quelques années plus tôt. Christine aussi était veuve.

Le jeune homme se demanda si c'était le sort qui l'attendait. Trouver l'amour de sa vie, se marier, puis perdre la personne d'un coup. Sentant une vague de tristesse l'envahir, il pensa qu'il préférerait vivre ça plutôt que de ne jamais trouver le grand amour comme Raymond.

- Vous allez leur dire ?, demanda Didier à Jade, montrant Raymond et Christine d'un signe de tête.
- Pas maintenant...
- Ok.

Didier partit aux toilettes, tandis que Bill prit place sur le canapé. Il voulait être seul pendant un moment, mais Jade s'approcha de lui.