Chapitre 4 [1/2] ~ Dernier Recours

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     La fuite à travers la forêt de Xomythe fut pour Noà l'une des épreuves les plus difficiles de sa vie. Suite au changement mystérieux et la disparition de sa mère, il n'eut pas d'autre choix que de suivre Azérine, Töm et Aria, et s'enfuir en la laissant derrière lui.

     Malgré tout ce qu'il avait vécu depuis son réveil, Noà ne parvenait à se rendre compte de la situation : son chez-soi était détruit, sa maison réduite en poussière. Des créatures démoniaques les pourchassaient sans relâche. Son frère et sa mère avaient perdu la vie, ainsi que des centaines d'autres innocents.

     Noà voulait faire demi-tour. Il espérait se réveiller de ce cauchemar, retourner sur Xomythe et retrouver sa famille. Malheureusement, malgré les cris qui s'atténuaient à mesure qu'il s'éloignait du village, l'odeur de brûlé dégagé par l'air lui fit garder en mémoire l'effroyable réalité de ce cataclysme.

     Après une interminable course-poursuite, les grognements des monstres s'estompèrent enfin. Azérine, à bout de forces, s'arrêta la première. Elle glissa sur le sol de la forêt, imitée la seconde d'après par les trois élémentaires.

     L'adrénaline quitta le corps de Noà dès l'instant où il reprit son souffle. Les douleurs masquées par son effervescence réapparurent sans crier gare. Il fut assailli de nausées et, avant de pouvoir s'écarter du groupe, vomit tout ce qu'il avait dans l'estomac.

— Ça va aller... murmura Azérine en lui caressant le dos.

     Noà ne parvint à contenir ses larmes. Les images de la journée percutèrent son esprit tandis qu'il fermait les yeux pour essayer de les chasser. Les corps des enfants qui jonchaient les ruelles de Xomythe, celui de Luke, d'Aliona, d'Isach... il eut l'impression que son cœur allait imploser dans sa poitrine. Sa vie entière venait de basculer et il n'avait aucune idée de quoi faire désormais.

— Il faut essayer de manger quelque chose, indiqua Azérine en lui tendant une pomme sortie de sa sacoche en cuir. Azikru n'est qu'à quelques heures de marche, mais on ne tiendra pas si on n'a rien dans l'estomac.

     Elle se tourna vers ses enfants.

— Entendu ?

     Töm et Aria hochèrent la tête. À contrecœur, ils ouvrirent leur propre sac.

— Ta mère nous a sauvés la vie, Noà, déclara-t-elle, une main toujours posée sur son dos. Il ne faut surtout pas abandonner maintenant...

— J'aurais dû l'aider, se lamenta l'ustralois. Quand elle s'est jetée sur ces monstres, j'aurais dû...

— Elle s'était pris une flèche...

— Et alors ? On aurait pu s'échapper, se relayer pour la porter ! Quelqu'un sur Azikru aurait peut-être pu la soigner !

— Elle n'aurait jamais eu le temps, répliqua-t-elle avec douceur. Tu as vu la vitesse à laquelle le poison de ces monstres se propage une fois entré dans l'organisme. Elle n'aurait jamais tenu jusqu'Azikru...

     Azérine releva le menton de Noà le força à la regarder.

— Écoute-moi. Ta mère a accompli un acte héroïque. Elle savait qu'elle n'allait pas s'en sortir, mais elle a décidé d'utiliser le reste de son temps pour nous donner de l'avance. Il ne faut pas rendre son sacrifice inutile.

— Elle n'avait pas complètement été touchée, gémit-il. La flèche l'a juste effleurée, on aurait pu...

     Noà ne parvint à terminer sa phrase. Un incendie ravageait son cœur et consumait chaque parcelle de son corps. Une nouvelle larme sillonna sa joue, que la pèlerine essuya avant de le prendre dans ses bras.

Le Conte d'Ustral. Tome 1 ~ L'Oracle du TempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant