Chapitre 13

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Je râlai et fis quelques conversions sur papier. Je soupirai, ajoutai un nouveau nombre à ma liste et recommençai. Ça allait me coûter cher mais je ne pouvais pas demander à mon père de changer de mannequin, au risque de le fâcher et de ne pas pouvoir participer au défilé. J'attrapais mon téléphone pour envoyer un message à Sam. Une fois les quelques banalités échangées, je lui demandais quand elle pourrait se libérer. Elle me répondit qu'elle pouvait être là d'ici une petite heure. Parfait ! Je lui confirmai que l'horaire me convenait et reposai mon portable. En faisant un tour complet sur mon siège, je jetai un œil sur mon atelier et soupirai de désespoir. Je ne pouvais décemment pas l'accueillir dans cet endroit sale et dérangé. Je me levai, remontai mes manches et me mis au travail. J'eus juste le temps de prendre une douche et d'enfiler une tenue correcte, composée d'un pull beige et d'un pantalon ample avant que quelqu'un ne sonne à la porte. Je me précipitai en bas et fus surpris de découvrir Sam dans une tenue banale. Bien sûr qu'elle ne se promenait pas en robe de soirée ! Mais la voir avec un cargo et un top blanc, c'était surprenant. Je me décalai pour la laisser entrer, un petit sourire béat sur les lèvres.

— C'est magnifique chez toi, dit-elle en tournant sur elle-même pour découvrir le lieu.

— Merci. Tu veux boire quelque chose ?

— Je veux bien un verre d'eau.

J'acquiesçai et en profitai pour me servir également un verre de coca. Je nous installai sur la table basse et lui tendis sa boisson.

— De quoi voulais-tu me parler ?

— Mon père a accepté que je participe au prochain défilé privé de l'entreprise, qui est dans un mois.

— Mais c'est super ! Je suis tellement heureuse pour toi !

— Je suis heureux pour toi aussi.

— Hein ?

Son incompréhension me tira un petit rire.

— Tu es mon mannequin pour ce défilé, sur ordre de monsieur mon père. C'est sa condition pour que je participe et ça fera office d'essai pour toi.

— Comment tu as...

— Il me l'a imposé. Tu ne fais pas du tout parti de mes standards. Je me suis basé sur les mesures de ma meilleure amie, qui fait cinq bons centimètres de moins que toi. Je suis en train de revoir tous mes plans. Mais il me faut tes mesures, c'est pour ça que je t'ai fait venir. Ça te va si on le fait maintenant ?

Elle baissa le regard, un instant troublée.

— Heu... je...

— S'il-te plaît Sam, tu ne peux pas refuser, on a tous les deux besoin de réussir ce défilé...

Elle fixa ses mains, tordit ses doigts, en pleine réflexion.

— C'est d'accord, finit-elle par souffler.

— Merci beaucoup. Je comprend que ça puisse t'intimider mais on ira à ton rythme.

Je prononçai ces paroles pour la rassurer mais je savais qu'on ne pouvait pas se permettre d'aller doucement. Nous n'avions pas le temps pour ça. Je lui proposai de monter et rougis. Vu de l'extérieur, la situation ressemblait davantage à un rencart qu'à une prise de mesures. Je tentai de ne pas y penser et passai le premier pour la guider à travers le couloir. Je la fis entrer dans ma chambre avec une certaine appréhension malgré mon précédent rangement et refermai soigneusement derrière nous.

— C'est magnifique, s'exclama-t'elle en s'approchant du tableau de liège où mes dessins étaient épinglés.

— Merci beaucoup.

— Tout est de toi ? demanda-t'elle en effleurant quelques croquis du bout des doigts.

— Ma mère et ma meilleure amie m'ont un peu aidé mais sinon, ce ne sont que mes projets.

— C'est incroyable, tu en as imaginé tellement !

Son émerveillement me tira un sourire fier.

— Tu veux voir la tenue avec laquelle tu vas défiler ?

Elle acquiesça vivement. J'ouvris précautionneusement ma pochette que j'avais posée bien en évidence sur mon bureau et attrapai mon croquis final. Ses yeux brillèrent et elle se pencha dessus pour l'examiner.

— Je peux prendre tes mesures pendant que tu le regardes ?

Elle opina et se plaça sans que je n'eus besoin de lui demander. Je complimentai son professionnalisme et attrapai mon mètre-ruban. Son observation se fit moins précise et elle ne cessait de jeter des regards furtifs sur mes gestes. Je lui parlai de tissus et de tulles pour la détendre, ce qui sembla plutôt bien marcher.

— Ça va ? l'interrogeai-je en notant le dernier nombre.

— Oui oui... Désolée, j'étais un peu stressée.

— C'est pas grave, je comprends. C'est la première fois qu'on travaille ensemble, t'as le droit d'être un peu mal à l'aise.

Un petit sourire fleurit sur son visage. Ses lèvres pulpeuses s'entrouvrirent sur une rangée de dents blanches et un peu tordues. Si, sur une autre personne, je l'aurais vu comme un défaut, ce n'était pas le cas pour Sam. Pour moi, ce n'était qu'une qualité de plus parmi les dizaines d'autres qu'elle avait

— Merci de me permettre de participer au défilé, souffla-t'elle en lissant ses vêtements.

— Ce n'est pas vraiment grâce à moi...

— Je suis persuadée que si. Si je croyais à toutes ces histoires d'anges gardiens, je serais persuadée que tu serais le mien.

Je sentis que mes joues chauffaient et me maudis d'être si peu sorti ces derniers temps. Mon rougissement se serait un peu moins vu avec une peau plus bronzée...

SamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant