Cheval, envole toi.

Chapitre 22

C'est comme ça que je me retrouve en train de ramener mes affaires dans un petit appartement au-dessus d'une des écuries les plus prestigieuses du coin.

J'ai mis mon appartement en location pour avoir un revenu supplémentaire et ne pas avoir à vendre tous mes meubles. De plus, au moindre problème, je pourrais facilement revenir chez moi, car je ne loue qu'à la semaine. Étant particulièrement bien placé pour tous les gros concours qui se déroulent dans le coin, je n'ai pas eu de mal à le louer.

Lorsque je me suis installée, je redescend et rejoint Monsieur Delca qui est en train de vérifier le réglage du filet d'un des chevaux qui va être monté.

"Vous vous êtes bien installée Elsa ?

- Tout est parfait, monsieur.

- Bien. Allez mettre votre bombe et vos chaps, je veux vous faire essayer ce cheval."

Je ne discute pas mais je prend le temps de jeter un coup d'œil à l'immense cheval noir. Il a de grands yeux expressifs dans lesquels je ne lis aucune trace de peur. Je me dépêche d'aller me préparer et je reviens seulement cinq minutes plus tard. Je me mets à cheval grâce à un montoir, je n'aurais jamais pu monter autrement tellement il est grand.

Son pas est ample, dynamique. J'aime beaucoup. Je suis le chemin guidé jusqu'à la carrière rennes longues. Je le laisse marcher à son rythme soutenu pendant que je règle mes étriers, car ce n'est pas ma selle. Monsieur Delca m'a expliqué qu'il préférait que chaque cheval ait sa selle plutôt que chaque cavalier. Mais il m'a aussi dit que si je voulais bien, la mienne irait sur Nino, comme je serais la seule à le monter.

J'arrive dans la carrière et je constate que je ne suis pas seule. D'autres cavaliers sont prêts à commencer de travailler, déjà détendus.

"Fais-lui une petite détente, il n'a pas besoin de plus, m'indique mon nouveau patron."

Je raccourcis mes rennes jusqu'à avoir un contact, et c'est avec une agréable surprise que, quand je ferme mes jambes, il vient se mettre tout seul en place. C'est agréable. Je prend immédiatement le trot pendant que les autres cavaliers commencent à travailler chacun de leur côté. Aimablement, ils me laissent tous la piste et un espace pour pouvoir faire des voltes. L'immense cheval dont je ne connais pas encore le nom est parfait. Il se met tout seul en place, il garde une bonne impulsion, il ne se laisse pas impressionner quand il croise les autres chevaux. Je pense que c'est un test pour moi, alors je me concentre dès ma détente. Je ne peux pas me permettre de foirer ici.

Dès que je repasse au pas pour faire marcher le cheval rennes longues, et pour ressangler, Monsieur Delca donne ses instructions.

"Faites un peu d'épaule en dedans."

Il ne fait jamais de grandes phrases, il ne s'éternise pas dans ses ordres. Je remonte sur mes rennes et je prend le temps de reprendre le contact avec la bouche de ma monture avant de lui demander l'épaule en dedans. Les débuts sont raides et chaotiques, mais je m'entend assez vite avec le cheval, et il commence à m'aligner des épaules en dedans aussi bien les unes que les autres.

Je sens le regard de l'entraineur se poser sur moi, mais je ne change rien.

"Bien."

Juste à ce mot, tout le monde cesse l'exercice, je comprends que je dois faire de même. Je marche droit, sans oublier de caresser l'encolure du grand cheval.

"Je veux voir des chevaux qui descendent leurs nez. Aujourd'hui, on va leur faire prendre de la grandeur. A la fin de l'heure, je veux voir des chevaux qui se tiennent d'eux-même et qui allongent leurs allures sans précipitation, mais en montant."