Deux mains viennent se poser sur mes épaules et me secouent brusquement : par réflexe, mon corps sursaute, reproduisant à l'identique un "Harlem Shake". J'ouvre avec difficulté mes yeux encore ensommeillés et remarque Rachel, devant moi, qui semble agacée par mon réveil difficile.
"Alice, dépêche-toi !"
"Huh..?"
En tournant la tête vers la fenêtre, je remarque que le soleil vient à peine de se lever, les nuances roses de l'aurore colorant les nuages bas du matin. Quelle heure est-il ? Environ huit heures, si l'on tient compte des heures tardives de l'hiver. Cela signifie que nous avons dormi... Seulement quatre heures ? Comment Rachel fait-elle pour être aussi énergique ? Je m'apprête à me rendormir, à même le sol, mais ma soeur me secoue une nouvelle fois :
"Arrête de dormir !"
"Mais euuuuh..."
J'avoue que je devrais vraiment revoir mes objections : la qualité de mon vocabulaire me ferait presque pitié. Alors que je m'apprête à continuer ma nuit, Rachel s'approche de moi et me susurre à l'oreille :
"C'est Noël."
En moins de deux secondes, je suis debout et assaillis par un léger vertige, du à ma précipitation. Ma soeur sourit, fière de sa technique pour me réveiller. Je songe intérieurement que si aujourd'hui avait été un jour commun, et non pas celui de Noël, elle aurai toujours pu essayer de me faire bouger. Aussitôt, Rachel sort de ma chambre et se précipite au rez-de-chaussée, sans doute pour exercer sa "méthode de réveil" sur sa mère, bien que je doute de sa réussite. Je refais rapidement mon lit, sur lequel je n'ai même pas dormi, avant d'ouvrir la fenêtre : la température, dehors, est glaciale. La neige recouvre encore quelques toits, bien que le reste soit complétement fondu et transformé en boue pâteuse. L'air que j'expire se transforme en vapeur, et je contemple celle-ci s'éloigner puis disparaître dans le reste de l'atmosphère. Commençant à avoir froid, je referme la fenêtre et descends rejoindre Rachel. En arrivant dans le salon, je croise Isabelle, avec un air aussi déterré que le mien : elle me salue brièvement avant d'aller dans la cuisine, espérant que le café puisse la sortir de sa torpeur. Rachel, quant à elle, est déjà agenouillée devant le sapin et semble ne plus tenir en place : ses yeux se posent sur chacun des cadeaux présents au pied de l'arbre. Je ne peux m'empêcher de pouffer de rire : elle ressemble vraiment à une enfant ! Bien que je ne sois pas plus mature, certes... Je la rejoins rapidement, afin qu'elle n'ait plus à s'impatienter davantage. Elle me regarde un court instant, le sourire aux lèvres et ses iris pétillant de joie. Je sens mes joues rougir : en plus d'être une déesse, elle incarne le bonheur maintenant ? "Trop de perfection dès le matin.." semble soupirer ma conscience. Et pour une fois, je suis d'accord avec elle.
Après les cadeaux déballés, nous établissons un bilan : des livres, deux pulls faits à la main et quelques chocolats que nous nous partagerons. Alors que je feuillette vivement les romans qu'Isabelle nous a offerts, Rachel sort un paquet rectangulaire mais plat, caché par les branches basses du connifère. Elle m'interroge du regard, je regarde Isabelle, Isabelle encourage Rachel : qui a dit que la communication était notre fort ? Ma soeur, n'ayant pas réussi à deviner l'objet emballé, enlève le papier cadeau avec méfiance. A peine en a-t-elle retiré un lambeau que je comprends instantanément : cette partie rugueuse, gris foncé, semblable à du bitume mais beaucoup plus adhérente, qui recouvre une planche en bois surmontée par quatre roulettes...
"C'est un skate-board !"
Rachel sursaute : je n'aurais peut-être pas du le crier... Une fois le skate-board en question sorti de son emballage, je sens les larmes me monter aux yeux : j'ai toujours rêvé d'en avoir un ! Je tourne la tête vers Isabelle qui me répond avec un clin d'oeil. Comment a-t-elle su que cela me ferait autant plaisir ? Je soupçonne les services d'adoption de révéler des informations me concernant, à mon insu. Rachel penche la tête de côté, soudainement interessée par l'objet. Je lui souris et lui promets que l'on s'entraînera toutes les deux à en faire. Elle ne semble pas très enthousiaste à l'idée de s'écraser plusieurs fois sur le trottoir avant de trouver l'équilibre.
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How on earth can I love her ?
Genç KurguDe nos jours, l'homosexualité est un sujet devenu peu à peu laxiste : on en parle plus facilement, mais rarement sans gêne. A celui-ci s'ajoutent des cas dont personne n'ose parler, y compris le pseudo-inceste. Les familles recomposées sont une sour...