4. Les Moires

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Δεινῆς ἀνάγκης ὀυδὲν ίσχυρότετον: Ἀνάγκη γὰρ καὶ θεοὺς βιάζεται. *


L'air crépusculaire du Mont Olympe est chargé de la chaleur douce d'un soir d'été, pourtant je frissonne. Tandis que je gravis les dernières marches menant au temple d'Héphaïstos, le dieu de la forge, je ne cesse de penser à ma mission.


"Saurai-je vraiment affronter les Moires ?" murmuré-je pour moi-même, soupesant la gravité de cette entreprise périlleuse. Trouver Euphrosyne, c'est comme trouver la pièce manquante d'un puzzle, mais aussi éveiller les furies d'un destin encore plus complexe.


À l'intérieur du temple, le feu éternel de la forge crépite, projetant des ombres dansantes contre les murs de pierre. Héphaïstos se tient au centre, ses mains robustes façonnant une arme magnifiquement ouvragée. Une odeur âcre de fumée règne dans le lieu et je me retiens de tousser, sentant ma gorge me piquer. À ma vue, il lève les yeux et essuie la sueur de son front.

— Apollon, cela fait un moment. Que fais-tu ici, dans mon humble atelier ? demande-t-il avec son habituel mélange de rudesse, mais le regard empli de bonté.


Je m'approche lentement, sentant la chaleur du foyer m'entourer et chasser mes frissons. Héphaïstos ne pose pas ces questions par simple curiosité. Tout comme ses métaux, il pèse chaque mot avec soin.

— Héphaïstos, je suis confronté à un dilemme. J'ai besoin d'un service...


Les sourcils du forgeron se froncent dans une expression à la fois inquiète et compatissante. Le simple fait de parler de la malédiction d'Éris, ou simplement de le suggérer, n'évoque que des souvenirs amers pour chacun de nous.

— Je vois, dit-il avec gravité. Tu espères obtenir la bénédiction des Moires, n'est-ce pas ?

— Oui. Je dois me rendre dans leur sanctuaire, réponds-je en soupirant. Je sais que leur aide a un prix. Mais pour Euphrosyne... Je paierais n'importe lequel.


Héphaïstos hoche la tête, admiratif de ma détermination, mais conscient des risques :

— Je peux t'offrir autre chose : un bouclier forgé du même métal que ceux de nos ancêtres. Un artefact ancien qui, peut-être, les persuaderait d'alléger leur exigence.


Un sourire fugace fleurit sur mes lèvres. La générosité d'Héphaïstos contraste toujours avec son allure bourrue.

— Cela suffira-t-il à amadouer ces trois sorcières ?

Il hoche lentement la tête, ses mains déjà plongées dans le travail, martelant le morceau de bronze rougeoyant.

— Cela pourrait te protéger de certains aspects de leur influence – mais n'oublie jamais que leur jugement demeure souverain, quoi que tu leur apportes. Cela les rend juste, disons, plus conciliantes.


Je remercie sincèrement Héphaïstos, conscient que c'est bien plus qu'un simple bouclier qu'il me remet aujourd'hui. C'est un véritable gage d'espoir et un acte de foi en mon succès.


Alors que je quitte le temple, le ciel s'assombrit, zébré de couleurs crépusculaires dignes d'un tableau de maître. Je soupire, ferme les yeux et respire profondément l'air frais. Peut-être est-ce la dernière soirée paisible avant le tumulte à venir. Pour sauver Euphrosyne et braver le destin, je dois me rendre là où les autres n'osent pas aller – c'est ce que tous attendent de moi. Assis dans l'herbe, j'observe le cadeau du dieu. Rond et en bronze, des instruments de musique y sont gravés. Du bout du doigt, j'effleure le contour de la lyre présente au centre. Je sais que mon périple ne fait que commencer. Demain marquera le véritable début de ma quête.

La malédiction d'Euphrosyne et Apollon [Romantasy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant