13. La renaissance de Rosy

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Point de vue d'Apollon, période actuelle


Le corridor exhale une odeur âcre de désinfectant, accompagnée du tintement lointain de pas épars sur le carrelage froid. Mon cœur tambourine, déchaîné par une tempête d'émotions entre appréhension et espoir. Devant moi, la porte marquée "52" trône, imposante, seule barrière entre Rose et moi.


Je la sens. Elle est là, si près de moi. Et lorsque mon attention se pose enfin sur elle, sur sa silhouette fragile à travers la vitre de sa porte, mes mains se mettent à trembler. Je sais que c'est Rose, son énergie vibre encore autour d'elle, même si elle est faible. Une larme s'échappe, trace un sillon le long de ma joue et emporte avec elle l'histoire d'une attente interminable. Un déluge de souvenirs me submerge, des rires partagés, des conversations complices, des mélodies entrainantes.


Avec une lenteur calculée, je pousse la porte qui s'ouvre en grinçant et la découvre.


Ce qu'elle a vécu ici durant toutes ces années l'a tant changée...


Sa fragilité apparente heurte mon regard. Son visage porte les stigmates des années passées à l'institut. Mais, malgré ses cernes et sa maigreur, elle reste si belle. Ses yeux, d'un vert qui m'avaient tant manqué, sont aussi sublimes que dans mes souvenirs. Ses boucles dorées, autrefois soyeuses, sont à présent emmêlées et ternies. Elles ont perdu de leur éclat. Pourtant, elles parviennent encore à capter les timides rayons du soleil qui passent au travers du carreau. Elle qui en prenait si soin et en était si fière. C'était sans doute la seule chose qu'elle aimait vraiment chez elle. Aujourd'hui, elles ne sont plus que le symbole d'une fierté de naguère, les vestiges d'un amour-propre érodé. Thalie va sûrement tomber en pâmoison quand elle verra l'état de sa sœur.


Moi, je suis tellement ému de la voir en vie. Je l'ai cherchée pendant tant d'années. 2978 jours aujourd'hui. Mais je me sens aussi si triste. La voir dans cet état, et surtout avec tant de méfiance dans ses yeux hypnotiques me bouleverse. Elle ne me reconnait pas, je le vois de suite. J'ai envie de la serrer dans mes bras. De lui dire que je suis là. Que je l'aime, que je vais la sortir de là. Lui raconter ma vie, notre vie, qui je suis et surtout qui elle était. Mais je ne peux pas. Pas encore. Je dois être patient. Et espérer, qu'un jour, elle se souvienne de l'amour que nous avions l'un pour l'autre.


— Bonjour, dis-je avec douceur en avançant dans la pièce. Sais-tu qui je suis ? Demandé-je sans préambule, l'espoir ne voulant pas disparaître si facilement.


Son regard vert lichen  se pose sur ma blouse blanche, s'attarde sur les dossiers des patients que je tiens entre mes mains. Elle scrute mon visage, à la recherche d'un indice peut-être, mais ne trouve rien. Elle me détaille, mais ne répond pas. Une inquiétude commence à naître en moi. Euphrosyne a toujours été si exubérante, riant sans cesse. La Rose d'autrefois aurait lancé une remarque espiègle ou un sourire chaleureux comme réponse à mon interrogation. Là, rien. Seulement un voile dans ses yeux, la marque indélébile d'un vécu sombre.


Peut-être qu'elle n'ose pas. Qu'elle n'ose plus. Ou qu'elle ne sait plus comment vivre, ressentir, aimer et surtout espérer.


— Je suis ton nouveau docteur, mon rôle est de prendre soin de toi. Tu peux m'appeler Apollon. Je suis ici pour toi, continué-je.

La malédiction d'Euphrosyne et Apollon [Romantasy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant