Les lèvres de la jeune femme étaient le poison le plus cruel qui soit. Kazuhei savait qu'il ne devait pas y goûter, qu'il ne devait pas se laisser tenter, mais il y revenait encore et encore. Chaque baiser le perdait un peu plus, il se Noyahamait entre sa culpabilité mais aussi son désir, son envie d'en connaître plus, de la comprendre. Elle souffla contre ses lèvres avant que Kazuhei ne plonge à nouveau dans cette douce torture. Il avala son gémissement comme si c'était un élixir, et la poussa un peu plus contre le mur, avant de se coller à elle. C'était incroyable de penser que quelques minutes plus tôt, il cherchait un téléporteur à travers les couloirs et avait manqué de se faire tuer par une horde de clones. Maintenant, plus rien n'avait de sens à part la femme face à lui. Il plongea dans son cou et huma son odeur exquise avant de remonter vers ses yeux à demi-clos et dilatés, enfermés dans un voile de luxure. Il allait l'embrasser une énième fois quand la voix euphorique qu'il avait malheureusement déjà entendue résonna dans son esprit, tranchante comme une lame de rasoir.
« C'est que ça que tu veux ? Tu es sûr ? Bon sang, tu es aussi sale que nous. Qu'est-ce que penserait ta mère ? Toutes ces années à prétendre que tu étais mieux que nous et regarde-toi, tu te jettes déjà tête la première dans la boue. »
Kazuhei voulait la contredire, expliquer qu'il n'avait pas changé d'avis, mais une autre voix résonna dans ses pensées : celle de Kaede, douce, perdue, qui cherchait de l'aide.
« Explique-moi.... », souffla-t-elle, et Kazuhei plongea son regard dans le sien. La luxure l'avait quittée pour laisser la place à deux grands yeux terrifiés, qui l'observaient comme s'il était le seul maitre de son destin. Kazuhei n'y tint plus et caressa sa joue, distrait par les émotions pures que lui envoyait Kaede.
— Pourquoi est-ce que j'ai autant envie de te protéger ? murmura le jeune homme, tremblant.
Kazuhei ouvrit les yeux, paniqué. Il faillit tomber du fauteuil dans lequel il s'était recroquevillé dans son sommeil, et étira son dos endolori avant de calmer sa respiration agitée. Ce rêve lui avait donné la chair de poule, et il ne savait dire si c'était d'excitation ou de frayeur. S'il n'avait pas repris ses esprits dans ce couloir, les choses se seraient-elles passées ainsi ? Il n'osait envisager cette option.
Kaede était tout ce qu'il était censé détester et pourtant... et pourtant, elle le déstabilisait complètement. Il avait toujours cru que la voix euphorique et folle qu'il avait entendu le soir de la mort de sa mère était tout ce à quoi il devait associer la maîtresse des ombres, mais il s'était trompé. Un véritable être complexe se cachait sous cette figure hostile.
Elle l'avait sauvé... ou plutôt son pouvoir, qui n'était au premier abord fait que pour détruire, l'avait sauvé. Kazuhei ne savait qu'en penser, à part un profond dégout de lui-même. Le télépathe avait l'impression, ces derniers temps, que ses émotions et celles des autres l'oppressaient et l'empêchaient de réfléchir convenablement.
Il était perdu entre son envie d'agir avec son cerveau, et son pouvoir qui semblait interférer et agir en son nom. Il se demandait comment Koen faisait pour maîtriser chacun de ses actes avec une telle minutie.
Il jeta un œil vers la silhouette immobile de son frère, et se demanda ce qu'il en penserait. Sei ferait-il preuve d'indulgence envers Kaede ?
Probablement, mais son aîné donnerait sa chemise à n'importe qui sans y repenser à deux fois. Il soupira. Peu importe qui était Kaede. Elle pourrait devenir la plus grande des saintes et donner du pain aux pauvres, elle avait tué sa mère, Kazuhei ne pardonnerait jamais une telle chose.
Néanmoins, la barrière très stricte qu'il avait établi entre le bien et le mal s'était floutée depuis qu'il avait écarté Kaede du katana de Michiko. Kaede n'était qu'une part du grand schème de l'Organisation. Sei l'avait dit après tout, ils n'avaient possiblement pas le choix. C'était là le plus grand drame : ils avaient commis des actions impardonnables, mais peut-être pour la simple et bonne raison qu'on leur avait présenté ces actes comme le seul choix possible, la seule issue envisageable.

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L'Étincelle des Ombres - La Trilogie Sans-Frontière 1
Ficção Científica2014 : Une pensée réveille Kazuhei en pleine nuit. Celle de deux adolescents sous le joug d'une mystérieuse Organisation, qui pénètrent la maison familiale dans le but de mettre la main sur les dons de voyance de Sei, son aîné. 2024 : Kazuhei et Se...