SILENCE (Bill Kaulitz)

7. Le meilleur shampooing du monde

Trois jours plus tard,
10 avril, 14h03
Institut Gustave Roussy, Villejuif

- Vous êtes prêt ? Je lance la perfusion, dit l'infirmière en anglais.

Aujourd'hui, c'était le premier jour de la première cure de chimiothérapie de Bill. On l'avait accueilli à l'hôpital, lui avait demandé son dossier médical et lui avait expliqué le déroulement de l'administration du médicament. Il allait lui être donné en intraveineuse par un système qui permettait d'éviter de piquer plusieurs fois au même endroit, dans une veine du bras, système dont Bill avait aussitôt oublié le nom.

Il faut dire qu'il avait la tête ailleurs, lors des explications. Le jeune homme allait recevoir les médicaments pendant deux heures, sur trois jours. Puis, il aurait trois semaines pour que son corps se remette des effets secondaires. On lui avait dit que le traitement allait tuer les mauvaises cellules, mais les bonnes aussi.

Bill avait peur de ne pas être assez fort. Il allait vomir, perdre ses cheveux, et internet lui avait même dit qu'il pourrait perdre l'audition ou avoir des bourdonnements dans les oreilles.

- Appelez-moi en appuyant sur ce bouton si vous sentez un inconfort. Ça va durer deux heures.

Bill hocha la tête et l'infirmière lui sourit, compatissante. Il se fit la réflexion qu'elle était plutôt jolie, avec ses cheveux noirs bouclés, sa peau mâte et ses yeux marrons. Il lut son prénom sur sa blouse : Jasmine.

La femme s'éloigna pour aller voir d'autres patients dans la pièce, laissant Bill en compagnie de son frère.

Tom avait mal au ventre, mais il ne savait pas si cela venait des disputes à répétition avec sa copine, ou du fait de voir son frère à l'hôpital.

- Est-ce que tu veux manger quelque chose ? Ou alors boire, j'ai vu une machine à café dans le couloir.

Bill secoua la tête. Il analysa la pièce. Elle était spacieuse, toute blanche. Il y avait plusieurs sièges vides avec du matériel médical à côté. Le jeune homme croisa le regard d'un autre patient qui était plus vieux, ayant l'air d'avoir la cinquantaine d'années. L'homme était assis en face, et il lisait un livre. Chaque fois que Bill regardait ailleurs, l'homme relevait les yeux pour l'étudier attentivement. À part, lui, il n'y avait qu'un autre homme plus âgé qui dormait la bouche ouverte.

- I think we don't often see young men of your age here. (Je crois qu'on n'en voit pas souvent ici, des jeunes hommes de votre âge).

L'homme parlait avec un accent anglais très naturel, comme s'il venait d'une ville du Royaume-Uni. Bill se redressa et Tom répondit pour lui. Ils échangèrent en anglais.

- Pardon ?
- Vous n'avez pas l'accent, sourit-il. Pour quel type de cancer votre ami se fait-il traiter ?, demanda-t-il poliment.

Bill échangea un regard avec Tom. Celui-ci parut méfiant, alors il s'exprima en allemand pour que seul son frère soit en mesure de le comprendre.

- On aurait dû demander à être dans une chambre. Tu penses qu'il nous connait ?

Bill haussa les épaules. Tom sortit son téléphone de sa poche et il le tendit à son frère.

- Tiens, écris.

« Il a l air gentil »

Bill n'avait pas du tout envie d'être dérangé. Il était dans un mauvais jour. À la vérité, tous les jours étaient mauvais depuis l'annonce de sa maladie. Alors il ferma les yeux, comme pour fuir la situation.

- Vous nous connaissez ?, demanda maladroitement Tom en anglais.
- Pas du tout. Est-ce que je devrais ?, dit l'homme avec un sourire amusé.
- Non.