Chapitre 30

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— Au Guango ? Tu veux dire là-maintenant ? Papa, je t'ai déjà dit de prévenir à l'avance et...

— Vous avez une heure pour vous préparer. Et tu sais exactement ce que j'attends.

Je soufflai assez bruyamment pour qu'il l'entende à travers le combiné mais lui confirmai notre présence avant de raccrocher. Je savais qu'il ne pourrait s'empêcher de me sermonner plus tard pour cet affront mais nous manquions déjà assez de temps. La dispute attendrait. Sam, qui avait entendu toute la conversation, afficha une moue boudeuse. Il ne me demanda même pas si le dîner était esquivable, il savait que c'était impossible. Il se dirigea vers l'armoire en traînant des pieds. Et dire que nous avions prévu une soirée tranquille, avec du grignotage et un film...

— J'ai rien à mettre, grommela Sam avec mauvaise foi.

— Tu as bien une chemise quelque part...

— Puisque je te dis que non, tout est trop grand !

— C'est pas grave, on va trouver, pousse toi un peu, grommelai-je en me plaçant à ses côtés.

Je fouillai le meuble et finis par trouver quelque chose qui me semblait approprié.

— Et ça ?

— La couture a lâché, j'ai pas eu le temps de...

— Je vais arranger ça, ne t'inquiète pas, coupai-je en attrapant mon nécessaire de couture.

Je m'assis sur le lit et le regardai soupirer.

— Je sais, moi non plus j'en ai pas envie. Mais les ordres sont les ordres. On peut reporter notre soirée à demain si tu veux bien...

— Je voulais la faire ce soir, j'ai pas envie de sortir...

Je ne répondis pas, trop concentré à faire rentrer le fil dans le chas. Je piquai le tissu une première fois, puis une deuxième, dans un mouvement familier. Coudre sans date limite me détendait terriblement. Je notai mentalement que je n'avais rien crée depuis le défilé et que je devais m'y remettre bientôt. Je fermai la couture par un nœud de chaîne basique et tendis la chemise à Sam, qui l'essaya avec un soupir.

— C'est bon, dit-il à regret.

— Ne fais pas la tête s'il-te plaît, je n'aime pas te voir comme ça... On va boire et s'amuser, ça va être cool, rajoutai-je, moi-même peu convaincu.

— Si tu le dis...

— Et puis on pourra toujours rentrer plus tôt si tu le souhaites. Je ne prends pas la voiture parce que j'ai envie de faire la tournée des vins.

— Je préfère que l'on rentre tôt...

— D'accord, d'accord, soufflai-je en posant un léger baiser sur ses lèvres.

Je tirai du placard une tenue que je savais correcte et passai à la salle de bain. Je me lavai, m'habillai, recouvrai mes cheveux de gel et attrapai quelques produits de beauté. Je suivis ma routine habituelle et quittai la salle de bain après très exactement vingt minutes. Sam se précipita, sachant très bien qu'une minute de retard serait inacceptable. Je rejoins la salle à manger et passai un coup de fil pour commander un taxi.

— Vous partez ? demanda Myriam en levant les yeux de son livre, les lunettes sur le bout du nez.

— Mon très cher papa nous a conviés au restaurant, ironisai-je.

— Allan, si tu ne refuses pas maintenant, tu ne le feras jamais. Tu dois apprendre à t'interposer, ton père ne doit pas être le régisseur de ta vie.

SamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant