Chapitre 20 - Ezio

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Commencer à écrire votre histoire Un jour. Un putain de jour avant d'approcher du but, doucement mais sûrement. Un jour avant d'approcher son garde du corps, venu en repérage pour les futures proies de son trafic d'humain. D'enfants. De femmes. Venu repérer ses potentiels clients, prêt à payer des fortunes pour des enfants de plus en plus jeune. De plus en plus innocents.
Son procédé est simple : il envoie un homme de confiance se fournir dans les filles présentées. S'il n'y en a pas d'intéressantes, il fait comprendre aux clients présents sur place qu'il est près à venir chez eux et payer de grosses sommes pour se les approprier. Elles et leurs enfants, souvent issus des viols qu'elles subissent quotidiennement.
S'il n'y a personne à qui acheter, il y a toujours bien quelqu'un à qui vendre... Il ne reste pas un soupçon de sens moral à l'organisateur.
La bile trace un chemin jusque l'arrière de ma gorge, je la ravale et me relève. J'espère vraiment que l'autre folle ne fera pas tout capoter... mais elle rentre dans les critères, il n'aura d'yeux que pour elle. C'est sûr, elle est si belle... avec ses traits enfantins, ses formes chaleureuses et ses tatouages qui contrastent parfaitement avec la pseudo-innocence qu'elle incarne. Ça doit être une sacrée salope, ce sont les plus innocentes qui sucent le mieux fait remarquer ma conscience. Je la fais taire, outré par mes propres pensées. Je refuse de lui manquer de respect à ce point, même mentalement. J'appuie sur ma plaie pour me faire revenir sur Terre et me punir de ce que je viens de sous-entendre.
Cette nuit, j'ai rêvé d'elle et même si je ne l'avouerai jamais, je ne voulais pas me réveiller. Pour la première fois depuis longtemps, je n'ai pas fait de cauchemars.
Ce n'est pas ta faute... Elle n'a pas conscience de l'impact de ses mots sur moi, sur mon âme enrayée que je pensais disparue. Pour la première fois depuis mes 16 ans, lors de mon premier meurtre, j'ai eu l'impression d'encore être doté d'une partie d'humanité.
Je me lève du lit et me dirige vers la chambre de Rachelle, j'ouvre la porte et la faible lumière qui éclaire ses cheveux blonds foncés enroulés autour d'elle comme les serpents de Médusa fait ressortir son visage d'ange. Ainsi vêtue, ses tatouages sont observâtes et je m'en délecte quelques instants. Un dragon rouge, entouré de fleurs de cerisiers recouvre l'entièreté de son bras droit et une partie de sa clavicule. A en voir la disposition, je mettrais ma main à couper que l'oeuvre d'art s'étend plus loin sur ses côtes.
Allongée en boule sur son côté gauche, j'aperçois neufs queues appartenant à un renard, s'étendre plus haut sur sa hanche cachée par son short de pyjama.
Je m'interroge sur la signification de ceux-ci. Cette fille ne doit pas être du genre à se faire tatouer uniquement pour être stylée et je parierais presque qu'elle pousse la signification jusqu'aux fleurs dessinées ainsi que leurs couleurs, presque inexistantes.
Elle se tourne pour poursuivre son repos le dos aplatit contre le matelas, ce qui me présente son tibia gauche orné d'une magnifique libellule, entourée d'orchidée parmi lesquelles un fil rouge se fraye un chemin pour contraster avec le bleu de l'insecte. Étrange. Je n'arrive pas à émettre d'hypothèse sur leur signification, ce qui m'agace d'autant plus.
Contrarié, je me racle la gorge pour annoncer ma présence.
— Lève-toi, on part dans 10 minutes, annoncé-je à la blonde qui se réveille en sursaut.
Elle se redresse affolée, essuie la bave du coin de ses lèvres et approuve brièvement en fronçant les sourcils. J'ignore ses menaces silencieuses et me dirige vers la chambre d'Alex pour le réveiller aussi, il va nous accompagner. J'enfile un jeans noir, un pull à col roulé noir, des bottines en cuire et mon éternel veste de biker.
Alors que je les attends en tapant du pieds au bas de l'escalier, Rachelle descend vêtue d'une robe déchirée décorée de l'insigne d'un groupe dont j'ai oublié le nom. Ses bas presque transparents dévoilent les tatouages qui recouvrent ses jambes, sa veste en cuire lui cintre la taille et ses baskets s'accordent avec le style décontracté de son chignon d'où quelques mèches bouclées se détachent. Derrière elle, Alex suit dans un training mal assorti avec une tête à dormir debout.
— Tu as mal dormi, tête de noeud ?
Mon frère me fusille du regard, ce qui arrache un sourire à Rachelle.
— Ta gueule, Ez. Pourquoi je dois venir ?
Rachelle ne dit rien, elle observe les alentours comme si elle les découvrait pour la première fois en triturant les peaux de ses lèvres avec ses dents. Bordel, j'aimerais lui mordre moi-même. Qu'est-ce qu'elle est bonne dans cette tenue.
— Parce qu'on va préparer madame pour demain, avant que son cher ami ne rejoigne notre demeure pour la soirée.
Les yeux de Rachelle s'écarquillent, probablement à cause du rappel que je viens de faire.
Oui chérie, c'est demain que tu vas tuer quelqu'un. Enfin, c'est ce que j'aimerais lui faire croire... à elle mais aussi à moi-même. Si je fais ça, je briserai sa vie pour toujours et je commence à croire que ce serait injuste pour une fille comme elle.
Nous montons dans une des rares voitures citadines que je possède, une petite Renaud Arkana full options, dans le but de passer un peu plus inaperçu. Le chemin jusqu'au centre commercial est rapide, je me gare et menace Rachelle :
— Ne fais rien que tu regretterais.
— J'ai compris putain, je suis pas débile ! Pas besoin de me le répéter à chaque fois, je ne suis pas une enfant attardée !
— Une enfant, peut-être pas vu ton cul... mais une attardée, peut-être un peu. Quoique, ne soyons pas méchants pour les personnes attardées en les catégorisant comme toi.
Je lui fait un clin d'œil moqueur qu'elle repousse d'un grognement étouffé.
Sans nous attendre, elle entame le chemin vers l'entrée et s'engouffre dans les galeries en me lançant un doigt d'honneur par dessus son épaule.
— Faut pas t'énerver comme ça, ma douce, tu vas faire une crise d'asthme.
Ses joues se teintent de rose, probablement à cause de l'énervement et sa lèvre légèrement vers l'avant qui lui donne des allures d'enfants me donnent envie de rire.
Je la double et la traine à ma suite en lui tenant la main pour ne pas qu'elle s'equive. Je traverse l'étendue de magasins et les emmène dans une boutique de lingeries, Rachelle me dévisage sans comprendre ce que nous faisons ici.
— Je ne t'ai pas dis ? Tu vas jouer les mannequins dans un défilé puis tu joues la strip-teaseuse, ma belle.
Sa mâchoire manque de tomber sur le sol, ce qui fait rire Alex et elle se renfrogne probablement contre l'idée.
J'observe les bodys, les ensembles et les tenues de charme en l'imaginant dedans. Je tire sur mon jeans dans l'espoir de cacher ma bite entrain de durcir et saisis plusieurs tenues que je lui tends.
— Va les essayer.
— Il en est hors de question, répond-elle en me jetant les linges.
De l'autre côté du magasin, Alex revient avec d'autres tenues encore plus belles mais qui risquent de la mettre un peu moins à son avantage. Trop dénudées ouais, rectifie ma voix intérieure.
— Ce n'est pas une demande, Rachelle. C'est un ordre... et si tu ne fais pas ce que je te dis...
— Tu me tueras moi et mes proches, c'est bon, j'ai compris.
Le petit bout de femme se dirige vers la cabine d'essayage, avec nous à ses traces comme des chiens entrain de tenir sa tenue de demain. Je vois bien que mes menaces ne lui plaisent pas mais je n'ai pas d'autres moyens de pression, si ? Et elle est mon billet d'entrée pour cette soirée à laquelle je dois assister. Elle sera mon billet d'entrée pour d'autres soirées également mais elle ne le sait pas encore. Le temps de mes rêveries, Rachelle ressort.
— Ça ne va pas.
— Je n'ai rien vu, réessaye.
Je n'ajoute pas que je fantasme à l'idée de la voire ainsi dénudée. Alex aussi, a l'air d'être enthousiaste. Lui aussi, il bande ? Si c'est le cas, je n'aurai pas le choix que de lui trancher la gorge. Ou de discuter avec lui, avant, peut-être ? Les rideaux s'ouvrent et je découvre Rachelle dans un body rouge qui cache suffisamment sa poitrine et son intimité. Elle tourne sur elle quelques fois, les mains en l'air comme un mannequin désespéré de son travail puis elle rentre dans la cabine essayer une deuxième tenue verte. La troisième tenue prune, en deux pièces, la dévoile un peu trop et même Alex a les yeux qui pétillent, signe qu'il ne faut surtout pas l'acher, je prétends donc qu'elle ne lui va pas du tout, ce qui la pique dans son égo. Lorsque la jeune femme sort de la cabine avec la dernière tenue, j'ai envie de la prendre contre le miroir de la cabine. Ce body noir aux allures de corset sert sa forte poitrine et fait légèrement ressortir le bout de ses tétons. Agrémenté d'une ceinture avec un noeud, il souligne sa taille et lui donne des airs de cadeaux. Un cadeau pour ma bite à deux doigts de faire rompre mon pantalon.
Je secoue la tête et me gratte a l'endroit où ma plaie cicatrise difficilement, sans cesse dérangée dans son processus de guérison par mes mains qui me punissent de mes pensées salaces.
— C'est bon, rhabille-toi on a d'autres achats à faire.
Nous poursuivons nos emplettes lorsque j'entends le ventre de Rachelle crier famine.
— J'ai faim, ça vous va si on mange là ?
Je leurs montre une boulangerie et ils approuvent tous les deux. Alex est étrangement silencieux mais à le voir tirer sur son pantalon de training, je comprends qu'elle lui a fait autant d'effets qu'à moi.
J'installe Rachelle à côté de moi, dans un coin où on ne la voit pas pour qu'elle puisse manger à son aise.
Lorsque le brunch nous est servi, elle se rue dessus et commence à engloutir tout un tas d'aliments, les larmes aux yeux. J'aimerais la rassurer, lui dire que tout ira bien mais... je suis à l'origine de ses problèmes donc je ne peux pas me le permettre. En plus, lui faire la remarque ne ferait que lui rappeler que je l'ai observée en pleine crise de boulimie et ça rendrait la chose pire à encaisser pour elle. Alors je reste là, les yeux rivés sur mon assiette en la laissant combler le vide et l'angoisse qui pèse en elle. J'observe l'heure sur ma montre et constate qu'il est temps de rentrer avant que son meilleur ami ne se pointe.
— On y va.
Sans broncher, ils se lèvent et nous partons. À côté de moi, la jeune femme se gratte les cuisses de façon machinale en marchant les yeux embrumés de larmes. Elle doit s'en vouloir, maintenant.
Je ne comprends que trop bien sa culpabilité.

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⏰ Dernière mise à jour : Dec 05 ⏰

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