En arrivant dans la rue de mon nouveau client, je suis subjuguée par la beauté des maisons qui la compose. De toute ma vie, je n'ai jamais mis les pieds dans un quartier comme celui-ci et je suis mal à l'aise de m'y rendre dans ma vieille voiture. Je me gare à quelques mètres de chez lui, au niveau des arbres, en espérant ne pas être remarquée. Avec ma chance et ma dégaine, je risque d'être prise pour une voleuse. Ou une droguée qui vient voler, ce qui serait pire. Je sors de la voiture et ouvre la portière arrière pour prendre mes affaires de nettoyage. Il fait sec et ensoleillé mais le vent me donne la chaire de poule. Je tire sur le sac qui me parait peser une tonne tant je suis fatiguée et me blesse avec la lame que j'utilise pour gratter le calcaire de certaine surface.
— Fuck, mon tatouage ! Je me plie en deux pour vérifier la griffe, heureusement elle ne touche pas mon serpent entourée de fleur qui orne ma cuisse et mon bassin. Je traine mon arsenal derrière moi et gravit le chemin de cailloux blancs qui montent à l'entrée. Par acquis de conscience, je sonne quand même et commence à chercher la clé que je trouve facilement sous le pot de fleur. J'ouvre la porte et la remets en place, afin de ne pas l'oublier sur moi. Je découvre une immense maison, j'entre directement dans le salon qui est ouvert sur une cuisine américaine encore plus grande. Derrière la cuisine se situe une salle à manger capable d'accueillir une trentaine de personne. Le sol est en marbre, les murs blancs et la maison sobrement décorée de quelques postures et de quelques plante judicieusement choisies. Je suis surprise par les dires de monsieur Miller, je pourrais presque manger sur le sol tant cette maison est propre.
— La poule aux œufs d'or, je l'avais dis... chuchoté-je, excitée par la découverte.
Je fais demi-tour pour chercher la fameuse liste de choses à faire que je trouve aisément sur le meuble de l'entrée.Aspirer le rez-de-chaussée (l'aspirateur se situe dans la buanderie, après la véranda)
Faire les poussières (pas l'urne de ma femme, n'oublie pas les cadres des photos, merci)
Nettoyer le sol
Faire l'escalier
La salle de bain du 1er étage
Nettoyer les chambres du 1er et 2ème étage
Terminer par ma chambreP.S : Bois une tasse de café, il est prêt. Monsieur Miller m'a dit que cela te plaisait.
Simple, efficace, rapide. Avant de passer au nettoyage, je fais le tour du bas de la maison. Le salon donne sur les portes qui mènent à une véranda qui accueil une deuxième salle à manger. Sur la gauche se situe la buanderie qui fait la taille de ma chambre et en face se situe le jardin aussi immense que mon avenir si je continue de travailler ici.
La cuisine est lumineuse et tout à l'intérieur est à la pointe de la technologie, je cherche le café dont parlait monsieur Soon dans son message et trouve une petite cafetière italienne avec un post-it collé dessus. Le café est juste dans le thermo à côté. Je souris, agréablement surprise par cette attention. La plupart de mes clients ne me proposent rien et prennent encore moins le temps de me préparer quelque chose. Je pars chercher l'aspirateur et le passe dans toutes les pièces du bas de la maison, mes écouteurs dans mes oreilles.
— Maybe I should cry for help
Maybe I should kill myself (myself, myself...)
Blame it on my ADD, baby
J'agite mon corps de gauche à droite, dans des positions aléatoires en tenant le tuyau de l'aspirateur comme s'il s'agissait d'une barre de pôle danse. J'apprécie constater que le dessous des fauteuils sont propres et qu'il n'y a rien de glissé derrière pour vérifier mon travail. Après cela, je m'affaire à dépoussiérer les meubles et les décorations. Je prends quelques secondes pour observer les cadres accrochés au mur avant de m'affairer à leur nettoyage. Le premier est une photo de monsieur Soon je suppose, et d'une femme à ses côtés, probablement la sienne. A côté, une photo d'un petit chien blanc couché sur le dos au soleil avec un prénom écrit en dessous : Dobby. La plupart des photos datent de plusieurs années et sont pour certaines dépigmentées par endroit, à cause des rayons du soleil qui tapent sur le mur. Puis, j'observe la photo d'une jeune fille. Elle doit avoir une quinzaines d'années tout au plus et se tient sur le bord de la piscine du jardin. Sa chevelure blonde s'arrête aux épaules, je souris en les imaginant en famille passer l'après-midi au soleil. A côté, une jeune fille un peu plus âgée avec la peau ébène pose dans la même position, habillée d'un bikini rouge qui fait ressortir ses courbes sur sa peau foncée. Elle est sublime. Au fur et à mesure que je passe les photos, je prends conscience que les Soon ont beaucoup de petits enfants et je suis surprise de ne pas voir de photos de leurs enfants, probablement âgés d'une trentaine ou d'une quarantaine d'années. Il n'y a pas non plus de photo du couple qui pose avec leurs petits enfants, ce que je trouve bien dommage. Ils n'ont peut-être jamais personne pour prendre la photo... intérieurement, je me promets que si j'en ai l'occasion et que je les croise tous ensemble ici un jour, je leur proposerai de poser en famille avec que cette photo vienne combler ce mur.
Je nettoie le sol et en attendant qu'il sèche, je me sers une tasse de café en scrollant sur mon téléphone. Il est déjà presque midi, je sors donc mes tartines de gouda que je trempe dans mon café. Je ramasse les mies de pain que j'ai éparpillées sur la table en granite et reprends la suite du boulot. Les tâches ne sont pas difficiles car tout est bien entretenu mais les pièces sont si grandes que cela me prend beaucoup de temps. Je fais les escaliers, sans oublier de dépoussiérer les moulures de la rampe et passe aux chambres. J'étais surprise de la taille du rez-de-chaussée mais je ne m'attendais pas à trouver 5 chambres au premier étage et une salle de bain de la taille de mon kot. Je me rends compte qu'en effet, les Soon ont eu beaucoup d'enfants. A l'intérieur de la salle de bain, il y a un bain bulle pouvant accueillir deux personnes et un sauna prennent un coin infime de la pièce. Je nettoie le double évier lorsque je m'aperçois qu'il y a une brosse à cheveux de femmes avec des cheveux dessus.
— Tiens, quatre brosses à dents...
Je fronce les sourcils avant de me souvenir des petits enfants de monsieur Soon. Il n'est pas aussi seul que le sous entendait les Miller, finalement.
Je termine l'étage vers 18H00 et passe au troisième où je passe encore deux bonnes heures à faire les 4 chambres de fond en comble. Je suis surprise de ne pas voir le vieil homme revenir, vu l'heure mais me dis finalement qu'il doit profiter avec ses petites filles qui finissent l'école plus tôt le mercredi. Chacune des chambres que je viens de faire sont composées d'un lit double, d'un dressing et d'une coiffeuse. La plupart sont vides mais 4 d'entre elles sont parsemées de vêtements et d'objets en tout genre appartenant à des jeunes filles. Nostalgique, je me surprends à les envier : moi aussi, j'aurais aimé un grand-père aimant qui aurait aménagé une chambre spécialement pour moi afin que je puisse me sentir chez moi en allant lui rendre visite. A la place, j'ai hérité d'un vide pareil à celui de mon père qui m'a abandonné avant même ma naissance.
J'ouvre l'avant dernière pièce et tombe sur une salle de sport entièrement rénovée.
— Décidément, Monsieur Soon, vous avez la soixantaine ou la vingtaine d'année, ris-je.
Avant de l'entamer, je me permets de consulter mon téléphone pour lire les nombreux messages envoyés par Florent. Celui-ci me supplie de lui pardonner, qu'il regrette et qu'il m'aime. Je grimace en me remémorant les souvenirs de la veille, ce qui ne manque pas de me rappeler mon mal de crâne qui persiste. Quel con.
Je dépose mon téléphone sur le meuble, à l'entrée de la salle de sport et commence à nettoyer les machines avec minutie. Je n'ai jamais nettoyé ce genre d'objets et y passe encore un bon bout de temps à tel point que j'entends la porte du rez-de-chaussée s'ouvrir.
— Mademoiselle Valentini ?
— Oui, j'arrive.
Je me redresse et descends à la hâte pour rencontrer mon employé.
— Monsieur, Soon, enchantée je suis Rachelle.
Je suis surprise de tomber nez à nez avec un homme d'un âge inconnu tant il a l'air bien conservé. Je ne le reconnais pas par rapport aux photos. Une coloration noir teint ses cheveux et sa barbe et un costume cintré bleu marine faire ressortir ses yeux bleus cillants. Il me sourit de toutes ses dents et m'embrasse sur la joue. Pas un baiser de politesse, un véritable baiser mouillé sur le coin de ma bouche ce qui m'arrache un haut le coeur que je dissimule difficilement. Pas doué, le vieux. Cet agissement me rappelle les bisous baveux que me donnait ma grand-mère, toujours sur le coin de ma bouche comme si viser la joue était compliqué et avec le temps je m'étais aperçue que la plupart des personnes âgées faisaient la même chose.
— Où en es-tu dans le nettoyage, beauté ?
— Euh... je termine la salle de sport et je passe à votre chambre.
— Parfait, veux-tu un verre de vin ?
— Non merci, je conduis.
Je souris timidement mais l'homme sort deux verres de l'armoire qu'il pose sur le plan en granite et remplit de vin rosé.
— Alors, que fais-tu dans la vie ?
— Je fais des études d'enseignant.
Il médite ma réponse, un sourire de satisfaction apparaît sur son visage. De ses doigts ornés de bagues, il passe son index sur le bord du verre en cristal après l'avoir léché pour faire siffler le verre. Il ne fait pas son âge, ses bras musclés tirent sur le tissu de sa veste de costume et je mettrais ma main à couper qu'il utilise la salle de sport pour son usage personnel et pas celui de ses petites filles.
— Je vais prendre une douche, tu peux terminer la salle de sport et commencer ma chambre. Je t'y rejoindrai pour te montrer quoi faire, me dit-il en me servant un nouveau verre de vin.
— Bien, monsieur.
Il sourit, satisfait et monte avec une aisance qui me laisse bouche bée.
— Et bah, quel souffle ! Soufflé-je tout bas pour ne pas qu'il m'entende.
Je monte pour terminer le nettoyage de la salle de sport après avoir éteint la musique de mon téléphone. Je ramasse mes affaires et me dirige vers la porte de la chambre que je pousse avec le dos, par chance, elle s'ouvre vers l'intérieur. Je tâte le mur pour trouver l'interrupteur, le lustre au milieu de la pièce clignote plusieurs fois avant d'illuminer la chambre plongée dans le noir à cause du noir de la nuit.
La chambre est immense, un lit en baldaquin repose au milieu de façon à pouvoir faire le tour de celui-ci. Le sol est recouvert d'un parquet brillant et le reste de la pièce est vide. Je commence à nettoyer celle-ci et m'aperçois qu'il y a une deuxième porte qui mène probablement à un dressing comme dans les autres. Je pose la main sur la poignée que je tourne et... ce que je découvre me glace le sang.
Une balançoire qui n'est pas utilisée par des enfants... pend au milieu de la pièce, toute sorte de fouets pendent sur les murs et des menottes sont posées par-ci, par-là. Ce qui me stupéfait est la télévision dans le fond, allumée mais mise en sourdine. Les images qui défilent mettent en scène l'une des jeunes filles des photos, à moitié nue sur le lit de monsieur Soon.
— Fuck, qu'est-ce ...
— Je vois que tu as découvert ma pièce avant qu'on puisse en parler, ma beauté.
Je me tourne en reculant pour observer l'homme qui se tient à l'entrée de la porte, encore parsemé de gouttez et uniquement vêtu d'une serviette de bain. Les yeux écarquillés, le coeur battant, tout mon corps me hurle de fuir mais je reste paralysée par la surprise. Une nausée sans nom soulève mon estomac et ma tête se met à tourner, ma vue se brouille, tant le choc est fort et j'ai l'impression qu'un liquide gelé se propage dans mon crâne.
— Tu vois, je cherchais une jeune femme pulpeuse pour tester de nouvelle chose...
Il laisse planer sa phrase dans l'air en passant sa langue sur ses lèvres d'un air pervers. A travers l'essuie, je vois son envie apparaître et il doit constater mon regard horrifié car un sourire sadique étire son visage pendant qu'il passe sa main sur son membre. Je touche ma poche arrière, dans l'espoir de téléphoner à la police mais... j'ai laissé mon téléphone dans la salle de sport. Fuck.
— Quand les Miller m'ont montré ta photo, je leur ai donné une somme alléchante pour te faire venir ici...
Il avance de quelques pas tandis que je recule. Le mur de velours rouges frotte mon dos et je regrette d'être venue ici. Fuck, fuck, fuck. La panique commence à prendre le dessus, de violents tremblements prennent possession de mon corps et des bouffées de chaleurs m'assaillent.
— Tes tatouages me font bander, beauté. Tu en caches d'autres ? Il me scrute de la tête aux pieds en avançant un peu plus. J'analyse la pièce mais aucune issue ne me permet de partir, il faut d'abord que j'arrive à m'éloigner de lui. Lorsqu'il s'avance à quelques centimètres de moi, l'adrénaline prend le dessus et je cours vers la porte qui mène à la chambre. Je percute le chambranle de plein fouet, ce qui m'arrache un hoquet de douleur et j'avance jusqu'au lit. Mes pas me semblent lourds et je perds doucement de la vitesse jusqu'à tomber à genoux, haletante. Derrière moi, le rire sadique de monsieur Soon résonne dans la chambre.
— Où comptes-tu aller comme ça, beauté ? Tu es à moi, maintenant mais ne t'en fais pas. Tout travail mérite salaire et tu seras très bien récompensée.
Alors que je tente péniblement de respirer, il me saisit sous le ventre et me jette dans le lit. Le choc me coupe la respiration, déjà difficile à reprendre. Mon puf, mon puf...
— Je suis normalement attiré par les filles plus jeune mais tes grands yeux enfantins et tes tatouages ont eu raison de ma bite.
L'homme ferme les volets, me coupant du monde extérieur. Ma vue se trouble et je peine à rester éveillée correctement. Il saisit mes poignets, qu'il attache aux barres du lit ainsi que mes pieds après avoir retiré mon short.
— Je ne regrette pas mon investissement, tu es incroyablement belle. On ne fait plus de filles comme toi, c'est dommage.
Il tire sur mon t-shirt, qu'il déchire sans gêne alors que je sanglote. L'air qui passe dans mes poumons est si léger que j'ai l'impression d'étouffer, tous mes membres pétillent et les larmes qui coulent sur mes joues se transforment en torrent.
— S'il...s'il vous plaît, non...
Je renifle et le supplie mais j'ai l'impression de ne pas parler tant mes supplications ne l'atteignent pas. En sous-vêtements, ainsi sur le lit et sous son corps qui m'écrase, je me sens plus misérable que jamais. Il passe ses mains derrières mon dos et dégrafe mon soutient-gorge, m'arrachant des sanglots plus forts encore. Mon corps est si lourd... BOUGE-TOI, RACHELLE ! Mais je n'y arrive pas. Mon corps est si lourd...
— Ne t'en fais pas, la drogue que je t'ai administré va bientôt se dissiper. Tu vas pouvoir profiter de tout ce que je vais te faire...
Il se retire du lit et enlève sa serviette. En me dévisageant, il prend le temps de vérifier l'état de sa virilité.
— Passons aux choses sérieuse, beauté. Il s'avance pour déposer un genou sur le lit. Trois coups de feux, son corps tombe sur moi et son sang recouvre le drap blanc sur lequel je repose. Un homme, grand et brun de cheveux se tient à l'entrée de la la chambre. Il tourne son visage vers moi, effaré et ... surpris ? L'embarras se lit dans son regard. J'ai envie de le remercier mais je n'en ai pas la force, mes yeux se ferment et se brouillent jusqu'à ce que je n'aperçoive plus rien. Tout ce que je sens, c'est le sang chaud qui coule sur mon corps alors que le vieil homme se vide.
— Putain de merde, fait chier. JE DÉTESTE LES IMPRÉVUS !
Au loin, j'entends son hurlement puis tout devient noir.
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L'effet miroir
RomanceRachelle, 20 ans, travaille sans relâche pour payer ses frais de scolarité et les soins de santé de sa mère. Elle a tout d'une jeune femme détruite par la vie. Ezio, 23 ans, tue des gens appartenant à un réseau de trafic d'humain afin d'atteindre s...