CHAPITRE 21

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J'ai refusé tout contact avec Elyo depuis qu'il m'a révélé son histoire. Je n'ai pas mangé depuis quelques jours et je me sens très faible. Mes poignets sont douloureux, mais je n'ai plus la force de me batailler avec mes liens. Je ne fais que ressasser les images que j'ai vues. Je ne fais que me répéter qu'Elyo est l'assassin de mon père et mon oncle. Il a détruit ma vie, il est lié aux Moreno. Il m'a menti. Je ne sais pas comment j'ai pu me faire avoir de la sorte. Une rage que je n'ai jamais connue ne cesse bouillir en moi. Elle va éclater tôt ou tard et je veux que que Moreno soit là quand ça arrivera, je veux pouvoir me venger parce qu'après tout, tout part de lui et de sa stupide guerre avec mon père.

Comme quotidiennement, Elyo fait irruption avec un plateau dans cette cave, mais je l'ignore. Je baisse la tête pour ne pas voir son visage. Le voir me rappelle à quel point j'ai été bête de lui faire confiance au point de croire qu'il y avait quelque chose de plus qu'un contrat entre nous. Je l'entends soupirer avant de râler dans sa barbe. Il s'approche soudainement de moi et passe dans mon dos, je ne comprends pas, mais quand je le sens triturer mes liens. Je le laisse faire. Une fois défaits, je ramène mes poignets devant moi et les masse pour faire passer la douleur qui les irradie depuis des jours.

- Mange Dahlia.

Je relève les yeux vers lui et secoue la tête. Son visage me dégoute à présent. Je me demande comment j'ai pu autant l'aimer à un moment, maintenant tout de lui me révulsent.

- J'ai une proposition à te faire, fait-il d'un ton dur.

Je ne cille pas. J'écoute.

- On peut se venger, mais il faut que tu t'allies à moi. J'ai peut-être un plan.

Voyant que je ne bouge toujours pas d'un poil, il continue en soupirant :

- On peut sortir de cette maison sans se faire tuer, après, on peut retourner chez toi sans trop se faire repérer puis élaborer la continuité de notre plan avec tes hommes.

Mes hommes. C'est vrai que maintenant que mon père n'est plus de la partie, c'est moi la nouvelle cheffe de ce cartel. Et ça, je n'y suis pas prête, je le sais. Personne n'a vu venir la disparition de mon père, et moi, encore moins. Je ne sais pas comment gérer des hommes, je n'ai que dix-sept ans après tout.

- Un réseau souterrain passe par cette maison, d'où mon achat. Il permet de traverser la ville sans être vu. On pourrait rejoindre le centre et faire venir un de tes hommes pour nous récupérer. Le but, c'est que Moreno ne sache pas que nous avons quitté cette maison avant que nous le décidions.

Son plan est loin d'être bête. Il est même plutôt bon, mais quelque chose me freine. Peut-être le fait qu'il m'a menti sur tellement de choses, comment je peux être sûre que ce n'est pas un nouveau piège et que tout ce qu'il veut c'est m'offrir sur un plateau à Moreno ?

- Comment je peux être sûre que tu ne te fous pas de moi ?

- Parce que je suis prêt à beaucoup pour toi, Principessa.

Il fouille dans la poche de son pantalon de smoking et en sort mon téléphone.

- Tiens la preuve, fait-il avant de me le balancer.

Je le rattrape de justesse et regarde mes messages. Il y en a des dizaines de mon père et de ma famille, mais je refoule les larmes qui menacent de couler. Je ne peux pas me montrer aussi faible. Je dois me ressaisir, Elyo s'est fait avoir après tout et moi aussi. Moreno nous a eu. Il mérite de croupir en enfer et je veux que ce soit moi le dernier visage qu'il verra. Je pense pouvoir faire un effort et me rallier à Elyo le temps d'un moment pour qu'on puisse assouvir cette vengeance.

- Si j'accepte Elyo, je veux que ça se fasse selon mes règles. Je veux tout savoir, je veux tout connaître, si j'apprends que tu m'as encore menti, sache que tu pourras dire au revoir à tout ce qu'il te reste parce que je te dépouillerai jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien, le menace-je d'un ton tranchant.

Il sourit, les bras croisés sur son torse dans sa chemise blanche. J'use de mes quelques forces pour me lever et je m'approche de lui d'un air qui se veut menaçant.

- Ne pense pas que tout est réglé entre nous, tu paieras aussi pour ce que tu m'as fait, clame-je avant de quitter cette cave.

Je remonte les escaliers et franchis une seconde pour qui mène dans la salle où nous nous entraînions. Je rejoins ma chambre et ferme la porte à clé avant de me laisser tomber sur le lit moelleux. Je soupire longuement puis prends mon téléphone et lis les derniers messages de mon papa.

« Dahlia, j'espère que tout se passe bien avec Elyo, j'espère que les choses vont s'arranger assez vite, tu me manques ma puce ».

« Je ne comprends pas pourquoi je n'ai plus de vos nouvelles, mais sache que je t'aime. S'il y a le moindre problème, appelle-moi. »

« Les choses se gâtent un peu, je ne vais pas te mentir. Je ne sais plus vraiment comment faire pour apaiser la situation. Moreno veut que je lui rende le territoire qu'il m'a offert, il y a des années, en échange d'un service que j'ai mal tenu, mais il fait parti de nos meilleurs coins. »

« Si les choses viennent à mal se passer, ma fille, je veux que tu saches que je t'aime et que tu es en mesure de savoir comment faire. Si les choses se passent mal, que je ne suis plus là pour gérer, je veux que tu retournes à la maison et que tu ailles dans mon bureau, que tu ouvres le tiroir et prennent la clé qui s'y trouve. Je veux que tu ailles dans la bibliothèque derrière et retire l'album photo de notre famille et que tu ouvres cette porte. Tu y retrouveras tout, tout ce que je ne t'ai jamais dévoilé et tout ce qui pourra t'aider. Je t'aime Dahlia, sans toi ma vie n'aurait jamais continué, chaque jour avec toi, j'avais l'impression de les passer en compagnie de ta mère et toi. Tu es la meilleure chose que j'ai faite dans ma vie. »

Et sur ces mots, je fonds en larmes. Je n'ai plus rien.

GARDE-MOI SI TU PEUXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant