GARDE-MOI SI TU PEUX

CHAPITRE 35

Elyo se rue sur moi alors que j'entreprends de me préparer mon repas. Une semaine s'est écoulée, dans des circonstances assez bonnes, nous avons essayé de ne pas reparler de nous. Elyo est resté concentré sur sa tâche tandis que moi, j'ai peaufiné mes compétences en tir et en combat. Aucun de nous ne sait réellement comment va se passer cette attaque et ça me stresse, mais pour autant, je n'en oublie pas mon objectif.

- Dahlia, j'ai les résultats du repérage. Appelle Enzo.

J'acquiesce et sors mon téléphone pour contacter mon meilleur ami sous le regard sévère du tueur à gage. Le téléphone sonne et la voix d'Enzo retentit :

- Dahlia, qu'est-ce qu'il se passe ?

- Rien, ne t'inquiète pas, mais rejoins-nous à la maison au plus vite, le repérage est fini.

- D'accord, je pars de l'entrepôt.

Et il raccroche. Les affaires ont repris de plus belle, de ce que m'a informé Enzo, tout roule. Les imports de marchandises se passent à merveille, les équipes suivent bien malgré quelques tentatives de rébellion. Certains jugent qu'Enzo et moi sommes de moins bons dirigeants qu'eux, alors ils tentent de nous intimider, mais tous ceux qui s'y sont essayés ont été bien recadrés selon Enzo. Depuis ces quelques incidents, plus aucun problème n'est survenu. Enzo est dans son élément, il adore diriger nos hommes. Je pense que si un jour, je dois léguer ce cartel, il sera le premier que je choisirais.

- Il arrive, annonce-je à Elyo avant de retourner à mes fourneaux.

Sans un mot, Elyo quitte la pièce tandis que je m'attèle à la tâche. Je verse les pâtes dans l'eau bouillante et casse deux œufs dans une poêle. J'assaisonne le tout et me sers une assiette avant de rejoindre le salon. Elyo regarde son téléphone avec son verre en main tandis que j'allume la télévision. Je zappe les films cucul et m'arrête sur une télé-réalité. J'écoute les candidats se hurler dessus quand la porte d'entrée claque soudainement. Elyo et moi nous redressons afin d'être prêts en cas de problème, mais Enzo nous fait face. Je soupire et retourne à mon assiette.

- Bien, la prochaine fois frappe, crache Elyo en se rasseyant.

Aucune forme de politesse - étonnant. Je fourre une fourchette de pâtes dans ma bouche avant qu'Enzo ne vienne embrasser mon front. Il s'assoit à côté de moi, je coupe le son de la télévision pour pouvoir écouter le plan bien rodé d'Elyo.

- Bon, le repérage s'est bien passé. C'est pour bientôt. Nous irons en deux voitures, vous et moi, dit-il en dévisageant Enzo, cette idée ne doit pas lui plaire. En cas de besoin, j'ai mis un ami à moi sur le coup, il se plaquera dans les alentours et même si ça dérape, il finira ce que nous aurons commencé.

Je m'étouffe en réalisant que nous allons peut-être y laisser nos vies. Tout cela pour une histoire de vengeance, de territoire et de mensonges. Enzo tape dans mon dos en se moquant de moi puis nous nous reconcentrons sur Elyo.

- Une fois arrivé, vous attendrez mon signal pour me rejoindre, le temps que je butte tous les gardes. D'ailleurs t'as mes armes ? demande-t-il à Enzo.

- Ouais, elles sont planquées. Les gars les ont ramenés hier-même.

Elyo acquiesce avant de reprendre :

- Une fois que vous aurez le signal, Dahlia, tu me rejoindras, on ira retrouver Moreno.

- Et moi dans cette histoire ? fait Enzo.

- Tu garderas l'entrée au cas où il y a un imprévu pendant qu'on s'occupe de Moreno.

Enzo acquiesce. Je prends un instant pour regarder les garçons et me remémorer le plan. Ça devient très concret. La fin est proche et ma décision aussi. Je ne connais pas encore mon choix, mais après tout, peut-être que ce sont mes derniers instants alors, je vais me laisser vivre, je ne veux pas me prendre la tête et me stresser avec des choses futiles comme Elyo et moi. Nous ne sommes pas la priorité en ce moment et j'en ai bien confiance. Je parais probablement très indécise, et c'est vrai. Mais à présent, jusqu'à la mort de Moreno, je me laisse le droit de céder à mes pulsions, je me laisse le droit de profiter de mes derniers instants, que ce soit avec Elyo ou non. Je regarde Enzo et bouscule son épaule de la mienne. Il pose son regard sur moi, je lui souris avant de lui souffler un « merci ». Il sourit à son tour avant d'embrasser mon front. Il se redresse, nous salue et s'en va. Quand la porte claque, je regarde Elyo. Il est encore plongé dans son téléphone.