Chapitre VI

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Dévasté par le départ de sa fille, Cyril s'était réfugié chez Lana depuis plusieurs jours. Leurs nuits d'amour n'arrivaient pas à le rendre heureux. De plus Lana préparait son mariage avec Hermann. Ce dernier n'arrivait pas à voir Cyril en face depuis qu'il avait échangé plus qu'un baiser avec la jeune femme. Il aimait Lana, mais elle aimait Cyril. Il s'en voulait donc terriblement d'avoir profité du désespoir de la jeune femme pour passer la nuit avec elle. Cyril, dont les pensées étaient toutes tournées vers sa fille, ne remarquait pas le changement d'attitude d'Hermann à son égard. Ce dernier et Lana s'étaient mis d'accord, il ne fallait rien dire à Cyril. Lana ne supporterait pas la situation s'il venait à la quitter. Dans l'appartement de Lana, Hermann parlait du mariage avec Cyril :

-J'aimerai que tu sois mon témoin. Tu accepterais ?

Cyril eut un léger sourire :

-Bien sûr mon ami. Si tu épouses Lana je sais que c'est pour moi. Alors évidemment que je serai là.

Hermann se sentit rougir. Il décida de partir pour laisser les deux amants ensemble. Après son départ Cyril s'excusa auprès de Lana :

-Je suis navré de ne pas pouvoir t'épouser et t'aimer librement.

-Ce n'est pas ta faute. Dit-elle lassée.

-Il fut un temps où cela aurait été possible. Tu sais ? Si tu avais dit « oui » dès le début.

-Arrête de me le rapprocher à chaque fois. Pestiféra-t-elle.

-Pourtant je t'aime, et depuis le début ! Pourquoi avoir refusé ? Demanda-t-il énervé.

-Aimer ne suffit pas ! Tu le sais très bien ! Aimer ne suffit jamais.

Cyril ne savait que répondre. Elle avait entièrement raison :

-Nous nous disputons sans cesse. Dit-il.

-C'est ainsi.

-Un jour tu me détesteras. J'en suis certain.

-Peut-être, mais cela ne m'empêchera pas de t'aimer pour toujours.

Elle l'embrassa. Ils vivaient comme des clandestins et Cyril en avait assez. Passer son temps à échapper à sa garde personnelle, à sa sœur, à se cacher chaque jour pour pouvoir vivre son amour avec Lana. Elizabeth était préoccupée par l'état de Salim sur le front, il ne devrait plus tarder à revenir selon les autorités sur place, c'est-à-dire Sélène :

-Demain je me marie. Se rappela Lana. Mon seul regret c'est que ce ne soit pas avec toi.

Cyril sourit.

Ils allèrent dans une petite église de la province, loin de Rebourg et de cette ambiance malsaine qui y régnait. Hermann était mal à l'aise dans un costume, il tirait sur les manches et regardait toujours en l'air, cherchant des yeux un signe de Rey, puisqu'il était dans sa demeure. Lana n'aurait jamais fait l'effort de porter une robe, elle haïssait ce genre de vêtement qui, selon elle, traduisait l'emprise des hommes sur les femmes. Elle arriva en pantalon, avec une veste et une chemise blanche. L'homme d'église haussa un sourcil de surprise. Il demanda à Hermann s'il était sûr de son choix :

-Vous n'imaginez pas à quel point. Souffla-t-il.

Cyril était à côté de lui. Lana alla d'abord vers lui et l'enlaça, avant de rejoindre Hermann devant l'autel. Le témoin de Lana était Lionel, elle n'avait trouvé que lui pour garder le secret de cette union de raison, pour qu'un enfant ait un nom, une famille, un père. C'était la cérémonie la plus bizarre à laquelle Cyril avait assisté de toute sa vie. Ce qui l'interpella fut le regard, l'allure que dégageait Hermann. Lana était triste, sans réelle émotion, elle essayait de cacher son humeur à l'homme qui la mariait. Mais Hermann était étrangement pétillant et heureux. Il agissait comme-si c'était son véritable mariage. Puis ce fut le traditionnel moment du baiser. Cyril baissa les yeux. Il était extrêmement jaloux. Il n'avait jamais ressenti cela de toute sa vie. Il bouillonnait de l'intérieur. Puis ils se rendirent à la mairie, afin de signer les papiers officialisant leur union. Le mariage finit, ils marchèrent un peu dans le village. Ils ne disaient mot. Lionel commença à parler avec Lana et lui demanda s'ils pouvaient s'isoler. Elle accepta. En attendant Cyril posa une question qui le tracassait à Hermann :

-Depuis quand l'aimes-tu ?

-De qui parles-tu ?

-Ne fais pas l'ignorant ! Cela se voit ! Répliqua Cyril. Tu es amoureux de Lana.

Hermann eut un sursaut avant de dire, avec un air sévère que Cyril ne lui connaissait pas :

-Et alors ! Tu me dis de rester avec elle tous les jours, chaque heure, et tu t'étonnes que je l'aime ! Oui, je suis tombé amoureux ! Mais je sais qu'elle t'aime ! Toi et toi seul ! Alors oublie !

-Je ne peux pas ! Elle est ta femme à présent !

-Ma femme qui porte ton enfant ! Et crois-moi c'est la plus belle preuve d'amour !

Cyril recula, piqué au vif, son cœur accélérant. Brusquement il attira Hermann vers lui et l'enlaça :

-Merci mon ami ! J'avais besoin de l'entendre. J'en avais besoin.

Etonné l'ancien soldat eut terriblement honte. Lana avait trompé Cyril à cause de lui. De son côté Lana ne pensait pas du tout à cela, à cette nuit qu'elle regrettait amèrement. Lionel lui donnait des nouvelles merveilleuses. Il expliquait avec calme mais rapidité la situation :

-Avec la guerre, et les réserves de troupes en Istanie, c'est le moment d'agir, il n'y a presque plus personne pour protéger Rebourg ou Macan. C'est le moment ?

-Tu veux qu'on prenne le pouvoir maintenant ?

-Oui ! Dans quelques mois maximums.

-Je suis enceinte. Tu le sais.

-Je m'occupe de tout. Tu auras juste à être là et à montrer que les Ronoriens nous soutiennent ! J'ai eu des nouvelles de Laurel. Il arrive du Monterre avec d'autres Ronoriens en fuite.

Etrangement Lana était heureuse du retour de Laurel. Il allait pouvoir prendre véritablement en charge le ronorisme voulut par Charles jusqu'à ce qu'elle mette au monde son enfant. Un enfant qu'elle voulait élever dans un monde meilleur. Un monde sans Elizabeth :

-Bien, dit Lana, dis moi quand il arrive, et nous ferons une réunion pour planifier notre révolte.

-Pas une révolte. Précisa Lionel. Une révolution.

Cyril et Hermann arrivèrent. Ils repartirent tous vers Rebourg. Lionel rentra chez lui. Il y trouva ses partisans qu'ils réfléchissaient sur comment renverser le pouvoir le plus rapidement possible. Lionel avait une idée en tête. Accusé les Ronoriens d'êtres des Révolutionnaires puis se hisser au pouvoir en tant que pacificateur et Président de l'Allénie. Refaire la constitution sera la première étape dès qu'il sera au pouvoir. Il se coucha heureux. En tout cas plus heureux qu'Hermann qui passa sa nuit de noce dans son appartement à côté de celui de Lana et Cyril. Il les entendait Ils se disputaient, encore, mais Hermann savait que lorsqu'ils se disputaient, ils se réconciliaient de la meilleure des manières :

-Tu le savais ? Qu'il t'aimait ?

-Oui ! Il me l'avait dit ! Cria Lana.

-Et tu as accepté qu'il t'épouse ! Tu aimes me faire du mal !! Hurla Cyril. Comment peux-tu me faire cela ?

-Arrête de te faire ta victime ! Tu es tellement jaloux ! Je l'ai épousé pour toi ! Voilà tout !

-Oui ! Je suis extrêmement jaloux ! Comprends-moi je t'ai tellement attendu que te perdre me ronge terriblement !

A cet instant précis Lana regrettait d'avoir été un instant avec Hermann. Cyril était le seul homme capable de l'aimer qu'importe ce qu'elle fasse. Hermann avait juste profité d'un instant de faiblesse immense. Elle se haïssait pour avoir trahir Cyril. Ce dernier se laissa tomber sur le lit :

-Je suis désolé. Souffla-t-il. Qu'allons-nous devenir ?

-Ce soir ? Juste des amants. Demain est un autre jour.

Elle sourit. Il l'embrassa. Et Hermann eut encore une fois raison : ils se réconcilièrent dans les meilleures conditions. 


Les Seigneurs de Fallaris   Tome 1: AllénieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant