L'Ombre du Mensonge(TOME 1)

chapitre 3

**POV Omniscient :**

La nuit est encore jeune lorsque le portail de la grande demeure, qui venait de se refermer avec un claquement sec derrière Rokhiya, s'ouvre à nouveau avec un grincement métallique familier. Le silence de la rue, seulement perturbé par le bruissement des feuilles balayées par la brise, est soudain brisé par le grondement d’un moteur. Une voiture élégante, aux lignes fluides et aux phares perçants, apparaît dans l’obscurité. Elle se gare doucement à proximité des valises éparpillées sur le trottoir, là où Rokhiya se tient, seule et tremblante.

La lumière vive des phares éclaire toute la scène, révélant l'expression déterminée de Fatou alors qu’elle descend de la voiture. Ses talons claquent sur le bitume humide, sa démarche rapide et assurée, bien qu’on puisse deviner une tension dissimulée dans la raideur de ses épaules. L’air autour d’elle semble vibrer d’une énergie contenue, chaque pas résonnant comme une promesse de réconfort pour son amie.

**Fatou (d'une voix forte, pressée)** : “Rokhiya ! Je suis désolée pour tout ça.”

Elle ne prend pas le temps d’attendre une réponse. Son regard se pose sur Rokhiya, ses yeux remplis d’une tendresse inquiète, avant qu'elle ne se précipite vers les valises. Elle commence à les charger dans le coffre de la voiture avec une précipitation mesurée, ses mouvements précis et contrôlés malgré l’urgence qu’elle ressent intérieurement. Fatou ne montre rien de son propre désarroi, concentrée uniquement sur la tâche à accomplir, déterminée à sortir son amie de cette situation accablante.

De son côté, Rokhiya, toujours enveloppée dans le manteau fin qu’elle avait enfilé à la hâte, est figée. Ses doigts sont gourds de froid, et chaque souffle semble brûler dans sa poitrine serrée par la douleur et l’incompréhension. Elle observe les actions de Fatou avec un mélange de soulagement et de stupeur, son esprit essayant encore de saisir ce qui se passe. La gentillesse inattendue de sa meilleure amie semble presque irréelle, comme si elle voyait la scène à travers un voile.

**Rokhiya (la voix tremblante)** : “Fatou… pourquoi es-tu ici ? Que fais-tu ?”

Sa voix, faible et brisée, porte en elle la fatigue accumulée des dernières heures. C’est comme si chaque mot était une lutte contre le poids de sa peine, et elle parvient à peine à comprendre la rapidité avec laquelle les choses évoluent autour d’elle.

Fatou s’arrête un moment, ses mains se posant doucement sur la dernière valise avant de lever les yeux vers Rokhiya. Elle inspire profondément, sachant que ce qu'elle s'apprête à dire n'effacera en rien la douleur de son amie, mais espérant au moins lui apporter un peu de clarté.

**Fatou (les yeux baissés, la voix pleine de regrets)** : “Je suis désolée pour ce qu’Amadou t’a fait. Je savais ce qui allait arriver, mais je ne pouvais pas le dire… J’avais juré de garder le silence.”

Ces mots résonnent dans l’air, lourds de secrets et de culpabilité. Rokhiya sent son cœur se serrer encore plus fort dans sa poitrine. Les mots "je savais" semblent répéter dans sa tête, comme une litanie douloureuse. Elle veut crier, protester, demander pourquoi Fatou ne l’a pas avertie, mais elle se rend compte qu’aucune réponse ne pourra effacer ce qu’Amadou lui a fait subir. La trahison de son ex-mari est une blessure béante, mais savoir que Fatou a dû porter ce fardeau en silence ne fait que compliquer ses sentiments. Une part d’elle veut lui en vouloir, mais une autre comprend que Fatou n’avait peut-être pas le choix.

Les bras tendus de Fatou l'invitent à monter dans la voiture. Rokhiya hésite, cherchant un fragment de courage au fond d’elle-même, avant de se laisser glisser sur la banquette arrière. Elle est tellement épuisée que chaque mouvement semble lui coûter un effort surhumain. À peine installée, elle veut poser plus de questions, mais Fatou la devance, fermant la porte doucement avant de se diriger vers le siège conducteur.