Je veux vivre Tome II : Vengeance sanglante - Dark Romance

Flashback - Aleksander

Seize ans plus tôt.

Il y a bien longtemps que je n'ai plus soufflé mes bougies. La dernière fois, c'était pour mes six ans et j'ai l'impression qu'une éternité remonte. Huit ans pour être exact. Depuis, je passe un âge sans jamais le fêter. Mes journées sont à vrai dire les mêmes : torture, combat, affaire. Pour Korneliusz, nous devons être préparés au grand bain. Prêt à nager avec les requins. Je devrais être à l'école, afin d'apprendre des choses, à me faire des amis, à m'amuser entre deux pauses. Au lieu de cela, je me retrouve debout sur le ring d'un sous-sol. Les poings engouffrés dans des gants de boxe, j'attends le signal de Bronisław qui se tient près d'Albin. Ces deux hommes de main sont fidèles à notre père adoptif. Si je merde durant mon entrainement, ils n'hésiteront pas à me le faire payer. Le jour où je prendrai la place du chef de la mafia polonaise, je leur couperai la tête sans faiblir. Ils pensent que je blague lorsque je leur en fais part, mais ils me connaissent vraiment mal. Je n'ai qu'une parole et jamais je ne changerais d'avis.

— Bats-toi comme un homme, petit bâtard, exige Bronisław.

Mes jointures se contractent face à cette insulte, toutefois, je ne montre pas que cela me touche. Être un bâtard dans ce genre de monde ne donne aucune fierté. Nous ne serons jamais de véritable Kowinski et ces fils de putes ne perdent pas une seule seconde pour nous le faire comprendre. Le son de la cloche retentit. Je commence à envoyer les attaques au visage du gamin qui se tient devant moi. Il en échappe à certains, tandis que les autres se percutent contre sa tête ou contre son corps. La manœuvre reste inchangée : porter des coups, esquiver et porter à nouveau des coups, esquiver. Je retiens chaque assaut que je donne, afin de pas trop blesser mon adversaire. C'est un enfant de mon âge qui a été pris dans la rue et à qui on verse une somme pour qu'il se batte. Certains garçons sont prêts à tout pour amasser le moindre billet.

Plusieurs minutes s'écoulent avant que Bronisław demande à ce que le combat cesse.

— C'est ennuyant, râle-t-il. Faites ça à mains nues.

Mon adversaire me scrute un instant, laissant une peur s'illuminer dans ses iris sombre. Que je le frappe avec des protections est une chose, mais si j'y mets ma puissance ainsi que le dessus de mes poings à vif, je risque de lui procurer bien trop de mal. Presque tout le monde connait les Kowinski et ils savent que leurs fils adoptifs produisent de véritables bains de sang au combat. J'ai amoché et brisé bon nombre d'hommes de main ici, mais jamais d'enfant. Si je m'y initie avec lui, je ne suis pas sûr qu'il ait la force pour y survivre.

— Qu'attends-tu, putain ! s'agace Albin.

Je me défais rapidement de mes gants, que je lui balance à la gueule. Fou de rage, et parce qu'il n'aime pas qu'un môme lui tienne tête, il dégaine son arme. Il n'a pas le temps de viser vers moi, que des pas claquent sur le béton des lieux. Même les yeux fermés, n'importe qui reconnaitrait la personne qui s'approche. Habillé de son costume hors de prix, bagues aux doigts, il surplombe tous les hommes présents avec une prestance indescriptible. Cigarette en bouche, il recrache la fumée d'un regard sévère vers son chien qui tient toujours son arme.

— Que comptes-tu faire avec cela ? l'interroge-t-il d'une voix profonde. Le tuer ? Tu penses avoir le monopole pour toucher un cheveu de ce gosse ? Ou encore celui de son frère ?

— Monsieur, je...

— Ferme-la ! gronde-t-il tout en donnant un mouvement de revers de la main, afin de balayer ses prochaines paroles insignifiantes à ses yeux.

Ses iris se plantent soudainement sur moi, puis il se rapproche. Je garde la tête haute, ne cillant pas une seule seconde. Il ne me fait pas peur, quoi qu'il veuille m'infliger. Je contracte la mâchoire, alors qu'il se campe devant moi. Son regard se pose sur mon adversaire avant de revenir sur ma personne.