Chapitre 17 - Visite médicale

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Le véhicule filait au milieu d'une circulation dense. Malgré son épuisement total, Gregor observait le paysage surprenant qui s'offrait à lui. Les tours irrégulières, larges comme des quartiers, abritaient chacune un écosystème entier. Il y avait des jardins, des habitations et des magasins. Des immeubles plus modestes se découpaient sur certaines de ces tours démesurées et massives. Certaines tours, monstrueuses quartiers-usines crachaient une fumée noirâtre que Gregor imaginait empoisonnée. Et toute une foule. Beaucoup d'Humains, mais aussi des créatures plus étranges. Leurs apparences étaient différentes de ce à quoi il était habitué mais, avec après tous ses périples dans des instances diverses et variées, les divergences n'apparaissaient plus comme fondamentales pour Gregor. Au sol, les ruelles et les bâtisses ressemblaient plus facilement au monde du chasseur de primes. Des détritus jonchaient les rues, sales et étroites. Les maisons reflétaient l'état général de ce niveau zéro : pauvre et à l'abandon. Gregor nota que la sorcière Béji vivait dans ce type d'environnement.

Il avait des dizaines de questions à poser à son charmant taxi, mais il ne voulait pas paraître trop ignare. Après tout, il était censé avoir vécu dans cette instance toute sa vie.

L'étudiante avait programmé la destination. Elle pianotait sur un petit cube qui envoyait des images holographiques d'une qualité impossible. Encore un truc de commun partout, se dit-il. Perdre son temps avec des conneries...

Erven regardait sans voir. Mais à quoi jouait Béji ? Des mineurs de XG-44 ? Ils n'avaient pas les mains de travailleurs manuels, encore moins celui qui l'observait, derrière son casque. Elle espérait que sa vieille patronne ne trafiquait pas dans des choses trop graves. Elle n'avait pas envie d'avoir affaire avec le Conseil de Réhab. Elle ne voyait pas ses yeux, mais elle sentait son regard posé sur elle.

– Vous êtes obligé de garder le casque ? C'est une sorte de code ?

Il le retira. Ses yeux sombres et fiévreux témoignaient une grande fatigue. Définitivement, il n'avait pas la tête d'un mineur d'une colonie lointaine. Un mercenaire ? Mais que trafiquait sa patronne ? Erven lissa sa tresse avec nervosité.

– Béji est sympa, vous la connaissez depuis longtemps ?

– Pas mal de temps, oui, lui répondit-il avec un accent prononcé, peut-être du Royaume désertique de Vangall, où elle avait passé des vacances géniales, il y a trois cycles. Je fais affaire avec elle depuis quelques années, toujours sans le moindre problème. Jusqu'à aujourd'hui...

Tous les deux regardèrent Yimito, inconscient et brûlant de fièvre.

– Nous arrivons chez le Dr Klam dans pas longtemps.

– Très bien, merci. C'est gentil à vous de vous...

Gregor sursauta. Une capsule volante les avait frôlés en filant dans la direction opposée. Il n'y avait pas de routes à proprement parler. Les véhicules volaient chacun à toute vitesse en évitant les obstacles statiques ou mobiles. Le chasseur de primes remarqua la surprise de la jeune femme.

– Je... je suis pas habitué à la conduite automatisée.

– Ah oui ? Vous vous déplacez comment, sur la colonie XG-44 ?

– On se déplace très bien ! Mais c'est nous qui pilotons.

– Ce doit être dangereux, ça.

– Il y a quelques accidents, oui, marmonna Gregor. Mais ne dites pas que vous n'en avez aucun ici !

Erven se tut. Non, le système n'était pas infaillible. Les hackers s'amusaient bien. Mais le Conseil des Rehab les retrouvaient toujours. L'étudiante effleura son digicube et une musique emplit la capsule de croisière. Des sons rythmés, avec une ligne de basse qu'aurait appréciée Lucy, pensa Gregor. Il ne savait pas s'il fallait rire ou déprimer de cette constante entre les univers.

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