Chapitre 8

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Mardi 9 décembre 10h25

Je m'étais levée ce matin-là avec une drôle de sensation, un mélange d'anticipation et de nervosité. Haïder m'avait proposé de sortir par message la veille, une proposition inattendue mais excitante.

J'appréhendais énormément, car je n'avais jamais été à un rendez-vous, enfin si on pouvait appeler ça comme ça. Je ne connaissais pas vraiment ses réelles intentions, peut-être voulait-il que nous restions simplement amis ? J'avais la fâcheuse tendance à idéaliser des choses en sous-estimant la complexité de la réalité.

Nous avions convenu de nous retrouver dans le vieux quartier de la ville, le Northern Quarter, un endroit pittoresque avec ses rues pavées et ses petites boutiques charmantes.

En me préparant, je ne pouvais m'empêcher de sourire en relisant son message : "Prépare-toi à la meilleure journée de ta vie, je connais un endroit qui fait les meilleures glaces au monde... ou au moins de cette rue."

J'avais ri toute seule en l'imaginant, sérieux, tout en me demandant si c'était vrai. C'était la seule personne capable de me proposer de manger une glace de bon matin, il était spécial, mais c'est ça que j'appréciais chez lui.

Je choisis une tenue décontractée, un jean confortable et un col roulé gris, puis j'ajoute une touche de gloss rosé pour donner un peu de couleur à mon visage. En sortant de chez moi, l'air frais du matin m'accueillit, et je pris une profonde inspiration, essayant de calmer les battements accélérés de mon cœur.

Je sors en prétextant aller en cours, bien que je n'en ai aucun aujourd'hui. C'était la seule chose qui passait auprès de ma mère et qui justifiait mes sorties. J'ai de la chance aujourd'hui ; elle est d'humeur neutre et ne m'impose pas son interrogatoire de police.

Arrivée au vieux quartier, je le vis de loin. Il était appuyé contre une fontaine, le regard perdu dans les vieilles pierres de la place. Lorsqu'il me vit, un sourire malicieux se dessina sur son visage, et je sentis mes joues chauffer légèrement. Je m'approche de lui, essayant de ne pas trébucher sur mes propres pieds.

– Salut, Ezia, dit-il en m'adressant un signe de tête. Prête pour notre quête de la glace légendaire ?

– Salut, Haïder, répondis-je en riant. Je me suis préparée toute ma vie pour ce moment.

Nous commencions à marcher côte à côte le long des rues pavées, évitant soigneusement les flaques d'eau laissées par une averse matinale. Le silence entre nous était ponctué par les bruits de la ville : le cliquetis des talons sur les pavés, le brouhaha des conversations et le tintement des cloches des vélos. Je me surpris à apprécier ce silence, à trouver du réconfort dans la simple présence de Haïder à mes côtés.

Après un moment, il prit la parole.

– Alors, t'as déjà entendu parler de cette fameuse glace ? Demanda-t-il.

– Pas vraiment, répondis-je en souriant. J'espère que tu ne m'as pas attirée ici sous de faux prétextes.

– Jamais de la vie ! S'exclama-t-il en levant la main droite comme pour prêter serment. Mais il faudra d'abord me battre au bras de fer si tu veux vraiment cette glace.

Je ris de bon cœur, et il sortit une pièce de monnaie de sa poche.

– Ou on peut jouer à pile ou face. Plus simple et moins risqué pour mon honneur.

Il lança la pièce en l'air, et nous la regardâmes retomber en un éclat métallique.

– Pile ! s'exclama-t-il triomphalement. Ça veut dire que je gagne... et que je choisis le parfum.

– Ah, ça ne marche pas comme ça ! Répliquai-je en attrapant la pièce. On n'avait rien décidé de tel. Allez, guide-moi, cher maître glacier en carton.

Nous continuâmes notre promenade, taquinant les vitrines des boutiques, commentant les tenues extravagantes des passants. Haïder avait une capacité incroyable à me faire rire, même lorsque je tentais de rester sérieuse. Je me sentais légère, comme si le poids des soucis quotidiens s'évanouissait en sa présence.

Finalement, nous arrivâmes devant une petite boutique de glaces, nichée entre une librairie et un café.

– Voilà notre destination finale, dit-il en poussant la porte avec un geste théâtral.

À l'intérieur, l'odeur sucrée des gaufres et des fruits frais nous enveloppa. Nous nous approchâmes du comptoir, et Haïder, fidèle à son humour, demanda :

– Votre glace est-elle vraiment la meilleure de la rue ?

La vendeuse, une dame âgée avec un sourire chaleureux, répondit sans hésiter.

– Certainement, jeune homme. Et vous pouvez prendre ma parole de plus de cinquante ans d'expérience dans la dégustation. Il lui offrit un sourire en guise de réponse.

Nous choisîmes nos parfums, et alors que nous dégustions nos glaces en marchant, je réalisai à quel point cette journée était parfaite. Les taquineries de Haïder, ses attentions et son sourire contagieux faisaient naître en moi des sentiments que je n'avais pas anticipés. J'avais l'impression de toujours l'avoir connu, bien que cela ne faisait que peu de temps.

– Merci pour cette sortie, Haïder, dis-je doucement. C'est vraiment... agréable.

– Tout le plaisir est pour moi, répondit-il en me regardant avec une lueur tendre dans les yeux. Et qui sait, peut-être que la prochaine fois, tu me montreras ton endroit préféré.

C'est toi mon endroit préféré ouai.

En continuant notre promenade, je savais que quelque chose avait changé entre nous. Les sentiments naissants étaient indéniables, et j'avais hâte de voir où cette nouvelle complicité nous mènerait. Mais je ne me berçais pas d'illusions, car je ne savais pas ce qu'il ressentait de son côté.

Nous finîmes nos glaces en discutant de tout et de rien, laissant nos pas nous guider au hasard des ruelles pittoresques. Le soleil commençait à descendre lentement, baignant la ville d'une lumière dorée qui rendait l'atmosphère encore plus magique. Nous avions passé la journée entière ensemble sans voir le temps passer.

– Ezia, dit-il finalement, brisant le silence avec douceur. Tu veux bien qu'on fasse ça plus souvent ? J'aime vraiment passer du temps avec toi.

– Je tourne la tête vers lui, un sourire sincère sur les lèvres. Oui. J'aimerais beaucoup.

Et à cet instant, alors que la nuit enveloppait doucement la ville, je savais que quelque chose de beau était en train de commencer entre nous.

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