8. Un thé inoubliable aux Champs Elysées

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8 ans plus tôt, juste avant le mariage, point de vue d'Euphrosyne


"Euphrosyne, je t'invite cet après-midi à venir prendre le thé dans les Champs Elyséens. Je t'attends avec impatience.

J'espère qu'Hermès te donnera le message à temps cette fois-ci !

Rendez-vous pour 16h.

Ton amie"


Je me trouve dans une clairière baignée par une lumière douce et dorée, malgré l'absence de soleil. Les Champs Élysées s'étendent autour de moi comme un rêve éveillé. L'herbe est d'un vert éclatant, parsemée de fleurs aux vives couleurs. Bleues. Blanches. Jaunes. Roses. L'air est doux, bercé par une brise légère qui transporte le murmure des âmes heureuses. Leurs rires éthérés flottent comme une douce mélodie. Des enfants forment une ronde un peu plus loin, tandis que des jeunes femmes semblent fabriquer des bouquet de fleurs.

Je marche le long d'un sentier bordé de myrtes et de lauriers, ressentant à chaque pas l'ivresse de ce lieu paradisiaque. Devant moi, sur une grande place, trône une table en marbre blanc. Elle est déjà dressée d'une multitude d'assiettes et de tasses. Perséphone, mon amie de toujours, est déjà là, vêtue d'une robe violette, parsemée de motifs dorés qui captent la lumière à chaque mouvement.

— Euphrosyne ! s'exclame-t-elle de sa voix musicale, en m'accueillant avec une étreinte chaleureuse. Je suis si heureuse que tu sois venue !

— Comment résister à une invitation à goûter parmi les fleurs des Champs Élysées ? Je ris, prenant place en face d'elle. J'avais si hâte de te voir !

— Alors ce mariage ? La préparation avance ?

— Oui nous sommes presque prêts. Et j'ai suivi ton conseil, nous ne nous offrirons pas nos cadeaux de mariages mutuels durant la soirée.

— L'attente rend les choses meilleures !

— Sûrement ! Je suis tellement impatiente de déballer mon présent et de le voir ouvrir le sien ! J'ai l'impression d'être une enfant, ris-je

— Euphrosyne, tu es une enfant il n'y a pas de doute, dit d'un air sérieux Perséphone. Bien ! Passons aux choses sérieuses maintenant, continu-t-elle en prenant une grande bouchée de cake au citron. J'ai quelque chose pour toi.

Surprise, je la regarde tandis qu'elle fait de la place sur une partie de la table. Posant sa main quelque centimètres au-dessus de la nappe, elle se concentre. Une boite ronde apparaît alors. Un sourire satisfait éclaire le visage de la reine des enfers tandis qu'elle me tend l'objet. Rien que la présentation est incroyable. Rose, avec un ruban autour et ornée d'un gros nœud mauve, je n'ose pas ouvrir le coffret.

— Allez ! Ouvre ! Qu'attends-tu ? Me dit Perséphone en se trémoussant d'impatience.

Je soulève délicatement le couvercle et me fige.

— Ohhh...

— Elle te plait ? Oh dis moi qu'elle te plait ! l'air inquiète tout à coup.

— Perséphone... Elle est... juste sublime... Merci. Vraiment. Réponds-je les larmes aux yeux. Tu as très parfaitement choisi, j'adore les pivoines.

— Pivoines et gypsophile, je ne pouvais pas le rater ! C'est pour ton mariage, cadeau d'Hadès et moi. Enfin surtout moi... Tu sais comment il est, il avait déjà oublié que c'était la semaine prochaine, pouffe-t-elle alors. Il est grand temps de l'essayer ! dit-elle d'un ton enjoué.

Mon amie se lève alors et se téléporte derrière moi. De ses doigts agiles, elle attrape la couronne de fleurs et la place sur mes cheveux.

— Parfait ! dit elle un grand sourire aux lèvres ! Tu seras la plus belle !

Je lui souris, touchée.

— Encore un peu de thé ?

J'acquiesce. Nous sirotons notre thé, et le temps semble suspendu. Les douceurs ont le goût du bonheur : madeleines parfumées au nectar, tartelettes aux fraises, beignets moelleux à l'ambroisie... Tout pour ravir mes papilles.

Quand soudain, le silence si paisible du jardin se retrouve perturbé par un bruissement. Instinctivement, nous nous retournons vers les bosquets qui s'agitent de manière inquiétante. Un mouvement furtif attire notre attention sur la gauche. Un frisson désagréable parcourt ma colonne vertébrale. Qu'est-ce que cela peut bien être ? L'inquiétude commence à me nouer l'estomac.

— Perséphone ? Qu'est-ce que c'est ? dis-je, la voix un peu tremblante. Ca ne peut pas être un monstre du tartare n'est-ce pas ? poursuivis-je me sentant mal.

Avant que Perséphone ne puisse me répondre, j'aperçois une masse énorme et indistincte foncer vers notre table avec une rapidité déconcertante. Un cri de panique m'échappe. Mon cœur cogne dans ma poitrine. Une vague de terreur me saisit quand quelque chose de chaud frôle mes jambes, que je ramène instinctivement contre ma poitrine, me retrouvant en équilibre précaire sur ma chaise.

Et puis, dans une envolée presque théâtrale de la nappe, trois têtes de chien émergent, leurs yeux brillants de malice. Les langues pendantes, ils mouillent ma jupe de bave tout en me reniflant curieusement. C'est un spectacle surréaliste, à la limite du burlesque.

— Cerbère ! s'exclame alors Perséphone, alarmée mais amusée. Va-t'en ! Allez, ouste ! Tu n'es pas censé être ici !

Je ne peux m'empêcher de sourire, amusée par la situation. Les trois têtes de Cerbère s'inclinent en chœur, arborant un air de fausse innocence qui semble dire : « Qui, moi ? ». Puis, d'un bond il saute sur la table, attrapant frénétiquement macarons et croissants dans chacune de ses gueules. J'éclate de rire face à ce spectacle improbable, tendant la main pour caresser son poil soyeux, surprise par la douceur qui contraste avec son aspect terrifiant.

— Bon ! Ça suffit ! s'exclame mon amie, cette fois décidée à mettre un terme au chahut.

Après avoir fait apparaître une balle rouge dans sa main, elle la lance avec habileté le plus loin possible en direction des portes que le chien est supposé garder. Aussitôt, Cerbère se tourne et se rue vers son nouveau jouet, marchand dans les plats et les envoyant valser dans un ballet chaotique vers le sol. La théière se renverse alors, déversant son liquide fumant sur le baba au rhum. En quelques secondes, il a disparu à l'horizon.

Le soupir de Perséphone retentit comme une musique familière. Elle secoue la tête, dépoussiérant quelques miettes de son épaule tout en contemplant le désastre culinaire autour de nous. Voyant son expression déconfite, je suis pris d'un fou rire incontrôlable. C'est un instant précieux, suspendu dans le temps, où la tension et l'absurdité se mêlent, sculptant un souvenir que je suppose être inoubliable.

— Loués soient les dieux, les gâteaux des Champs se renouvellent d'eux-mêmes.

Et en effet, là où les viennoiseries avaient disparu, de nouvelles apparaissent, aussi parfaites que les originales. En l'espace de quelques secondes, toutes traces du vandalisme semblent avoir disparu. La nappe est de nouveau d'un blanc immaculé.

La malédiction d'Euphrosyne et Apollon [Romantasy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant