Chapitre 4

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Le soleil éclatant du matin illumine la place de Grève, où une foule nombreuse se rassemble en ce jour de fête. C'est la Fête des Fous, une tradition annuelle où les rôles sociaux sont inversés, et où le peuple, pour une journée, peut se moquer de ses dirigeants, danser, chanter, et célébrer l'inconnu, le mystérieux, et même l'absurde. C'est aussi le jour où l'on élit le "Pape des Fous", un personnage grotesque et ridicule choisi pour sa laideur et son extravagance.

Quasimodo, bien que réticent, est traîné hors de sa retraite par les cloches de Notre-Dame, comme chaque année, pour participer aux festivités. Il se fond dans la foule, conscient des regards inquisiteurs et parfois méprisants qu'on lui lance. Mais aujourd'hui, il n'est pas là par obligation, mais par espoir. Il sait qu'Esmeralda sera présente, comme tous les artistes de rue, pour divertir le public. Et c'est l'unique raison pour laquelle il a osé quitter les hauteurs sécurisantes de la cathédrale.

La place est décorée de fanions colorés, de guirlandes de fleurs, et de tentures de velours, tout cela contrastant avec la façade imposante et austère de Notre-Dame qui surplombe la scène. Les cris de la foule et le son des instruments résonnent dans l'air, créant une atmosphère festive et débridée.

Au centre de l'animation, une grande estrade a été érigée, où se tiendra le concours pour élire le Pape des Fous. Les candidats, tous masqués et déguisés de manière grotesque, défilent sous les applaudissements et les huées de la foule. Quasimodo, bien qu'il sache qu'il pourrait remporter ce concours sans même se déguiser, reste en retrait, observant la scène de loin.

Pendant ce temps, Esmeralda se prépare pour son spectacle, vêtue de sa robe éclatante et ornée de bijoux brillants qui captent la lumière du soleil. Elle est accompagnée de Djali, qui porte des clochettes autour de son cou et semble tout aussi prête pour le spectacle. Tandis qu'elle s'apprête à monter sur scène, elle croise le regard de plusieurs hommes, mais un en particulier retient son attention : un jeune capitaine de la garde, en uniforme, qui la fixe avec une intensité troublante.

Ce capitaine, c'est Phoebus de Châteaupers. Jeune, beau, et arrogant, Phoebus est habitué à ce que les femmes tombent sous son charme. Dès qu'il aperçoit Esmeralda, il est immédiatement captivé par sa beauté exotique et son énergie vibrante. Sans perdre de temps, il se fraye un chemin à travers la foule pour se rapprocher de la scène, où Esmeralda commence à danser.

La danse d'Esmeralda enflamme la place de Grève. Ses mouvements sont à la fois gracieux et pleins de vie, ses pieds frappant le sol en rythme avec le tambourin qu'elle tient dans ses mains. La foule est envoûtée par son talent, et un silence presque religieux s'installe alors que tous les regards se tournent vers elle. Même Quasimodo, qui la regarde de loin, ne peut détacher ses yeux d'elle, son cœur battant à un rythme qu'il ne reconnaît pas.

Au fur et à mesure qu'Esmeralda danse, Phoebus s'approche de la scène, ses yeux ne quittant pas la jeune femme. Lorsqu'elle termine sa danse, la foule éclate en applaudissements et acclamations. Phoebus, sans perdre une seconde, saute sur l'estrade et s'incline théâtralement devant elle.

« Belle demoiselle, » dit-il d'une voix suave, suffisamment forte pour que tout le monde l'entende, « laissez-moi vous féliciter pour cette danse magnifique. Vous avez captivé tous les cœurs, et en particulier le mien. »

Esmeralda, un peu surprise par cette intrusion, recule légèrement, mais garde son sourire. « Merci, monsieur, » répond-elle poliment, sans pour autant encourager ses avances.

Phoebus, cependant, n'est pas du genre à se laisser décourager. « Permettez-moi de vous offrir une récompense pour votre performance, » dit-il en sortant une bourse de sa ceinture et en la tendant à Esmeralda.

Esmeralda, refusant de se laisser acheter, secoue la tête. « Je ne danse pas pour l'argent, capitaine. Je danse pour la joie et pour la liberté. »

La réponse d'Esmeralda surprend Phoebus, mais attise davantage son intérêt. Il range sa bourse, un sourire en coin. « Dans ce cas, acceptez au moins mon admiration. Je suis Phoebus de Châteaupers, capitaine de la garde du roi. Si jamais vous avez besoin de protection ou d'assistance, n'hésitez pas à faire appel à moi. »

Esmeralda le remercie d'un signe de tête, mais avant qu'elle ne puisse répondre davantage, le bruit des tambours annonce le début du concours pour élire le Pape des Fous. La foule se presse autour de l'estrade pour voir qui sera couronné cette année.

Quasimodo, malgré sa réticence initiale, se laisse emporter par l'excitation générale et s'approche de la scène. Les participants sont tous plus ridicules les uns que les autres, portant des masques grotesques, des habits excentriques, et essayant de faire rire la foule avec des grimaces et des pitreries.

Quand vient son tour, Quasimodo, encouragé par quelques-uns des participants qui le connaissent de vue, monte sur l'estrade sans masque ni déguisement. Son simple aspect suffit à provoquer une réaction instantanée de la foule : des rires, des exclamations, et même des cris de surprise. Mais Quasimodo, cette fois, ne ressent pas la honte habituelle. Il est étrangement indifférent aux regards et aux moqueries, car il sait qu'Esmeralda est quelque part dans la foule, regardant peut-être, et cela lui donne une force nouvelle.

La décision de la foule est immédiate : Quasimodo est élu Pape des Fous. On le hisse sur un trône improvisé, on lui pose une couronne de pacotille sur la tête, et on le parade à travers la place sous les acclamations et les rires. Mais contrairement aux autres années, il ne ressent pas l'humiliation de cette mascarade. Quelque part en lui, l'idée de faire partie de ce monde, même si c'est pour un court instant et sous un masque de dérision, lui donne un sentiment inattendu d'appartenance.

Esmeralda, de loin, regarde la scène avec un mélange de surprise et de compassion. Elle a vu Quasimodo lors de sa danse et a reconnu en lui quelque chose de profondément humain, au-delà de son apparence. Quand elle le voit ainsi couronné et acclamé, elle ne peut s'empêcher de sourire doucement, sentant une étrange connexion avec cet être rejeté de tous.

Phoebus, quant à lui, observe Quasimodo avec une moue de dédain. Pour lui, cette élection n'est qu'un jeu stupide, une façon pour le peuple de se moquer de la laideur et de la misère. Mais il ne se préoccupe pas vraiment de Quasimodo. Son attention est toute tournée vers Esmeralda, qu'il continue de fixer avec insistance.

La fête se poursuit, mais pour Quasimodo, le temps semble s'arrêter lorsqu'il croise de nouveau le regard d'Esmeralda. Ce moment, bien que fugace, est gravé dans sa mémoire. Il se sent compris, ne serait-ce que pour un instant, et cela lui donne une force qu'il n'avait jamais ressentie auparavant.

Alors que le soleil commence à décliner, les festivités atteignent leur apogée. Mais pour Claude Frollo, qui observe tout cela depuis une fenêtre haute de Notre-Dame, l'ambiance de la fête ne fait qu'accroître son malaise. Il a vu l'interaction entre Esmeralda et Phoebus, et cela l'a profondément troublé. Un sentiment de jalousie, si inhabituel pour lui, se mêle à une inquiétude grandissante. Il sait qu'il doit garder ses distances avec cette jeune femme, mais il sent une force obscure le pousser dans la direction opposée.

La nuit tombe finalement sur Paris, mettant fin à la Fête des Fous. La foule se disperse lentement, les rires et les chants s'éteignant peu à peu, laissant place à un silence presque solennel. Quasimodo, désormais seul, retire sa couronne de pacotille et la dépose doucement au pied de la cathédrale. Il sait que demain, il redeviendra le sonneur de cloches, l'être invisible et méprisé qu'il a toujours été. Mais ce soir, il se sent étrangement heureux, car il a croisé le regard d'Esmeralda, et pour lui, cela signifie tout.

Claude Frollo, en haut de sa tour, observe la scène avec un regard sombre. Il sent que l'épreuve tant redoutée commence à se manifester, et il n'est pas sûr d'avoir la force de la surmonter.

Les mots de l'ange résonnent de nouveau dans son esprit, mais cette fois, ils sont noyés par un tourbillon de pensées et de désirs contradictoires.

Et ainsi, tandis que la ville de Paris s'endort, les cœurs de Quasimodo, Esmeralda, et Claude Frollo battent à l'unisson, chacun à sa manière, chacun en proie à des émotions qu'ils ne peuvent contrôler ni comprendre. Les liens qui les unissent commencent à se resserrer, les entraînant inéluctablement vers un destin qui échappera à leur contrôle.

Notre Dame de Paris une nouvelle chanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant