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Le printemps qu'Isidore vient de passer n'était pas tout rose. C'était même sûrement une des pires périodes de doutes de sa vie. Une crise d'adulescence, ado versions adultes. Il s'est senti très perdu, frustré et seul, mais s'est forcé à accueillir des expériences qui l'ont fait avancer dans sa quête de réponses. Il a vécu ce processus comme une corvée, ce n'est pas facile de parler aux autres... Mais il apprend à retrouver de la simplicité dans le vertige de l'existence.

Il ne se prend toujours pas très au sérieux, n'a pas d'ambition sur le long terme, réfléchit à faire un service civique après le tour d'Europe mais ce sont des et si qu'il balade que par la pensée. Finir son master ne lui a fait ni chaud ni froid, alors qu'il boucle un passage phare de son existence : les études. Mais peut-être qu'il n'a jamais vraiment donné tant d'importance à cela. Ce n'était pas si émouvant, voire trop facile de passer à autre chose. Lui, il s'est investi, sur ses liens, les moments vécus avec ses proches... comment, au fond, les accompagner dans leurs évolutions.

Isidore est aujourd'hui au milieu de la cour du collège, en pleine pause déjeuner. Les collégiens et collégiennes trépignent d'excitation face à l'arrivée de l'été. Il s'est fait quelques « potes » plus jeunes, une petite bande de garçons en qui il se reconnaît bien. À chaque fois qu'ils font une bêtise, Isidore les punit tout en leur adressant toujours un sourire en coin. Les ados le trouvent jeune pour leur imposer la loi mais le prennent comme modèles. Un grand frère strict, voilà ce qu'il est... et il aime ce rôle-là.

Au fond, Isidore n'a pas appris grand-chose de plus sur lui que ce qu'il savait déjà. Il ne s'est pas transformé en un claquement de doigts. Ce qu'il y a de nouveau, c'est cet effort de stabilisation dans l'incertitude. Vivre le flou sans y répondre par du flottement ou la fuite, mais par un ancrage réel dans l'expérience.

Aïe.

Un 6ème lui marche sur le pied. Ils se toisent. C'est si petit un mioche, se dit Isidore.

— Hé, passe-moi ton carnet de correspondance, gronde-t-il pour de faux.

Le petit panique et ouvre son sac avec des gestes brusques. Il craint un pic de colère, mais Isidore le rassure avec un regard amusé. 

— C'est une blague, relaaaaax...

Ils se sourient.

Puis leurs rires fusent, tranquillement.



FIN.

AïeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant