Point de vue d'Emmy
Je suis installée chez Alice, entourée de rubans, de petites boîtes et de dizaines de sachets de dragées qui attendent d'être remplis et soigneusement noués. Alice a une concentration totale pour agencer chaque détail avec une précision presque militaire. On pourrait croire qu'il s'agit d'une stratégie de combat, tant elle prend la tâche au sérieux.
Je la regarde, un sourire en coin, avant de tenter une remarque pour détendre l'atmosphère :
— Tu es sérieusement en train de réfléchir à l'alignement des rubans ? Dis-moi que tu ne fais pas ça pour chaque sachet, je commence à avoir peur.
Alice lève les yeux au ciel, faussement exaspérée :
— Ce n'est pas une simple opération dragées, Emmy, c'est la bataille finale avant le grand jour ! Et puis... oui, je m'applique.
Elle sourit, un éclat un peu nerveux dans les yeux.
Je m'esclaffe et attrape un sachet de dragées pour l'assembler, plus ou moins aléatoirement. Alice me lance un regard à la fois complice et plein de malice.
— Toi aussi, tu seras la future mariée perfectionniste un jour, tu verras.
— Laisse-moi déjà m'habituer au concept de relation sérieuse, une chose à la fois ! dis-je en riant.
Elle me fixe, soudain sérieuse, et je sens son regard me sonder.
— Ça va, d'ailleurs ? Avec Maxime ?
Je pose le sachet que je suis en train de nouer, réfléchissant un instant. Parler de Maxime avec Alice, c'est accepter d'ouvrir cette petite part de moi qui se méfie encore, comme un réflexe de défense.
— Oui, ça va même très bien... Il est juste... différent. Avec lui, je me sens... je ne sais pas... plus moi-même, mais en même temps vulnérable.
Je marque une pause, avant de laisser échapper une confidence :
— Mais j'ai aussi cette petite voix qui me rappelle que tout ça peut être éphémère, que si je m'attache trop, je risque de tomber de haut.
Alice sourit, d'un sourire tendre et sans jugement. Elle pose une main réconfortante sur la mienne.
— C'est normal d'avoir un peu peur, Emmy. Mais regarde tout ce que tu as construit jusqu'ici. Tu n'as jamais perdu ce que tu étais, même en te protégeant. Avec Maxime, ça semble... naturel. Il t'aide à être toi-même, non ?
Ses mots résonnent en moi. Je pense aux petites attentions de Maxime, à sa façon de me faire rire ou de calmer mes doutes.
— Oui... Avec lui, c'est comme si mes angoisses n'avaient pas besoin de tout contrôler. Ça fait du bien, je crois.
Alice me regarde avec tendresse, et pour un instant, nous échangeons un sourire complice.
— C'est bien, alors. C'est ce que Martin fait pour moi. Être avec quelqu'un, c'est trouver une ancre, et toi, tu es son ancre aussi.
Nous éclatons de rire en réalisant la profondeur un peu mièvre de la conversation, et nous recommençons à remplir les sachets en silence. Mais même après cet échange, une part de moi continue de peser le pour et le contre, comme un vieux réflexe que je n'arrive pas à lâcher.
Soudain, la sonnerie du téléphone résonne dans le silence de la pièce. Alice se lève en vitesse pour décrocher, et dès qu'elle entend la voix à l'autre bout, je vois son visage se figer, son sourire s'éteindre. Elle acquiesce doucement, l'air de se concentrer sur chaque mot, et j'ai le sentiment que quelque chose ne va pas. Sa main libre joue nerveusement avec le bord de son pull, un tic que je n'avais jamais remarqué.
L'échange est bref. Elle raccroche lentement, l'air encore un peu absent, puis se tourne vers moi, le regard perturbé.
— Alice... qu'est-ce qu'il se passe ?
Elle hésite un instant, cherchant ses mots, puis prend une grande inspiration avant de répondre, presque à voix basse.
— C'était Martin... Il y a eu un accident.
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Quand le hasard s'en mêle
RomanceRencontrer un type canon en soirée, ça peut arriver à tout le monde. Mais quelle est la probabilité de revoir cette personne et de devoir collaborer avec elle aussi bien sur le plan professionnel... que personnel ? C'est ce qui arrive à Emmy et Max...