Chapitre 31

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   Les tremblements intérieurs, ça existe ? Parce que là, au bout de la rue de Thomas, j'ai littéralement l'impression de subir un putain de séisme. Mes jambes sont presque du chamallow, à l'aide.

   Je scanne pour la centième fois mon outfit. Est-ce que j'en ai trop fait ou au contraire pas assez ? C'est le genre de tenue classique que je peux porter en sortie ou au lycée : un jean baggy taille haute et un crop top à manches longues près du corps. Mais là, je vais juste aller chez Thomas.

   Si jamais tout se passe bien, on va sûrement finir devant la télé. Dans ce cas de figure improbable, j'aurais peut-être dû enfiler un jogging, mais ça aurait donné l'impression que je compte m'installer. Mauvaise idée. Bordel je réfléchis trop, comme d'habitude. Il va finir par croire que je suis une guetteuse si je ne sonne pas dans les dix prochaines secondes.

   On dirait que je viens d'appuyer sur le détonateur d'une bombe à la place d'une ridicule sonnette. C'est moi qui vais exploser. Une minute, puis deux, ou alors seulement dix secondes, j'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est que lorsqu'il ouvre la porte, mon apnée prend fin.

   Son visage est inexpressif. Je me sens broyée de l'intérieur. Je m'attendais à quoi ? Un câlin ? Pas après tout ça, non. Il reste quand même d'une gentillesse sans faille et me propose à boire, avant de monter dans sa chambre.

   Je comprends vite pourquoi. Le rez-de-chaussée est un vrai chantier. Des bouteilles d'alcool sont éparpillées partout dans les décombres de ce qui m'a l'air d'une fête. Ils ont dû gagner le match de basket, je suppose. Pauvre Thomas. Heureusement que l'after se fait au club. Il a quand même l'air épuisé. Je doute qu'il ait beaucoup dormi.

   Son apparence reste impeccable néanmoins. À en juger par ses cheveux mouillés et son tee-shirt humide, il vient de sortir de la douche. C'est probablement une des raisons pour lesquelles il est en noir, pour éviter le genre de scène de film où les vêtements deviennent transparents et laissent voir un torse terriblement sexy. Ouais, ok j'arrête.

– Pas trop dure ta soirée ? je lui demande en montant les escaliers, étouffée par le poids du silence.

– Un véritable enfer de débauche. Tu as pu te reposer ?

– Oui ça va, merci.

   Et voilà, je ne sais déjà plus quoi dire... on dirait une conversation robotisée. Une preuve de plus que je ne suis pas douée pour les interactions. On a presque l'air de deux inconnus. J'ai soudainement super froid, alors que Thomas, lui, est en short. Rien ne va.

   La distance entre nous sur son lit est affligeante, tout comme les regards paniqués qu'on se jette depuis une bonne minute. J'aimerais ouvrir la bouche mais j'en suis incapable. Je n'aurais fait que débiter des banalités de toute façon, chose qu'il n'attend pas de moi en cet instant. Mes larmes ne coulent pas encore, c'est déjà une victoire.

– Il faut qu'on parle de la soirée, déclare Thomas, finissant par briser le silence.

   Ses mots ont l'effet de couteaux aiguisés.

– On a beaucoup bu, je parviens à bredouiller.

   Quelle conne.

– Ouais. On s'est laissé emporter, continue-t-il.

– Ouais.

– Et tu m'as laissé t'embrasser.

   C'est possible de mourir d'un mot ? Merde, ça fait tellement mal. Respire, Ava. C'est pas le moment de faire une crise de panique.

– Ouais, je souffle.

   Quelle incapable.

   Ses yeux sondent les miens, à la recherche de quelque chose.

Dans l'ombre des étoilesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant