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– T'es en train de me dire que ça fait une semaine que ta machine à laver est morte là ?

Les yeux écarquillés, Elian répondait à Maxime devant lui par son expression la plus stupéfaite. Ce n'était pas tant le problème ni la durée de ce problème qui le mettait ainsi, c'était plus la réaction de son meilleur ami. Parce que Maxime était normalement incapable de laisser un problème traîner, il devait s'en débarrasser au plus vite sinon il avait l'impression qu'il ne pourrait jamais le régler.

– Elian j'avais plein de trucs à faire cette semaine, genre plus que d'habitude...

Maxime repensait au soir où sa machine l'avait lâchée. À la façon dont il s'était sauvé comme jamais il ne l'avait fait auparavant. Chaque visage qu'il avait confronté était ce jour-là acéré comme une grimace malveillante. Il s'était sauvé vers le seul sur lequel il restait encore un peu de douceur. Une semaine après, il mordillait le bout de ses doigts et il trouvait encore sa décision ridicule.

En réalité, il n'avait pas eu plus de choses à faire que d'habitude. Tout avait juste été plus lourd et compliqué à assumer que d'habitude.

– Bah t'aurais dû me dire, j'aurais pu t'aider si t'étais pas dispo, Elian haussa les épaules avant de retourner dans son salon pour s'affaler sur son canapé.

La vision de son meilleur ami étalé de tout son long sur le canapé ramena un sourire discret sur les lèvres de Maxime. C'était sa place de prédilection, figée dans un temps pas si lointain où il squattait de longs mois chez lui.

– Ouais, j'aurais demandé si on était pas en train de s'embrouiller.

– Franchement je pense toujours que j'ai raison.

– Bien sûr que t'as raison. J'ai zéro arguments...

Ses pas emmitoufflés dans d'épaisses chaussettes en pilou-pilou, Maxime laissa ses murmures mourir au bord de sa fenêtre. Là où Sidjil avait tellement fumé qu'il avait sacrifié un petit pot de yaourt en verre pour servir de cendrier, il se sentait maintenant si petit, presque étranger. À la place de Sidjil, c'était comme s'il pouvait l'entendre ou comprendre pourquoi sa voix titubait aussi souvent dans la mélancolie.

Le paysage depuis son salon ressemblait à de la statique de télévision. La nuit était noire, sans étoiles. Les étoiles de ce soir gisaient sur le macadam, tout en lueurs solitaires. Son quartier semblait plus morose, et même toutes les rues sur le chemin du retour depuis ce kebab perdu à Levallois-Perret, la ville toute entière tirait la gueule.

En distinguant le contraste avec la mine fraîche d'Elian sur son paillasson, Maxime ne s'était pas empêché de penser qu'il laissait encore quelque chose sur la touche et que même la météo, même les bus et les trottoirs en avaient après lui.

– Il pleut, il annonça sans ton.

– Ça va pas me faire partir Max, répondit Elian, le visage à moitié enfoui dans un des coussins. T'es chaud pour un live cartes Pokémon ?

Maxime s'adossa contre le mur à côté de la fenêtre, y plaquant ses mains. C'était le seul moyen pour elles de les dissocier de leurs manies insupportables.

L'écho du début de soirée poussait Maxime à voir ses envies ternir. Leurs discussions, avec Sidjil, Lucas et Seb, traînaient toujours dans un coin de sa tête, turbulentes et accusatrices. Il pensait que la venue d'Elian lui apporterait juste un peu de répit, au moins l'esquisse d'une sérénité dont il ne voyait plus le dessin depuis longtemps. Mais les mots prudents de Seb altéraient même le déroulement de sa soirée.

De quoi avait-il besoin ? De son meilleur ami sur son canapé et d'un live Tiktok où ils dépensaient sans compter pour des cartes Pokémon, ou de son pote spécial sur ce même canapé et d'une heure entière à discuter ?

maxi string [maxime&djilsi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant