Ce 6 mars fut une journée horrible. 00h01 à 23h59. Une des pires depuis longtemps.
Commençons par cette nuit d'insomnie.
Je me maudissais en toutes les langues pour cette maladresse d'idiot, tout en laissant malgré moi naître l'espoir qu'elle ne rejette pas totalement l'intention. J'avais l'impression de me dédoubler, et que pour une fois, c'était Nox qui avait les plus de belles pensées. Cette connerie, quoique j'en dise, redonne du goût à mes nuits.
Je n'ai pas fermé l'œil.
Alors ce lundi a été pénible. Ce fut dur, de me traîner en cours. De regarder Vanessa de loin, elle et son air aigri. Pourquoi avait-elle l'air si aigrie ? A cause de moi, aucun doute.
Et je me maudissais encore un peu plus, de faire abstraction de la fatigue que je lui cause, pour admirer malgré tout son sens du style. Elle portait une salopette en jean brut, avec un pull à col roulé par-dessus. Des joncs tintaient à son poignet gauche, et elle avait trois bagues à la main droite. Elle portait des converses blanches qui avaient l'air neuves avec ça, mais les lacets étaient en faux satin bleu clair. Et, elle avait relevé ses cheveux en ce genre de chignons faussement "à la hâte" que font les filles, et qui permettait de laisser voir les petites boucles d'oreilles en forme de chat argenté qu'elle avait.
Elle porte mieux les cheveux courts, elle devrait se recouper les cheveux. Enfin... ça ne l'empêche pas d'être joli exactement comme il me plait. Et j'ai soupiré, l'air surement un peu idiot, puis brusquement coupable.
Elle m'a fait signe en sortant de l'amphi, et je lui ai fait signe en retour. J'ai clairement vu sa pote demander qui je pouvais bien être. Mais je me suis éclipsé pour lire à la BU et me donner l'impression de réviser.
Je dis que cette journée a été atroce, mais en même temps pas tellement. Enfin je trouve ça atroce rétrospectivement, mais j'ai vécu des jolies choses ce jour-là. Des choses qui avec du recul m'apparaissent d'une douloureuse ironie, mais que voulez-vous... ma vie n'est que contradiction.
Je mettais des posts-it sur des pages de livre que je trouvais belles et que je voulais garder, sans admettre que ça finirait dans des lettres. Mais en même temps... avez vous lu Hernani, de Hugo ? "Je vous suivrais", n'est ce pas une ligne magnifique ? Ne suis-je pas niais comme une collégienne ? – Surement. Mais je n'ai pas à avoir honte de ce qui ne sort pas de ma tête. Je pense, et ça ne trouble personne d'autre que moi.
Enfin... sauf Vanessa.
Vanessa, qui s'est faite fidèle à elle-même ce jour-là. J'étais donc à la BU, prêt à partir pour rejoindre les autres du côté du jardin du luxembourg, et je suis tombé nez à nez avec cette jolie petite femme, qui m'a pris les les épaules avant de lâcher :
- "Reine, qui d'un regard vole les âmes, m'ouvre la poitrine et de sa main me prend le cœur en me disant : De cela ne dit pas mot."
J'ai – littéralement – bégayé. Elle a éclaté de rire, ma troisième lettre entre les doigts, avant de reculer.
- Ahah ! Tu aurais vu ta tête. soupira-t-elle en se tenant le ventre.
Est-elle vraiment sereine au sujet du psychopathe qui fait irruption dans sa chambre la nuit, ou est-ce qu'elle fait semblant ? Même si son sourire attirait le mien, et que sa lumière me donnait envie de... bref.
- Qu'est ce qui te prend ? me suis-je étonné.
- Ca te dis quelque chose ?
- On dirait du Pétrarque adapté à de la prose.
Elle a ouvert la lettre, relu le début, puis m'a regardé – je n'ai aucune prudence ma parole – ;
- Bon sang, tu es une encyclopédie littéraire toi.
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Papillon de nuit
General FictionJe l'aie longtemps aimée, Séléné. Longtemps. C'est elle qui m'a découvert, qui m'a montré ce monde, qui m'a tendu ce pacte du diable. C'est elle qui m'a en même temps sauvé de ma misère. Enfin... disons qu'elle m'a permis de troquer une misère matér...