Chapitre XVIII

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Les jours passèrent en Allénie et Salim découvrait doucement ce qui l'attendait jusqu'à la fin de sa vie. Ce quotidien royal si pompeux avec ses nombreuses étiquettes.Elizabeth s'en accommodait avec une grande patience et beaucoup de tact. Elle était sociable pour deux. En effet depuis leur arrivée sur le territoire allénien, Salim et sa fiancée multipliaient les apparitions en public pour être aimés par ce peuple qu'ils allaient un jour gouverner. Un jour c'était l'inauguration d'une centre de loisir, le lendemain une promenade avec des enfants d'un orphelinat, ainsi de suite. Le soir ils dinaient avec l'impératrice et son époux. Salim en avait assez de cela. Un mois après son arrivée, à seulement quelques jours du mariage, il dit à Elizabeth, alors qu'ils se trouvaient ensemble dans le salon des appartements de cette dernière :

-Je veux du temps pour moi. Je veux qu'on me laisse seul un instant.

Elle releva la tête vers lui :

-Que veux-tu dire par là ?

-Je veux dire par là que j'en ai assez de me faire balader. Je connais les hôpitaux, orphelinats, et centres d'aide de Rebourg comme ma poche.

-Je ne te balade pas. Répliqua-t-elle. Nous sommes obligés de te forger une image avant le mariage.

-C'est ridicule ! S'écria-t-il en se levant du canapé.

Brusquement il se calma avant même qu'Elizabeth ne comprenne qu'il s'énervait. Elle était impressionnée. Ce regard si rude devint apaisant. Il se contrôlait si bien que cela en était déroutant, plus déstabilisant qu'une colère brusque :

-Je suis désolé. Souffla-t-il penaud. Je comprends tout à fait cette propagande impériale. Faire croire au monde que nous sommes unis, permettra au monde de croire que nos pays sont unis.

Elizabeth quitta son fauteuil et s'approcha de Salim :

-Ne t'excuse pas. Chuchota-t-elle. Que veux-tu faire demain ?

-Je ne sais pas. Je veux découvrir l'Allénie sous un angle nouveau. Montre- moi pourquoi tu tiens à ton pays.

-J'ai une idée. Nous emmènerons Cyril. Il a besoin de changer d'air.

Salim eut un petit sourire. Il était exténué, il gagna donc sa chambre, laissant Elizabeth le soin de prévenir son frère. Dans les appartements qu'il occupait, il s'installa au petit bureau et rédigea une lettre :

Chère Saphira, mon amour,

Je suis épuisé par tout ce protocole, toute cette intention que je ne mérite pas. Les gens me voient comme le futur Empereur, l'époux de leur impératrice, mais je ne me vois pas comme cela. Je suis un traître qui se marie avec une femme qu'il n'aime pas et elle le sait. Elle sait tout et elle l'accepte pour le bien de son pays, de mon pays, et de ton pays. Je la trouve courageuse et intelligente. Elle devient une amie pour moi, une alliée dans le mensonge que nous formons. Néanmoins mon amour est tout tourné vers toi. Je ne sais si un jour je viendrai te voir au Nouveau-Duché, je me sens comme prisonnier dans un pays tout entier, ma geôle est un palais, mon gardien un empereur.

Je te demande humblement de me pardonner d'être ici, d'être avec elle. Mon sacrifice personnel est couteux mais juste et nécessaire. Souvent ce qu'il faut faire et la chose la plus difficile à accomplir.

J'implore toutes les puissances supérieures auxquelles je crois. Je demande chaque instant leur aide, leur soutient, car bientôt je devrai dire que je ne crois plus qu'en une seule force divine. Mais tout comme mon cœur t'appartient, ma foi appartient aux puissances de mon enfance, celles que mon père m'a appris à vénérés.

Les Seigneurs de Fallaris   Tome 1: AllénieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant