CHAPITRE 29

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Après la nuit assez spéciale que j'ai passée, je ne veux qu'une seule chose : éviter Elyo. Je suis très mal à l'aise, je suis perdue. Elyo m'attire, c'est indéniable mais... Je ne sais pas, je ne sais pas comment réagir par rapport à ce qu'il fait, ces tentatives de « pardon », nos rapprochements. Toutes ces choses ne peuvent pas effacer sa faute, je ne suis pas folle non plus, mais mon cœur... Mon cœur a mal. Il veut l'avoir près de lui, mais mon cerveau, lui, il ne peut s'empêcher de me rappeler : « il t'a enlevé la seule personne qu'il te restait ». Je souffre de ce déséquilibre. J'en souffre très fort, c'est douloureux. J'ai peur de le croiser aujourd'hui et de devoir affronter cette balance. Alors, je décide de me replonger dans mes recherches. Je prends les clefs du bureau de mon père et m'y dirige. J'entre dans la pièce secrète et récupère le journal de cette fameuse année.

2012.

Je feuillette les pages sans interruption cette fois jusqu'à tomber sur cette sacrée page.

« Moreno m'a proposé un deal, un deal que je ne peux pas refuser. Certes, il me replonge dans de vieux démons, mais j'en ai besoin, les affaires vont mal. J'ai besoin de ce territoire et si ce deal est la seule condition, je le ferais. Je me déteste de devoir m'abaisser à une telle chose, demander à mon principal concurrent un bout de terre. En échange de celui-ci, je dois me rendre chez une femme : son mari devait des sous à Moreno, argent qu'il n'a jamais rendu. Moreno m'a chargé d'abattre la femme et l'enfant s'il est présent, je ne sais pas comment je vais pouvoir résister à ma bonne foi. Je ne sais pas comment je vais pouvoir abattre un gamin sous les yeux de sa mère ou l'inverse. Je ne me suis jamais attaqué à une femme, je ne trouve pas ça réglo. Je suis sûr de gagner, si c'est le cas alors, il n'y a aucun intérêt. »

Je comprends après ces quelques lignes que la suite ne va probablement pas me plaire, mais au fond de moi, je garde espoir en mon père. Comme il l'a dit, c'est un homme bon.

« J'ai merdé, complètement merdé et si Moreno l'apprend, je suis foutu. Il me fera payer ça, mais je ne pouvais pas me résigner à abattre cette famille. J'y suis allé avec Ermano et Lorenzo, nous avons déboulé en pleine nuit. La femme a été gravement blessé, nous l'avons laissé dans son propre sang et quand nous avons tenté de nous occuper du gamin, je n'ai pas pu. Je voyais ma pauvre Dahlia, celle pour qui je fais tout ça. Je n'ai pas pu le laisser mourir alors, j'ai arrêté Lorenzo. Je l'ai emmené avec nous et nous l'avons lâché bien plus loin que chez lui. Je lui ai dit de fuir, que si on le retrouve, il n'aura pas cette chance. Le pauvre gamin était en larmes, il était totalement apeuré. J'ai eu mal au cœur, mais je devais garder la place. Ermano et Lorenzo n'ont fait que me répéter que j'avais merdé, ils ont failli me faire douter, mais ce gamin n'y est pour rien. Puis, nous sommes rentrés, j'étais mal. Quand je me suis enfin glissé dans mes draps, j'ai compris ce que je venais de faire. Moreno va forcément aller vérifier et s'il découvre la supercherie, je n'aurai que d'autre choix que d'assumer mon erreur, ma sensibilité. »

Ma main est plaquée contre mes lèvres, je retire des sanglots. Je suis bouleversée de cette découverte. Mon père a sauvé Elyo et lui, il l'a tué. Je me sens tellement mal, mais je dois continuer.

« Moreno m'a donné le territoire, je sens qu'il sait. Je ne suis pas à l'abri qu'un mauvais coup. Il serait capable de me le donner pour me le reprendre des années plus tard. Par précaution, je vais augmenter la surveillance de ma fille, elle n'a pas à subir mes erreurs. Je m'en voudrais tout le restant de ma vie s'il venait à lui arriver quelque chose par ma faute. On ne choisit pas sa famille malheureusement. Ma pauvre princesse, qu'a fait ton pauvre père ? »

Mes larmes roulent et s'éclatent contre les pages, je referme le journal et le balance au travers de la pièce. Mon père était un homme bon, je le savais. Il a sauvé Elyo, il m'a protégé de ses erreurs. Il aurait mérité une meilleure fin, une fin qui représenterait sa grandeur, son grand cœur et sa sensibilité.

Papa, tu me manques...

GARDE-MOI SI TU PEUXOù les histoires vivent. Découvrez maintenant