Chapitre 34

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Je repiquai le tissus et fis le nœud nécessaire pour le début de la couture. Je balançai la tête au rythme de la musique et jetai parfois un coup d'œil à mes patrons ou mes dessins. Ce nouveau projet m'enchantait terriblement et m'empêchai de trop penser. Sam ne perdait plus de poids, enfin de ce que je pouvais voir et il cherchait sans arrêt le contact. Il posait de petits baisers sur mon cou, caressait mon torse et se montrait toujours plus aguicheur. Je l'ignorai tant bien que mal, prétextant souvent toutes sortes de tâches tout juste inventées. Je soupirai en plissant les yeux à cause du manque de lumière et du mal de dos qui commençait à me tirailler.

— Les filles sont sorties, annonça le mannequin en passant ses bras autours de mon cou.

Il embrassa ma joue à plusieurs reprises, en me murmurant qu'il m'aimait. Je l'embrassai en retour puis me penchai de nouveau sur mon ouvrage. Sam râla et tenta d'attirer mon attention en bécotant le coin de mes lèvres.

— S'il te plaît Allan, nous ne sommes que tous les deux, profitons-en, gémit-il près de mon oreille.

— Je travaille, répliquai-je en tentant de le chasser d'un petit geste de la main, comme je l'aurais fait d'une mouche.

Il s'empara du tissu qui m'accaparait pour le poser sur le petit bureau et grimpa sur mes cuisses avec une certaine agilité. Il prit mon visage en coupe et m'embrassa longuement. Un frisson remonta le long de mon dos et je ne pus m'empêcher de serrer un peu plus son corps contre le mien.

— Fais moi tiens, je te suis entièrement dévoué, s'il-te plaît Allan...

Je protestai faiblement, insistant pour qu'il descende et que je puisse retourner travailler. Il resta fermement agrippé à moi et réclama ma présence par de petits baisers fugaces.

— J'ai des choses à faire, laisse moi tranquille !

— Mais je t'aime... marmonna-t-il avec une moue boudeuse.

Je levai les yeux au ciel et il en profita pour me dérober un nouveau baiser. Je n'y tins plus, balayai le bureau du revers de la main et le plaquai contre celui-ci. Je saisis ses joues d'une main, posa l'autre contre son torse et l'embrassai fougueusement. Il s'étonna un instant puis ferma les yeux. Ma langue joua avec la sienne, je la mordis gentiment, suçotai avidement ses lèvres. Le baiser exigeant lui tira un soupir et je sentis que je ne tiendrai pas bien longtemps ainsi s'il continuait de gigoter alors que mon bassin se trouvait contre son ventre. Je choisis de m'écarter malgré ma furieuse envie de continuer. Sa main agrippa mon haut, il me tira vers lui pour réclamer plus de contacts mais je les lui refusai.

— Tu pourras finir ta robe plus tard, le défilé est dans longtemps, gémit-il.

— Ça n'a rien à voir Sam.

— Alors quoi, tu n'en as pas envie... ?

— J'en ai terriblement envie, tu n'imagines même pas à quel point. Mais je ne peux pas coucher avec toi alors que tu es aussi maigre.

— Je... je te... dégoûte ? souffla-t-il, un voile de tristesse devant les yeux.

— Jamais tu ne me dégoûteras. Mais la dernière fois, tu as presque perdu connaissance. Je ne veux pas reprendre ce risque-là.

— Je peux tenir, je...

— J'ai dis non Sam ! On ne fera pas l'amour tant que tu ne seras pas guéri.

— Je ne suis pas malade Allan, j'ai juste perdu un peu de poids mais ce n'est pas grand-chose...

— Tu es malade Sam, on appelle ça l'anorexie !

— Tu dis des conneries, je ne le suis pas...

— Alors va voir un médecin et prouve le moi.

— C'est pas nécessaire et...

— C'est nécessaire, coupai-je.

Il détourna les yeux. Toute l'excitation était retombé et je sentis qu'il voulait déjà s'en aller.

— Je n'ai pas maigri autant que tu le dis, je peux même perdre encore un peu...

— C'est hors de question Sam, si tu perds encore, je te traîne aux urgences !

— Tu vas leur faire perdre leur temps !

— Je préfère leur faire perdre ton temps que te perdre toi ! marmonnai-je agressivement, la mâchoire contractée. Regarde toi Sam, essaie de comprendre s'il te plaît ! Je veux que tu vois quelqu'un, je ne te toucherai plus tant que ce ne sera pas réglé !

— C'est du chantage, je veux pas finir à l'hôpital ou perdre mon boulot...

— Alors tu en prends conscience, tu vois bien que quelque chose ne va pas... Rien de tout ça n'arrivera Sam, je suis là pour toi, tu ne traverseras pas ça seul...

— Promets-le moi.

— Je te le promets. Je vais te trouver le meilleur médecin de la ville. Je ferai n'importe quoi pour que tu ailles mieux... Je me sens tellement mal de te voir ainsi, ça va mal finir, je peux pas le supporter, j'ai besoin de toi dans ma vie...

Ses yeux, déjà humides, laissèrent échapper une larme. Je l'essuyai du pouce et l'embrassai doucement.

— Tout ira bien, je te le promets... Fais moi confiance.

Il acquiesça, le menton tremblant.

SamOù les histoires vivent. Découvrez maintenant