Chapitre 14 - Rachelle

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Lorsque j'arrive devant le loft, j'ai envie de hurler et de pleurer. Ou de faire les deux en même temps. Je monte les escaliers en fer d'un pas lourd et hésite avant de frapper à la baie vitrée mais je n'en ai pas besoin puisqu'Alex vient m'ouvrir.
— Allez, rentre ma poule tu vas tomber malade !
A peine ai-je mis un pieds à l'intérieur que Sirius me saute dessus.
— Oh, mon amour ! Je me jette sur le sol et le sert contre mon coeur. Son odeur de chien mouillé me réconforte et un instant, j'oublie la merde dans laquelle je me suis fourrée.
— Comment il s'appelle ? M'interroge Alex avec le naturel le plus déstabilisant du monde. Est-ce qu'il se rend compte que je suis avec mon chien chez mon kidnappeur qui veut me faire faire un meurtre ? Que j'ai tenté de m'enfuir et qu'il a pointé un flingue sur moi ? Qu'il m'a blessée puis qu'il m'a fait rentrer seule sous la pluie torrentielle comme si tout était normal ? Évidemment, je me retiens de lui dire et me contente de répondre.
— Sirius.
Je me redresse et m'adoucis en voyant son sourire s'élargir en comprenant la référence utilisée pour nommer mon chien.
— Une belle petite étoile, dit-il à l'intention de ma bête à poils qui se couche sur le dos pour montrer son ventre. Je le lui gratte en reniflant de toutes mes forces.
— Oh, mais tu saignes ! Se stupéfait Alex qui s'agenouille près de moi.
Je regarde mon corps, inondé de sang dilué à l'eau en secouant les épaules.
— Je me suis blessée en...
— T'enfuyant et je t'ai blessé avec mon arme, m'interrompt Ez qui descend l'escalier les cheveux trempé en pantalon de training. Ce connard a eu le temps de prendre une douche pendant que je revenais à pieds sous la pluie.
— On va soigner ça, m'invite Alex en me tendant la main comme à une enfant.
— Hors de question, ça lui servira de leçon. Monte te coucher, Alex. Je dois discuter avec elle.
Comme s'il était le roi et nous ses sujets, son petit frère s'exécute et s'éloigne après m'avoir souhaité une bonne nuit. Le grand brun me contourne pour se servir un verre d'alcool près du bar, qu'il boit d'un traite avant de se resservir et de se poser devant mois le regard plein de défis. Sirius qui semble l'apprécier s'éloigne de moi pour se coucher sur ses pieds, une pointe de jalousie me troue la poitrine.
— Bon, l'Imprévu. Parlons peu, parlons bien. Samedi nous irons à une fête où tu ... te fondras bien plus que moi dans la masse grâce à tes tatouages.
Percutée par le fait qu'il m'a presque vu nue, je cache mon corps pourtant habillé avec mes mains.
— J'ai cru comprendre que tu étais douée pour taper dans l'œil des violeurs et c'est ce que tu vas faire. Le reste, je m'en chargerai mais tu viendras avec moi.
Je déglutis. Comment ça, j'attire les violeurs ? Dans quel genre d'endroit m'emmène-t-il ?
— Je refuse d'être mêlée à toute cette merde, soufflé-je à ma propre intention comme s'il en était possible autrement.
— Parce que tu crois que tu as le choix ? Suis-moi, me dit-il comme si j'étais un chien à qui on donne un ordre.
Hors de question que je suive ce fou furieux. Je m'ancre dans le sol et l'observe prendre les escaliers qui mènent à l'étage sans bouger.
— C'est un ordre, ma douce. Ne m'énerve pas, tu en as déjà fait assez.
Son ton calme et cinglant me donne la nausée, quelque chose en moi s'allume et m'ordonne d'exécuter chacun de ses désirs au risque de me faire arracher la tête. Je le suis jusque sa chambre où il a déposé la trousse de secours saisie au passage dans la salle de bain carnagée par mes soins.
— Retire ton jeans et lève ton pull.
Les évènements de la veille jaillisse dans mon esprit, mes mains se mettent à trembler et la peur aspire mon âme pour me clouer sur place.
— Je ne te ferai rien, on va juste te soigner avant que ça s'infecte.
Je m'exécute et soigne moi-même les blessures accessibles, y compris mon oreille pendant qu'il me tourne le dos par politesse. Je le fusille du regard. Je le déteste déjà, bien plus que je n'ai jamais détesté personne. J'enfile un pantalon de training qui doit lui appartenir car il est beaucoup trop grand pour moi;
— Tourne-toi, j'ai vu que tu saignais dans le dos.
Sans répondre, je m'exécute et je me sens faible. Bien plus faible encore que face à mes harceleurs ou à la bouffe. Je me sens faible comme une souris attrapée par un chat, à sa merci malgré mes efforts pour survivre.
— Je vais poser ma main sur toi, d'accord ?
J'accepte en hochant la tête, il dépose sa main sur mon dos pour m'indiquer qu'il le touche puis se met à désinfecter une coupure dont je ne m'étais pas rendu compte. Les blessures sont nombreuses mais superficielles, je m'en remettrai vite.
— Voilà, enfile le t-shirt qui est là et retourne dormir dans ta chambre.
Je plie à ses ordres, encore une fois et je quitte la pièce pour rejoindre la chambre d'amis à côté de la salle de bain. Sa chambre est au même étage que la mienne tandis que celle d'Alex est au-dessus de nous, je me demande ce qu'il y a d'autre à cet étage. En bas, j'entends Sirius qui pleure : il a l'habitude de dormir près de moi et le fait de lui interdire de venir doit lui briser le coeur. Une règle imposée par mon kidnappeur, encore.
Alors que je grelotte encore à cause de la faim et de l'eau qui m'a glacée jusqu'à l'os, j'entends Ez descendre et parler à Sirius. De là où je suis je ne comprends pas ce qu'il dit, je reste aux aguets prête à intervenir s'il s'en prend à mon fils mais ses pleures s'arrêtent et j'entends Ez remonter. Il ouvre délicatement la porte de ma chambre pendant que je fais semblant de dormir, emmitouflée sous l'immense couette qui me protège de son regard brun.
— Je sais que tu ne dors pas, Imprévu.
Je ne réponds pas et m'enfonce un peu plus dans l'oreiller, faisant mine de ronfler doucement.
— Ton assiette est sur la commode, je ferme la porte que tu manges en paix. A demain.
Sur ces mots, le connard de service sort et me laisse seule avec ma nourriture et un millier de questions en tête. C'est quoi son problème, putain ?

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