Un dilemme intérieur rongeait Cyril depuis plusieurs jours. Sa fidélité à son père encore présente obligeait les Ronoriens à le garder enfermer mais depuis son intervention lors d'une réunion, il avait des heures de sorties autorisés. Le matin entre dix-heures et onze-heures et l'après-midi, vers dix-huit heures et jusqu'à ce que la nuit tombe. Le matin, il marchait seul dans la cour de la maisonnette délabrée où il vivait, surveillé par deux hommes à l'allure objectivement terrifiante. Il réfléchissait à toutes les possibilités qui s'offraient à lui s'il décidait de fournir son aide à Charles. Malheureusement il y en avait relativement peu. Il ne désirait guère la mort de son père. Il voulait avant tout prouver à Lana qu'il était capable d'être de son côté, à elle, de se battre contre un tyran même si celui-ci était son propre père. Il en avait assez d'être « le Prince Fantôme » qu'on évoque sans cesse dans la presse d'opposition. Il voulait être « le Prince Révolutionnaire ». Oui ! Pourquoi pas ?! Mais il devait assurer la sécurité de sa famille. Et quoi de mieux que d'être avec les Ronoriens pour protéger sa famille de leur colère ? Etre avec eux pour limiter leur dévastation. Etre l'âme modérée du mouvement. Cyril voyait cette perspective comme la seule qu'il avait. Bref le matin étant réservée à la réflexion politique du jeune Prince, le soir, Lana se joignait à lui pour marcher, non dans la cour, mais dans les rues de la ville, toujours avec les deux Ronoriens à sa suite. Ils parlaient peu surtout à cause des geôliers de Cyril. Ils parcouraient la ville, calme et silencieuse, eux-mêmes calmes et silencieux. Souvent ils allaient dans un parc où les enfants de l'école du village voisin, profondément impérialiste, venaient jouer. Certains avaient reconnu Cyril mais il prétendait juste qu'il ressemblait beaucoup au Prince, les enfants, innocents qu'ils étaient, trouvaient cela amusant et étrange sans contester les paroles du Monsieur et quand ils rentraient chez eux, ils racontaient avec émerveillement à leurs parents qu'un jeune homme était le portrait craché du Prince. Cette situation faisait sourire Lana qui assistait Cyril dans ce mensonge. Il se demandait pourquoi elle était là, avec lui ? Car tout cela était bien ennuyeux. Elle devait être lassée. C'était surement son père qui lui demandait d'être ici afin de séduire politiquement le Prince pour qu'il se rattache à leur cause. Cette supposition qu'il prenait pour acquise, le chagrinait. De ce fait il ne faisait aucun effort envers elle, surtout du côté de la conversation. Elle parlait de tout et de rien. De musique, d'art mais surtout de politique, ce qui agaçait Cyril. Il lui dit :
-Parlons d'autre chose, voulez-vous !
-Soit...Souffla-t-elle résignée. Lancez donc un sujet, vous qui êtes si intelligent ?
Elle fit un sourire profondément narquois. Il se sentit bête, ne sachant que dire, alors il parla de ce qu'il connaissait : sa famille.
-Elle me manque. Avoua-t-il. Surtout ma sœur. Je ne sais même pas si elle est rentrée, ou fiancée ? Ou les deux ?
-Mon père doit sûrement savoir. Dit-elle. Il sait toujours tous vous concernant. C'est effrayant à certains degrés. Il est obsédé par Vladimir et tout ce qui le concerne de près ou de loin.
Cyril n'en fut guère surpris. La toile dans la salle où se tiennent les réunions trahissait ce trait de caractère de Charles Ronor : une véritable obsession le rongeait. Ils allèrent voir Charles qui travaillait à l'épicerie du village, être un révolutionnaire caché ne permettait pas de gagner correctement sa vie. Il effectuait les commandes et gérait le budget étant le plus érudit des hommes d'Orchida. Il avait fait ses études au lycée impérial, le même que l'Empereur. Bref il s'activait quand sa fille, les deux costauds et Cyril arrivèrent. Impossible de savoir s'il était heureux de leur présence, il restait impassible. Au milieu de rayons du petit magasin, Lana demanda à son père s'il avait des nouvelles de Rebourg. Ce dernier était accompagné d'un grand brun au regard froid que Lana salua, il se nommait Laurel :
VOUS LISEZ
Les Seigneurs de Fallaris Tome 1: Allénie
Historical FictionHistoires politiques, amoureuses et fictionelles sur un monde dominé par les Seigneurs de Fallaris. http://lesseigneursdefallaris.tumblr.com/ "Le plus beau jour de la chute d'un tyran, c'est le premier" Tacite Tome 1: Allénie Voici un monde où les...