Page 1 : A l'encre sur le papier.

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Bizarrement, c'est Séléné qui m'a conseillé d'écrire un journal. Et pour quelque obscure raison, je l'ai écouté sans y penser deux fois. Après avoir pété un câble comme j'ai manqué de le faire l'autre fois, j'étais désespéré de trouver uen solution de toute manière. A vrai dire, j'y avais déjà pensé, je suis une homme de lettres et de mots – si on me permet l'expression. C'est quand même un peu effrayant de rédiger ses sentiments. Je ne l'adresse à personne, enfin pas consciemment. Mais je n'ai pas le choix, si je perd les pédales une fois de trop, c'en sera finit de moi. Et je ne veux pas ça.

Enfin je ne crois pas.

Séléné était avec moi, quand j'ai fait ma crise, l'autre jour. Et cette folle m'a laissé gémir parterre comme une larve dans cette allée trempée par la pluie parisienne en février, et ce, jusqu'à ce que ce soit finit. Je ne lui en veux pas pour sa froideur, nous n'avons pas le droit de nous attacher les uns aux autres. Mais enfin... il lui aurait suffit de me tendre un peu d'eau, ou juste de me frapper. A la place, quand j'ai enfin repris mon souffle, après cette insupportable crampe émotionnelle qui m'a presque fait exploser le quartier, elle m'a doublé en me tapant dans le dos et a dit : "Écrit mec. Tout ce qui ne s'exprime pas s'imprime et si tu n'as plus de place sur ta page, ton ombre se chargera de l'écrire à ta place, dans la réalité." ; Je ne sais pas si on a le droit de garder une trace écrite de nos vies... mais je n'ai pas trop le choix.

Donc bon, hors de tout contexte, c'est juste une activité normale d'étudiant en littérature. J'ai le droit d'être un civil parfois.

Même si le contraste entre ma verve à l'écrit par rapport à mon mutisme à l'oral me fait nerveusement sourire... il faut bien.

Par quoi commencer d'abord ? Je n'ai pas le sentiment qu'il y ait tant de choses à dire. Il y a beaucoup de choses à ressentir, pour sûr, mais si je devais écrire ce que je ressens ce ne serait que la répétition incessante des mêmes vagues d'émoi, cycliquement organisées dans ma semaine et entrecoupés de catastrophes banales, dont je ne peux pas parler dès le début.

Ca enlèverait tout le piquant voyons...

Nous sommes vendredi. Que dire du vendredi ? Je vais en cours, dès 8 heures et ça, ça fait mal. Mais je suis habitué au manque de sommeil. Et au moins je vis seul, je n'ai personne pour m'embêter ou me crier dessus dès le matin. Je peux manger ce que je veux, ou non.

Mais – et j'en suis assez fier – malgré tout j'ai maintenu une routine, une routine saine qui me permet de rester à peu près sain – autant que le peut un adolescent en études des lettres – ; Alors je ne me lève jamais après 10 heures, et je fais une heure de sport tous les matin entre le réveil et le petit dèj. Il faut, je dois être en forme. Et je mange, pas saintement, mais je mange à heures fixes et régulièrement.

Le seul problème d'étudiant que je n'ai pas – si on veut –, c'est l'argent. J'en ai, de l'argent et je n'en manquerai jamais normalement. Je ne le dépense pas vraiment non plus. Dans quoi je pourrai bien le dépenser ? Tout ce que j'ai c'est des carnets, des fringues, et de la bouffe à acheter. Si... j'avoue avoir acheté un PC à plus de 1000 € quand l'argent est enfin entré dans ma vie. Mais ça a été ma seule véritable folie financière.

Bref.

Le vendredi, donc, je me lève à 6h, je fais mon sport, je mange, je me lave – oui, je me lave – et je pars pour la fac.

Le vendredi, c'est le seul jour de ma semaine où je ne peux voir aucun de mes amis, parce que nous n'avons ni cours en commun, ni temps pour se voir. C'est le jour que je passe seul avec mes pensées. Fut un temps, j'aimais la solitude, je me complaisais dedans, mais depuis deux ans ce n'est plus pareil. Alors, entre chaque cours, même pour 2 minutes, mon casque rugit ma musique si fort que j'en deviens lentement sourd, et je cherche vainement du regard des gens à reconnaître.

Papillon de nuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant