Chapitre XIII

259 28 0
                                    

Ce matin-là, le troisième depuis son « incarcération », Cyril eut droit à son traditionnel petit déjeuner mauvais et sans goût. C'était lors des repas que le Prince éprouvait un manque certain. Le Palais était si loin, la délicieuse nourriture aussi, et sa pauvre mère qui le croyait en sécurité dans une base militaire. Il se languissait de sa vie tranquille et sereine que lui offrait sa condition de Prince non appelé à régner. C'était Lana qui lui apportait ses repas. Ils ne s'adressaient pas la parole, préférant s'ignoraient. Lana ne pensait pas éprouver une telle souffrance face à la situation. Il était là physiquement mais absent psychiquement. De plus elle vivait sans cesse dans la peur, sachant que un jour la garde impériale débarquerait tel un colosse avec à sa tête le grand Vladimir sur son cheval noir. Elle frissonnait dès que cette image se créait dans son esprit torturé par cette perspective. Peut-être suffirait-il de libérer Cyril sans le dire à personne et tout rentrerait dans l'ordre ? Lana n'en pouvait plus, la situation l'embrigadait dans une peine immense. De plus elle ignorait les plans de son père. Tout à coup un bruit sourd résonna à l'étage où se trouvait Cyril. Lana était seule dans la maison, possédant la clé de la chambre du Prince. Elle monta et frappa à la porte :

-Tout va bien ?

Elle colla son oreille à la porte mais n'entendit rien. Se souvenant de la santé fragile de Cyril, elle ouvrit la porte. A peine fut-elle dans la pièce que Cyril l'attrapa et plaça sa main sur la bouche de la jeune fille. Cela étouffa un cri de surprise. Il lui souffla de se taire. Il en avait marre d'être ici :

-Ecoutez-moi bien, murmura-t-il inquiet, je veux parler à votre père. Je veux le voir, vous comprenez ?

Elle fit « oui » de la tête. Il la lâcha, elle se retourna et lui mit une gifle :

-Vous ne pouviez pas demander sans me fait peur comme ça ! Plaida-t-elle.

Cyril passa une main sur sa joue rougit par le coup que Lana venait de lui donner :

-Je veux voir votre père ! Clama-t-il sans broncher.

-Pour quelle raison ? Demanda-t-elle cachant mal sa colère sous-jacente.

-Pour comprendre votre lutte. Je veux savoir qui sont les Ronoriens, on m'a appris à les haïr mais pas à les connaitre. Je veux faire ce que mon père n'a pas jugé bon de m'apprendre.

Elle ne pouvait que saluer cette initiative, néanmoins la présence du fils de l'Empereur chez les Ronoriens risquait de créer des conflits : qui croire ? La bonne volonté de Cyril ? Ou son rang ? Ses origines l'empêchaient-elles d'avoir des idées révolutionnaires ? Lana décida de mener Cyril chez son père. Ils quittèrent la vieille bâtisse et traversèrent la rue. Elle fit attention à vérifier que le Prince ne s'échappait pas. Elle sentait un danger peser sur elle et sur lui, comme une masse qui allait s'abattre bientôt. Ils arrivèrent devant un immeuble assez récent. Lana monta au dernier étage suivit de Cyril. Elle s'arrêta brusquement devant une grande porte en bois noire :

-Ici, dit-elle, c'est le lieu de réunion des Ronoriens depuis le retour de mon père d'exil après la Révolution. Ils sont là.

-Qui ? Demanda Cyril.

-Les dirigeants Ronoriens. Souffla-t-elle.

Elle poussa la poignée et pénétra dans la pièce. Les personnes discutaient activement tous attablés, cependant ils stoppèrent leurs discussions et se tournèrent brusquement vers Lana. Cyril reconnu le serveur du bar dans lequel il avait rencontré la jeune femme. Il était une dizaine, trois femmes et sept hommes tous ayant l'âge approximatif de Charles Ronor. Leurs regardes trahissaient la surprise et l'appréhension face à l'arrivée de Cyril. Ils ne savaient comment réagir. Evidemment qu'ils connaissaient son visage car sur le mur du fond trônait le portrait officiel de la famille impériale. Olga, Vladimir, Elizabeth et Cyril lissent le regard figé, certains debout, d'autres assis, vêtu de brillance, de bijoux, avec comme fond une pièce du palais Semaine. Il parait étrange que les Ronoriens aient un portrait de la famille assez imposant. C'était un vieux cliché, car Cyril devait avoir entre 10 et 11 ans, il ne s'en souvenait plus. Lana se pencha vers son père pour lui dire quelque chose à l'oreille alors que Cyril avançait vers le portrait de ses proches, ceux qu'il trahissait par sa présence en ce lieu. Tous les Ronoriens scrutaient l'attitude du jeune Cyril. Charles marmonna mécontent puis subitement il rua sur le Prince :

Les Seigneurs de Fallaris   Tome 1: AllénieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant