Un ange en enfer T1

~ Chapitre 16 ~

𝓐𝓷𝓰𝓮𝓵                                                                                                                                  La maison d'Ivan, 15h02

Je restai assise en face d'Ivan, le silence entre nous devenant de plus en plus pesant. Les ombres dansaient sur ses traits tirés, accentuant l'air sombre et implacable qu'il portait comme une seconde peau. J'étais consciente que, depuis la fusillade, nous n'avions pas vraiment parlé. Tout ce qui pesait sur moi, il le sentait aussi. Peut-être même plus encore.

Il finit par écraser sa cigarette dans le cendrier en verre, un geste lent, contrôlé. Je pouvais presque entendre son esprit travailler à toute allure, essayant de trouver les mots justes. Mais Ivan n'était pas homme à tourner autour du pot.

-Ton père... Il marqua une pause, comme s'il cherchait à mesurer la profondeur de ce qu'il s'apprêtait à dire.

-Il va revenir. Tu le sais, n'est-ce pas ?

Je baissai les yeux, jouant nerveusement avec mes doigts. La simple mention de mon père suffisait à faire ressurgir une vague d'angoisse en moi, quelque chose que j'avais si longtemps tenté d'étouffer.

-Oui... Ma voix était faible, presque un murmure.

Ivan soupira, puis se pencha en avant, posant ses avant-bras sur la table. Il me fixait, ses yeux sombres sondant les miens. 

-Pourquoi ne m'as-tu jamais tout raconté sur lui ?

Je sentis ma gorge se nouer, une boule d'émotion bloquant toute réponse immédiate. Comment pouvais-je lui expliquer ? Comment trouver les mots pour exprimer cette terreur constante, ce sentiment de trahison, cette douleur ?

-Parce que je ne pouvais pas, finis-je par dire, levant enfin les yeux vers lui.

 -Parce que c'est trop difficile à dire. Trop douloureux à revivre. Ma voix trembla légèrement.

Ivan ne répondit pas immédiatement. Il hocha la tête, ses traits se détendant un peu, comme s'il comprenait, ou du moins essayait de comprendre. Il tendit une main vers moi, comme pour établir un lien physique, et ses doigts effleurèrent les miens. Ce simple contact me fit frissonner.

-Angel, dit-il doucement, mais avec une fermeté qui me fit relever la tête.

 -Tu n'es plus seule face à lui. Tu ne l'as jamais été, depuis que tu es ici. Mais pour qu'on puisse l'arrêter, pour qu'on puisse te protéger, tu dois me faire confiance.

La gravité de ses mots résonna en moi, mais elle apporta aussi avec elle une culpabilité sourde. Je lui devais des explications. Peut-être que si je lui avais parlé plus tôt, tout ceci aurait pu être évité. Peut-être que mon père n'aurait pas pu revenir dans ma vie aussi brutalement.

Je pris une profonde inspiration, me préparant à dévoiler une part de moi que j'avais enterrée depuis longtemps. 

-Il n'a jamais cessé de me traquer, même après toutes ces années. Je ne sais même plus pourquoi. Je pensais qu'en fuyant la Russie, j'aurais enfin la paix... Mais il a toujours été là, dans l'ombre. Il ne lâche jamais. Il contrôle tout par la peur.

Mes mains tremblaient légèrement, mais Ivan ne bougea pas. Il m'écoutait, ses yeux fixés sur moi avec une intensité presque insupportable.

-C'est un monstre. Il... il m'a fait des choses... que je ne peux pas oublier. Et il veut me ramener dans cet enfer. Il veut reprendre le contrôle. Je suis partie, mais il ne me laissera jamais vivre libre.

Je sentis une vague d'émotion m'envahir, mais je la repoussai, ne voulant pas sombrer devant lui. Pas maintenant. Pas encore.

Ivan serra doucement ma main. 

-C'est terminé, Angel. Il n'aura plus jamais cette emprise sur toi. Pas tant que je suis là.

Ces mots résonnèrent en moi, et pour la première fois depuis longtemps, je sentis une once de soulagement. Mais ce soulagement était rapidement noyé par la réalité de ce monde. Nous étions encore piégés dans cette vie, entourés de violence et de trahison.

---

La nuit s'étirait, et nous étions encore là, assis dans ce silence partagé, jusqu'à ce que je décide de briser ce moment d'intimité en me levant pour aller chercher de l'eau. Mon corps se sentait lourd, comme si tout le poids de mes secrets m'avait physiquement épuisée. Je me dirigeai vers l'évier, le bruit de l'eau coulant dans le verre brisant momentanément le calme tendu de la pièce.

Mais avant que je puisse retourner à la table, Ivan s'était levé. Il s'approcha lentement de moi, son regard intense ne me quittant pas une seconde. Je pouvais sentir la chaleur de sa présence juste derrière moi. Mon corps se figea, partagé entre la crainte et un désir étrange que je n'avais jamais ressenti aussi fort auparavant.

-Angel, murmura-t-il, sa voix grave résonnant tout près de mon oreille. 

-Arrête de porter tout ça seule. Laisse-moi t'aider.

Sa main se posa sur mon épaule, et je sentis mon cœur s'accélérer. Ce contact, si simple et pourtant chargé de tant de non-dits, fit éclater quelque chose en moi. Je me retournai lentement, nos regards se croisant, et tout à coup, le silence devint écrasant.

Je n'arrivais pas à respirer. Ma tête tournait légèrement alors que je le regardais. Ivan, cet homme impitoyable, violent, mais aussi celui qui, d'une manière ou d'une autre, me protégeait. Il y avait entre nous quelque chose de dangereux, de profond, et je savais que, d'une certaine manière, c'était inévitable.

Je posai le verre d'eau sur le comptoir, mes mains légèrement tremblantes. Puis, presque instinctivement, je fis un pas en avant, brisant la distance qui nous séparait. Le souffle d'Ivan se fit plus lourd, et avant que je ne puisse me reculer, il m'attrapa par la taille, m'attirant brusquement contre lui.

-Ivan... soufflai-je, ma voix à peine audible.

Mais au lieu de répondre, il s'approcha encore plus, ses lèvres effleurant à peine les miennes, me laissant un instant de réflexion. Mon corps tout entier semblait en feu. J'aurais pu me reculer, j'aurais pu refuser, mais au fond de moi, je ne le voulais pas. Pas cette fois.

Dans un mouvement fluide, il captura enfin mes lèvres, et tout ce que je ressentais, toute la confusion, la peur, la douleur, se transforma en quelque chose de plus primal, de plus brut. Je me perdis dans ce baiser, oubliant un instant le monde qui nous entourait, oubliant le danger, oubliant tout, sauf lui.

Nous nous séparâmes légèrement, nos souffles courts. Ivan me regarda, ses yeux brûlant d'un désir que je ne pouvais ignorer. 

-C'est toi que je veux, Angel. Et je ne laisserai personne t'éloigner de moi.

Ce n'était plus une promesse. C'était une déclaration de guerre.

Je le regardai, les émotions déferlant en moi, incapables de parler, mais sachant que, quoi qu'il arrive, je venais de franchir une ligne invisible.

Et il n'y aurait plus de retour en arrière.

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Chapitre émotive.

Commentez et votez mercii 🩷🩷