27. Flash-back from San Francisco

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» Lévi

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» Lévi

1 AN ET QUATRE MOIS AUPARAVANT. SAN FRANSCISCO, MARS 2022

Au bout – Josman

Je rentre tout juste de la fin de mon service au restaurant et m'affale sur mon lit. J'entends la pluie tambouriner à ma fenêtre et quelques sirènes de police feindre le ciel calme. Je regarde mon portable qui indique quatre heures du matin. Depuis plusieurs jours et même des semaines, j'hésite à essayer de recontacter Scott. Je suis à San Francisco et la raison pour laquelle je ne l'ai pas encore appelé depuis trois mois, c'était avant tout pour sa sécurité.

« Je ferai tout ce qui est dans mon pouvoir pour la protéger et si cela signifie te jeter en pâture à la presse, ou faire sauter ta "green card", je n'aurais aucun problème moral avec cela ! »

Les mots durement prononcés par Jake Van Der Peltz me reviennent en mémoire et me hantent... En réalité, depuis ce jour-là, je n'ai pas l'esprit serein et je rencontre même des difficultés à dormir. Il faut croire qu'il a réussi à s'immiscer dans mes songes les plus profonds.

Jusqu'où ce politicien va-t-il me poursuivre ? pensé-je, les bras croisés derrière la tête allongée sur mon lit.

Souvent, c'est le remords qui me garde éveillé : celui d'avoir l'impression de ne pas m'être suffisamment battu. Mais la lâcheté n'est pas en reste dans la liste des sentiments qui me hantent. Par ailleurs, comment puis-je être sûr qu'il va me laisser tranquille ? C'est un politicien, il ment comme il respire. C'est dans sa nature.

En partant aussi loin, ce malgré ma situation peu stable, j'ai abandonné beaucoup de choses derrière moi. Scott, notamment. Je n'ai plus de nouvelles de ce dernier depuis des mois. J'ai coupé le contact, à contrecœur, afin d'être sûr que Jake ne puisse pas trouver une raison de s'en prendre à lui. S'il lui prend l'envie de me faire comprendre une bonne fois pour toutes, ô combien ses menaces sont sérieuses ! Même si Scott ne connait pas toutes les versions de l'histoire, j'espère que de là où il est, il ne nourrit pas que de mauvais souvenirs à mon sujet. Je chéris le vœu qu'il sache rebondir et s'en sortir... tout comme moi. Car je me sens incapable de vivre avec le poids des conséquences si ce n'est pas le cas. À cette simple idée, des pensées sombres envahissent ma tête et je dois me forcer à les chasser. Parce qu'elles ne sont jamais vraiment effacées, juste terrées dans un coin de ma mémoire.

Je suis un effroyable exemple de lâcheté, mais cette faiblesse d'esprit ne me caractérise pas. Du moins, je ne reconnais pas ce reflet dans la glace et cela me remplit d'aigreur. Car la personne que je vois dans le miroir a perdu son éclat. Comment transmettre toutes ces choses dans ma cuisine lorsqu'elle quitte notre aura ? L'amertume, le peps, la chaleur... Ce sont des états d'esprit avant d'être des goûts, des sensations. Venir jouer avec les papilles et surprendre à la dégustation est une marque de fabrique dans mes recettes. Pourtant aujourd'hui, je frôle l'amateurisme tant mes plats sont fades. C'est indigne de mon talent. Je suis passé de la création et faiseur de rêve à un simple exécuteur de repas sans saveurs ni passion. À quoi bon continuer avec cet état d'esprit si l'essence même pour laquelle j'ai toujours aimé cuisiner m'a quittée ? La cuisine est le reflet de l'âme et si la noirceur persiste, notre créativité s'en ressent. L'idée que cela puisse être permanent me terrifie.

Coeur Coulant (TERMINÉE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant