Chapitre 9

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Samedi 12 décembre 18h48

Plantée devant le miroir, je m'interroge sur le choix de ma tenue ; une robe mi-longue noire à manche longue, c'était trop pour un anniversaire, pensais-je. Je détache mes cheveux, j'enfile des bottes hautes et un trench de la même couleur en priant pour qu'il soit assez chaud face à la fraîcheur de cette nuit de décembre.

J'avais bouclé mes cheveux pour leur donner du volume, et appliqué du mascara sur mes longs cils, ils mettent assez bien en valeur mes yeux marron. La touche finale, une huile à lèvres rosée et un peu de blush.

Une boule se forma dans ma gorge et mon cœur se serra dans ma poitrine. Je devais prévenir ma génitrice de ma sortie nocturne qui m'attirerait sans doute ses foudres. Je consulte ma montre, il était trop tard pour reculer. Je me dirige vers la porte d'entrée sans bruit afin de ne pas attirer l'attention, raté, son exclamation vint briser le silence :

— Tu crois aller où habillée comme ça à cette heure-ci ? Beugla-t-elle avec un regard hargneux. Eh, Keyan, vient voir, ta fille s'habille en prostituée maintenant ! Reprit-elle en essayant d'interpeller mon père dans la cuisine. Il bougonna des propos imperceptibles, épuisé par les remarques acerbes de sa femme.

Sous une pluie de jurons, je claque la porte et prends le chemin pour aller chez Delara. Je fus accueillie par une accolade et des cris de joie de sa part, nous rejoignîmes le salon où elle me fit la présentation de chacune de ses amies qui, soit dit en passant, avaient sorti le grand jeu. Je me sentis ridicule comparé à elles avec leur maquillage parfait. Mon pauvre blush n'avait rien à leur envier à leurs talons et à leurs robes de soirées splendides.

Elles ressemblaient à de vraies femmes et moi à une collégienne qui allait à un goûter de fin d'année, toi qui pensais en faire trop, c'est raté, ma vieille. Une des filles me jaugeait sévèrement du regard sans que je comprenne trop pourquoi. Elle portait une robe rouge mi-longue, elle avait un carré noir qui accentuait la sévérité des traits de son visage. Malgré tout, je ne pus m'empêcher de la trouver jolie.

— Ça, c'est Nezha, me chuchota Delara, elle te déteste depuis qu'elle sait que tu fréquentes mon frère.

— Quoi ? Non-non, je ne fréquente pas ton frère ! Balbutiais-je ?

— Laisse-la, elle est folle de mon frère depuis qu'on est tout petit, nos familles ont déjà prévu leur mariage depuis leurs 5 ans, ricana-t-elle. Mais t'inquiètes pas, Haïder ne s'intéresse pas à elle, ajouta-t-elle en voyant que ça ne m'amusait pas tellement.

La soirée passa et Delara souffla ses bougies. J'eus le droit à de multiples regards assassins de la part de Nezha qui avait l'air de vouloir en découdre avec moi alors que, pour ma part, je me faisais toute petite, assise dans un coin du salon, à discuter ça et là avec les amies de Delara.

Je décide de me réfugier dans le couloir pour échapper à la chaleur étouffante du salon afin d'envoyer des notes vocales à mes amies pour leur raconter la soirée et leur décrire mon accoutrement médiocre face à celui des autres. Soudain, j'entendis un ricanement dans mon dos :

— Te casse pas la tête, elles ne seront jamais à ta hauteur.

Je me retourne pour y découvrir Haïder appuyé sur la porte de sa chambre, un ensemble de jogging blanc et les cheveux décoiffés. Il semble fatigué, ses cernes sont creusés, nous avons dû le réveiller avec nos rires d'hyènes, enfin celui de certaines plus que d'autres. Je sens mon sang faire un tour et le rouge me monter au visage face à sa remarque. Je ne peux contenir mes lèvres qui s'incurvent malgré moi en un sourire.

— Garde tes disquettes pour toi, Monsieur le tombeur, rétorquais-je en riant.

— Ce n'est pas des disquettes quand c'est sincère, susurra-t-il en m'offrant un clin d'œil tout en retournant dans sa chambre.

Je reste figée pendant ce qui me semblait une éternité, perturbée par cette interaction. De retour dans le salon, je pus entendre les chuchotements de ma Némésis perchée sur ses talons hauts noirs vernis. Je fis abstraction et continuai la soirée aux côtés de Delara et de ses copines avec qui je fis plus ample connaissance. Vers minuit, les invités s'en allèrent une part une, je décidais que c'était également l'heure pour moi de partir.

Haïder débarqua tout à coup dans le salon et Nezha ne put s'empêcher de lui lancer des regards d'admiration et d'amour, regards qu'il ne lui rendit pas. À vrai dire, il ne remarque même pas sa présence, elle en vint presque à me faire de la peine.

— Ezia, tu rentres comment ? Tu veux que je te raccompagne ? M'interrogea-t-il.

— Non, t'inquiètes pas, je rentre avec une des copines de Delara !

— T'es sûre ? Insista-t-il au regret de Nezha qui crut défaillir en le voyant me porter un intérêt contrairement à elle.

J'acquiesce, ne voulant pas prolonger le malaise qui venait de se créer. Je décide ensuite de patienter dans le couloir le temps que l'amie de Delara salue tout le monde, Haïder se joignit à moi. Je lui demandai s'il n'était pas triste de ne pas avoir célébré son anniversaire comme sa sœur, il la regarda avec tendresse :

— C'est sa soirée et mon seul cadeau est de la voir heureuse.

Leur relation de jumeaux fusionnelle était belle à voir. Je sortis le petit paquet cadeau de mon sac et lui tendis, il m'observa avec incompréhension :

— C'est aussi ton anniversaire, tu croyais que j'allais t'oublier, déclarais-je avec malice.

— Tu n'étais pas obligé, vraiment, il ne fallait pas ! Bafouilla-t-il, puis il déchira le papier pour y découvrir une tasse avec pour inscription " futur docteur ", car je savais que ses études lui tenaient vraiment à cœur. Je vis son visage s'illuminer d'un sourire et il s'esclaffa.

— Elle est parfaite, ajoute-t-il en me fixant droit dans les yeux avec une lueur indescriptible.

Si j'écoutais mon imagination, il était déjà amoureux de moi et voulait m'épouser, alors qu'il s'est juste contenté de me regarder. Mais ça, c'est toi qui l'imagine, ma cocotte, pensais-je. Nous sommes interrompus par l'amie de Delara qui m'informa que nous devions partir. Je la suis vers la sortie et devant la porte, Haïder m'intime de lui écrire quand je suis arrivé. Devant tous les convives restants, dont Nezha qui devait fulminer sur le canapé.

Arrivé chez moi, je salue et remercie l'amie de Delara de m'avoir raccompagnée en voiture. Je pénètre chez moi, les lumières sont toutes éteintes. J'ai l'impression que ma mère commence à capituler face à l'insolence dont je fais preuve, selon elle, et honnêtement, ce n'est pas plus mal.

Il n'y a pas si long temps, elle m'aurait harcelé d'appels et m'aurait attendu devant la porte jusqu'à ce que je revienne pour me régler mon compte. Je me repasse la soirée dans ma tête allongée sur mon lit et me souviens de lui écrire :

« Je suis bien arrivé, je sais que tu n'aurais pas pu dormir sans mon message, bonne nuit, monsieur le paresseux. »

« Moque-toi, mais le paresseux ne peut pas dormir sans sa paresseuse, médite bien dessus. »

C'est sur ses belles paroles que je succombai au sommeil.

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