CHAPITRE 28

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Je ne cesse de ressasser la discussion mouvementée que nous avons eue quelques heures plus tôt. Comment j'ai pu leur mentir à tous ? Tout simplement, en commençant par me mentir à moi-même, ma conscience jouit de ce constat. Je ne fais que me mentir depuis des semaines. J'éprouve quelque chose de plus fort qu'une attirance toxique envers Elyo. Je lui en veux, mais mon cœur est tiraillé entre ces deux sentiments et ça me ronge. Quand le reste de ma famille l'apprendra, je vais me faire incendier. Personne ne peut comprendre ce que j'éprouve pour lui, à moins de l'avoir déjà vécu - et je doute que beaucoup d'entre eux aient éprouvé ce genre de sentiments à l'encontre de l'assassin de leur propre père.

Je suis complètement cinglée, une folle qu'on devrait interner !

Dans un élan d'angoisse, je décide de me lever et de quitter ma chambre afin d'oublier ces idées. Je ne dois penser qu'à ma vengeance et non à Elyo. Si je pouvais, je taperais ma tête contre un mur en espérant ne jamais me réveiller du choc. Je passe ma main dans mes cheveux en essayant, malgré moi, d'occulter ces pensées intrusives qui pourrissent ma nuit. Je dévale les escaliers vêtue d'un short et d'un débardeur afin de rejoindre la cuisine pour me prendre un verre d'eau, mais je suis coupée dans mon élan en voyant Elyo assis face à la baie vitrée. Il a l'air pensif, mais aussi dépité, j'entreprends alors de l'ignorer. Je suis déjà assez cinglée, je n'ai pas besoin de lui adresser la parole, je risquerais de le regretter.

Mon verre d'eau en main, je me dirige vers les escaliers pour retrouver ma chambre, mais la voix rauque du tueur à gage me surprend. Je me fige avant les marches.

- Qui est ce Enzo pour se permettre de te faire des leçons de morales ?

Je n'ai pas la force de me disputer avec lui alors, je ne dis rien et soupire. C'est quand même un comble, je quitte ma chambre pour ne pas avoir à penser à eux et Elyo remet le sujet sur le tapis. Je vais vraiment devenir folle si ça continue. Voyant que je ne daigne pas à répondre, je le sens se crisper en répétant plus simplement sa question :

- Qui est Enzo ?!

Sa voix est dure, elle pourrait même m'effrayer si je ne le connaissais pas.

- Mon meilleur ami, celui qui m'a toujours aidé et soutenu, mais surtout, il n'a jamais tenté de tué mon père.

Mes mots sont tranchants, ils touchent Elyo. Ce dernier se lève précipitamment en claquant son verre sur le chariot métallique du salon avant de se ruer sur moi. Je sursaute à cause des bruits et ai à peine le temps de me tourner complètement face à lui qu'il me fait reculer jusqu'à la table. Je le regarde comme une proie apeurée, mon verre d'eau s'est agité dans ma main et quelques gouttes m'ont éclaboussée. Il détaille mon visage avec un voile de haine dans les yeux. Je ne bouge pas. Elyo empeste l'alcool, je ne voudrais pas provoquer une réaction que nous regretterons tôt ou tard. Il prend une grande inspiration en fermant les yeux.

- Tu es à moi Dahlia, affirme-t-il en plongeant son regard dans le mien, et tu le sais, regarde l'effet que je te fais, aucun autre homme ne te comblera comme moi !

Je comprends alors qu'il est juste jaloux. Jaloux d'Enzo et probablement aussi du fait que lui, il ne m'a pas déçu, il ne m'a pas blessé comme Elyo a pu le faire.

- Tu as sûrement raison, mais je me refuse d'éprouver autre chose que de la haine envers toi Elyo. Ressentir quelque chose de positif pour toi m'a détruite après ce que tu m'as fait, avoue-je d'une voix tremblante.

Je détourne le regard et avale une gorgée d'eau avant de claquer à mon tour le verre sur la table. Je réprime mes larmes à cause de lui, je dois me refuser des émotions à son égard et ça me bouffe à petit feu. Soudain, il glisse sa main droite sur ma joue, me poussant à basculer mon regard sur ses iris. Il caresse délicatement ma joue ce qui réchauffe mon cœur quelques instants.

- Alors laisse-moi faire ça...

Et dans un élan de douceur, il plaque ses lèvres aux miennes. La chaleur de son corps envahit le mien, elle me réchauffe et m'apaise. Je fonds sur ses lèvres et apprécie ce contact un peu trop à mon goût. Elyo colle son corps au mien, me poussant à me redresser, il attrape mon visage entre ses deux mains et m'empêche de m'éloigner. Son contact me fait autant de bien que de mal, il me rappelle ce que je m'interdis, mais aussi ce que je n'aurais plus jamais, un père. Alors qu'une vague de haine, de déception et de colère s'abat sur moi, je ne réfléchis pas et élance ma main sur sa joue. Elle claque très fort. Elyo se recule sans lâcher mon regard, il ne comprend pas. Les larmes commencent à perler aux coins de mes yeux.

- Ne refais plus jamais ça ! Je te déteste Elyo Morretti, je dois te détester... admets-je.

Ne respectant pas mes mots, Elyo se jette sur moi cette fois. Il m'embrasse hargneusement, il saisit mes poignets afin de me coucher sur la table, sans jamais se détacher de moi. Je laisse les larmes couler, je laisse ma haine se déverser dans ce baiser. Je lui en veux tellement d'avoir tout gâché, plus rien ne sera jamais pareil. Il a tout bousillé. Mes larmes glissent sur mes joues tandis qu'Elyo passe le barrage de mes lèvres avec sa langue. Je l'accepte, je me sens si mal d'avoir envie de tout ça. Ce baiser ne cesse de s'accentuer, il ne cesse de grimper et je pense ne pas être en capacité de refuser d'aller plus loin. Heureusement pour moi, Elyo n'a pas l'air résigné à franchir cette barrière. Il calme le jeu et doucement comme son front au mien en lâchant mes poignets. Sa main glisse sur ma joue et essuie les traces d'eaux sur mon visage.

- J'attendrais le temps qu'il faut Principessa, mais je ne suis pas encore prêt à te perdre.

GARDE-MOI SI TU PEUXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant