Chapitre 36 - Au coeur des ténèbres

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Assise dans le salon, je les écoute parler sans vraiment les entendre. Salvatore est en train de nous expliquer le plan pour demain, sa voix ferme et déterminée. Il ne veut pas que Lucia et moi venions. Bien sûr. Comme toujours, on reste en dehors des affaires sérieuses.

— On va les surveiller de loin,  dit-il. On regarde qui est sur place. Elio, tu prends des photos de tout ce que tu vois. Si mon père est là, je débarque. Rick, tu surveilles mes arrières. Quoi qu'il se passe. Fede, tu seras de l'autre côté pour couvrir aussi. Je veux que chacun de nous porte un gilet pare-balles.

Il marque une pause, son regard scrutant la pièce, cherchant l'approbation silencieuse de chacun.

— J'ai confiance en nous, mais ils ont sûrement positionné des hommes partout. Ce genre de chargement est risqué.

Les autres acquiescent d'un signe de tête. Il continue, expliquant à Fede les plans qu'ils ont passés en revue ces derniers jours, les repérages qu'ils ont faits. Il parle de champs, d'un hangar. Un endroit facile d'accès, trop simple presque. Et pourtant, ça pue le piège à plein nez.

— Elio, tu te chargeras de suivre les enfants. S'ils les gardent sur place, on avise.

Mon regard se perd dans le vide, mes pensées se brouillent sous le poids de ce que je viens de comprendre. C'est bien plus gros que ce que je m'étais imaginée. Des enfants. Mon cœur se serre à cette pensée. Je jette un coup d'œil à Lucia, espérant y trouver une part de réconfort, mais elle a l'air tout aussi tendue que moi.

Elle finit par briser le silence :

— Vous allez vous tuer à trop fouiller dans cette merde.

Salvatore la fixe un instant avant de répondre, le visage dur :

— On n'a pas le choix.
— Et si vous ne revenez pas ? Les mots m'échappent avant même que je ne réalise ce que je viens de dire. Tous les regards se tournent vers moi, les visages soudain plus graves. Je serre les dents, regrettant déjà mes paroles.

Rick hausse les épaules, essayant de désamorcer l'atmosphère.

— On va revenir. Y'a aucune raison que ça se passe mal.

Je me lève brusquement, mes jambes presque tremblantes sous la tension.

— Vous savez très bien que ni mon père, ni le tien, Salva, ne prendraient le risque de compromettre leurs affaires. Et encore moins si le président est mêlé à ça. Je secoue la tête, l'amertume me grimpant à la gorge.

— Enfin bref, je suis fatiguée, je vais me reposer.

Les regards me suivent alors que je traverse la pièce. Je sens leurs yeux posés sur moi, mais je n'ai plus la force de les affronter. Juste avant de sortir, j'entends Rick murmurer :

— Qu'est-ce qui lui arrive ces derniers jours ?

Matteo répond sans trop y croire :

— Elle avait l'air d'aller bien en rentrant.

Salvatore soupire.

— Elle va bien, elle a juste besoin de temps.

Mais c'est Lucia qui éclate :

— Non, tu fais l'aveugle, Salva, putain ! Elle a besoin d'aide. Elle n'allait pas bien en rentrant, elle était juste défoncée !

Je m'arrête à quelques pas de la porte, leur conversation résonnant dans mon dos. Je ne peux pas rester là. J'avance, mais chaque mot de Lucia se grave dans mon esprit comme une vérité que je ne veux pas accepter. Défoncée ? Peut-être. Mais ça n'efface rien. Ça n'éteint pas cette rage, ce vide.

L'as de Pique ♠️Où les histoires vivent. Découvrez maintenant