I - partie 1

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Démon, voilà mon nom. Mon identité, ma nature. J'ai été élevée pour tuer, conditionnée pour le meurtre et la guerre. Survivre, tuer avant d'être tuée, telle est ma devise. Partout où je passe les yeux se baissent, les poils se hérissent, les jambes tremblent et les cœurs s'accélèrent. La peur, tout simplement. Le dégoût, parfois. Cependant j'y suis habituée. Pas de place pour la raison, pour la morale, pour la réflexion. Les ordres, la mission juste ça, rien que ça.

« Démon, tu es finalement sur le départ ?

- Oui, je serai de retour dans une semaine.

- Parfait », se réjouit le Roi Havrish.

Le Roi Havrish m'a trouvé et élevé. Il règne sur le continent Est. Cet homme a révélé le pouvoir qui sommeillait en moi. Il m'a recueilli, puis a donné un sens à ma vie.

Le souverain du continent Est est un homme d'un âge avancé, mais dont la force est incontestée. Sa vieillesse est trahie par ses cheveux et sa barbe d'un blanc immaculé ainsi que par sa canne, qui l'aide à se mouvoir. En dehors de cela, pas une ride ne vient creuser son visage. Le Roi approche pourtant de ses soixante dix ans et nombreux sont les nobles de la Cour à se disputer le secret de sa vitalité. Une aura de puissance émane de cet homme exceptionnel. Cela en fait un chef de guerre redoutable. Doté d'un talent déconcertant pour les arts de la guerre, gare aux trouble-fête qui souhaiteraient sortir des rangs ou se mettre en travers de son ambition.

Aujourd'hui, justement, je pars en mission pour faire taire ces troubles-faites. Un groupe de rebelles a pris de l'ampleur et se cache dans la forêt au nord de l'Azurée, la capitale du Continent Est. Ma mission est simple et ne prendra que peu de temps : les réduire en fumée.

Dans tous royaumes, la sale besogne doit être faite. Seulement, cette dernière ne peut être confiée au premier venu. Le Roi avait besoin d'une personne de confiance et il m'a offert l'honneur de le servir personnellement. Il m'a alors tiré de ma prison de pierre et m'a donné une chance de prouver que je n'étais pas insignifiante en exploitant toute l'étendue de ma puissance. Je suis ainsi devenue plus forte et intraitable que toute la garde personnelle du Roi réunie. Le pouvoir de la bête n'y est pas étranger.

Sans perdre plus de temps, je prends congé du Roi et entreprends de quitter la capitale. Je n'emporte rien pour mon périple car n'ai pas pour habitude de m'encombrer de choses inutiles. J'aime voyager léger. Je maîtrise parfaitement la survie et je suis une arme vivante. Un quelconque équipement ne constituerait en réalité qu'une gêne.

L'Azurée est une ville où règne l'ordre sous la main de fer de la garde du roi. Cette dernière est composée de l'élite des soldats du continent entier. Elle ne représente cependant qu'un château de carte comparée à moi, l'assassin personnel du roi.

Les rues de la capitale sont étroites formant des cercles autour du château. Elles sont finalement reliées entre elles par une dizaine d'avenues plus larges qui mènent directement à la demeure royale située totalement au centre de la ville. Vue de haut, elle ressemble à une immense roue de carrosse.

Alors que je fais un premier pas dans une avenue pavée de la ville, les portes métalliques se ferment et les volets en bois claquent subitement. L'avenue habituellement très passante est devenue désertique en une fraction de seconde. Je sens l'odeur de la peur provenant des bâtiments. Grâce aux oreilles de la bête, j'entends également les corps trembler et leurs commentaires "Elle est encore là ? Vous la voyez ?". Voilà ce que cela fait d'être le Démon. Être fuit comme la peste en personne.

Je suis rapidement hors de la ville. Je n'ai eu qu'à suivre l'immense avenue à partir du château pour me retrouver directement à la porte Nord. La capitale est entourée de remparts d'une hauteur vertigineuse, mettant ainsi à l'abri tous les habitants mais surtout le roi. Il n'existe dans cette ville que quatre sorties officielles, portant les noms des points cardinaux de leurs emplacements. Les gardes de la porte Nord, lorsqu'ils me reconnaissent, n'osent pas bouger d'un pouce. L'Azurée n'est pourtant pas le genre de ville où on entre et sort facilement. Encore un des avantages accordés au « démon ».

DémonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant