Qui connaît l'autre et se connaît lui-même
peut livrer cent batailles sans jamais être
en péril. Qui ne connaît pas l'autre,
mais se connaît lui-même, pour chaque
victoire, connaîtra une défaite.
Qui ne connaît ni l'autre ni lui-même perdra
inéluctablement toutes les batailles.
L'art de la guerre – Sun Tzu (544 - 496 av. J.-C.)
— Profitons de ce calme passager pour terminer les ébats nous avons entrepris hier ! propose, Hary.
— Le projet pourrait me séduire ! répond, Dana.
— Pourrait ? Seulement « pourrait » ? relève Henriette, tout en simulant l'indignation.
— Est-ce que « devrait » te satisfait plus ?
— Hum ! S'il était arrivé en premier, certainement. Mais là... En plus, ton conditionnel laisse planer le doute.
— Cesse de jouer à l'offusquée et viens me rejoindre sous les draps. Nous perdons un temps précieux pour rien. Et je ne sais pas de combien nous disposons.
Hary se rend à l'évidence et s'allonge aux côtés de Dana, non sans retirer ses inutiles vêtements.
Commence alors un jeu amoureux tout en douceur. Après la violence des heures passées, ce moment de pure tendresse, voire de passion, ne peut que les aider à redescendre vers une réalité éminemment humaine. Même si Dana ne l'est que partiellement.
Les gémissements s'enchaînent au rythme de leur ardeur. Les lèvres peinent à se décoller. Elles semblent se redécouvrir à chaque instant, s'attardant sur chaque repli de peau, chaque point sensible où les conduit le désir.
Leur fusion dure plusieurs heures, sans qu'elles ne s'en rendent compte.
Elles finissent par s'endormir, dans les bras l'une de l'autre, ivres de bonheur et recrues de fatigue. La guerre a quitté leur esprit le temps d'une soirée.
* * *
Un jeu du chat et de la souris a commencé depuis quelques heures entre les flottes ennemies. Une sorte de valse-hésitation entraîne les forces en présence dans un ballet d'évitement tout autour de l'orbite de Yontifalagar, sans qu'un missile ou un rayon ne jaillisse de part et d'autre.
Comme lors d'un combat de judo, les adversaires semblent rechercher la position la plus favorable sur le tatami spatial, avant de se lancer à l'assaut.
— Capitaine, des ordres viennent de nous parvenir !
— Je le sais, je suis connectée en permanence à l'IA du vaisseau, répond Ciarán.
— Comprenez-vous l'utilité de cette manœuvre ? s'interroge, Kimbu Mengue, l'officier de quart sur la passerelle de l'Argyre.
La commandante fait montre de perplexité, mais sans remettre en cause les instructions. Elle n'en devine juste pas le sens.
— Non ! Ça reste nébuleux, pour moi. Mais je dois agir en conséquence et respecter les décisions de l'état-major.
Elle se connecte mentalement à toutes les IA de la flotte présentes dans le système.
— Coordonnez-vous tous avec moi. À mon top, cessez tout mouvement et regroupez-vous autour de l'Argyre. Formation défensive FD5, avec rotation interne continue. Les vaisseaux doivent garder une vélocité de 0,5 c.
Tous les techs qui se trouvent sur la passerelle s'affairent à leur tâche, non sans afficher une mine inquiète, car personne ne s'explique le but des consignes.
