Chapitre 16

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« Mme Jones ! Ça fait plaisir de vous voir !

-Ah ! Anna, comment vas-tu ? demanda-t-elle en se retournant.

-Je vais très bien, mais, euh, sans vouloir vous vexer... qu'est-ce que vous faites ici ?

-En fait, en rangeant le linge de Raphaël, j'ai remarquée qu'il manquait beaucoup d'affaires dans son armoire alors je suis venue voir si vous comptiez emménager ensemble. »



Finalement j'ai peut-être vraiment mis trop d'affaires dans sa valise...



« Je suis désolée. Je l'ai aidé à préparer ses affaires, mais j'y suis peut-être allée un peu trop fort. Mais on va quand même pas rester planter là ! Entrez, je vais vous servir un café ! »



Et en joignant le geste à la parole, elle m'a suivi jusque dans la cuisine où nous avons discuté pendant dix bonnes minutes avant que je ne vois Raphaël arriver, par la fenêtre.



« Excusez-moi, je... dois faire quelque chose, lançais-je dans un sourire crispé en m'éclipsant de la pièce. »



Je crois que je ne suis jamais sortie aussi rapidement de chez moi et, apparemment, j'ai bien fait puisque quand j'ai ouvert la porte, Raphaël allait entrer. Je suis sortie et j'ai fermé la porte pour ne pas que sa mère nous entende.



« Tu peux pas rentrer !

-Hein ? »



Ça fait très intelligent comme réaction.



« Ta mère est dans la cuisine. Et ça m'étonnerai que tu veuilles répondre à des questions du genre "Pourquoi tu portes des lunettes teintées en plein hiver ?".

-Et je suis censé faire quoi en attendant ? Aller faire des courses ? dit-il ironiquement.

-T'as des amis non ? Propose leur un truc !

-Ils ont des choses à faire aujourd'hui.

-Ça va ! Ça va, j'ai compris. Ma mère va bientôt arriver ; quand elle sera là je sortirai et on ira traîner quelque part. T'as qu'à m'attendre au coin de la rue.

-Ça compte comme un rendez-vous ?

-Non. Ça compte comme un service que je rends à un abruti. En plus, on va pas vraiment traîner, on doit trouver une solution pour tes yeux.

-C'est pas faux. Bon, bin je vais t'attendre alors... »



Et il est parti en traînant des pieds. Quand à moi, je suis retournée à l'intérieur, rejoindre Mme Jones. Mais quand je suis arrivée son visage avait changé d'expression. Elle arborait maintenant un regard aussi triste que si elle venait de perdre la personne qui lui était le plus proche. Je me suis approchée lentement, ne sachant pas vraiment quoi faire.



« Euh... Madame Jones... Quelque chose ne va pas ?

-Il m'évite n'est-ce pas ? dit-elle en relevant la tête vers moi, puis devant mon regard incrédule, elle ajouta, Raphaël : il m'évite depuis la rentrée... Ce n'est peut-être pas très mature de te demander ça mais est-ce que tu crois que j'ai fais quelque chose de mal ? Est-ce qu'il me déteste maintenant ? Il n'a plus envie de passer du temps avec moi ?

-Ne dites pas n'importe quoi ! Vous êtes sa mère il ne peut pas vous détester, répondis-je brusquement en m'emportant. »



Oups. Je peux pas lui crier dessus, elle est plus vieille que moi, je suis censée la respecter. Mais ça n'a pas l'air de la déranger puisqu'elle ne me l'a pas fait remarquer.



« Tu ne le sais probablement pas mais je ne suis pas sa vraie mè...

-Je le sais, la coupais-je dans un souffle en me calmant. Il me l'a dit. Et je sais aussi que je ne suis pas en position pour vous dire ça mais... Raphaël vous considère vraiment comme sa mère et je trouve stupide que vous puissiez en douter. »



Oups j'ai recommencé.



« Euh je veux dire...

-Merci, me coupa-t-elle à son tour. »



Elle a l'air vraiment soulagé.



Elle n'a peut-être pas interpréter ce que j'ai dit comme un manque de respect. Tant mieux, je l'aime bien et je veux pas qu'elle pense que je suis une racaille ou un truc du genre.



Je me suis rassise en face d'elle et j'ai soufflé. On dirait que je vais devoir lui parler, au moins des grandes lignes, du problème de Raphaël.



« Madame Jones, vous avez raison. En ce moment Raphaël a un problème et il vous évite parce qu'il a peur de votre réaction si vous l'appreniez. Mais ne vous en faites pas ce n'est pas quelque chose de très grave, disons que c'est une sorte de cicatrice du décès de sa mère biologique.

-Je vois. Mais ce n'est pas dangereux au moins !

-Non, ne vous en faites pas et puis dans le pire des cas il n'est pas tout seul, je suis là pour l'aider. »



Ça y est, elle a retrouvée le sourire, elle a l'air rassurée.



J'ai beau dire que je le déteste, quand on m'entend parler comme ça, même moi j'ai du mal à croire que c'est vrai. Au final, on est devenus amis, bon certes c'est une amitié étrange puisqu'on passe notre temps à s'engueuler, mais on s'aide dès que l'un à besoin de l'autre. Mais maintenant que j'y pense je l'ai plus aidé que l'inverse.



J'étais toujours perdue dans mes pensées quand ma mère est entrée.



« Ah ! Annie je suis désolée, je suis un peu en retard.

-Ce n'est pas grave, je discutais avec Anna-Lisa, je ne me suis pas ennuyée.

-Bon, je vais vous laisser, les coupais-je.

-Tu ressors ? me demanda ma mère.

-Ouais je sors avec Raphaël, répondis-je en me dirigeant vers la porte »



Malheureusement, je n'avais pas bien mesuré la portée de mes mots et quand je l'ai réalisé, il était trop tard. Quand je me suis retournée pour rectifier ce que je venais de dire, elles avaient déjà les yeux qui brillent, les mains jointent devant elles et un grand sourire figé sur le visage.



J'ai l'impression d'être dans un dessin animé, comment est-ce qu'un humain peut exprimer autant de bonheur ? Non, c'est pas ça la vrai question, comment un humain peur "ressentir" autant de bonheur ? De toute façon maintenant qu'elles sont dans leur monde, je peux pas y faire grand chose alors je vais juste partir.



« On rentrera probablement tard, nous attend pas pour manger. »



Et je suis partie sans attendre de réponse, de peur de l'entendre, encore une fois, me raconter le futur fantastique qui m'attend avec Raphaël... En parlant de ce dernier, il m'a attendu, comme je lui avais demandé, au coin de la rue, ce qui est très étonnant en fait. Nous avons marché un peu en nous dirigeant vers le centre ville, où nous avons traîné un moment avant de nous affaler, avec toute la grâce d'un adolescent fatigué, à une table d'un café. Nous avons commandé des boissons et avons commencé à énumérer des théories et des, hypothétiques, solutions au "problème œil". Après deux heures de discussion animée, mais non aboutie et 20€ de choses à grignoter qu'il a payé ; parce que j'ai la gentillesse et l'amabilité de, non seulement, l'aider mais en plus l'héberger et le cacher de sa mère ; sans oublier que je me suis aussi occupée d'éviter la détérioration de sa relation avec cette dernière ; nous sommes rentrés chez moi où une délicieuse odeur de cuisine et étrangement de parfum venait nous taquiner les narines. Et, à ma grande surprise ce parfum provenait de ma mère, étrangement, bien habillée et maquillée et qui s'apprêtait à sortir.

Le jour où tout a basculé (En Réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant