Chapitre 15

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Raphaël a, à peine eu le temps d'entrer dans la chambre et de jeter un coup d'œil à Pénia, qu'elle avait déjà la bouche grande ouverte et les yeux exorbités. Je crois qu'elle ne s'y attendait pas, mais je suis trop fatiguée et j'ai trop envie de me doucher pour faire une remarque cassante. Malheureusement pour moi, Pénia vient de commencer un long monologue rempli de questions, ayant pour destinataire l'abruti qui se tient debout au milieu de la chambre, sans entendre un seul mot de ce qu'essaye de lui dire la déesse. Je crois que je ne vais pas pouvoir me doucher tout de suite. Voyant que si je n'intervenais pas, la discussion ne finirai jamais, j'ai pris les devants et j'ai interrompu Pénia pour lui résumer la situation.



« Alors ça y est ? Il s'est éveillé ? dit Pénia plus comme une affirmation détournée que comme une question.

-Comment ça ?

-Et bien, tu dois être au courant que lorsqu'un Dieu intervient dans la vie d'un humain pour l'empêcher de mourir, l'humain peut nous voir. Mais quand un Dieu redonne vie à un humain la contrepartie est toujours plus importante.

-Vous êtes en train de me dire qu'il est mort ? demandai-je perplexe. Mais il devrait être au courant non ?

-C'est un peu plus compliqué que ça. En fait Raphaël est un cas particulier, il est mort alors qu'il n'était pas encore né. Quand j'ai rencontré la mère de Raphaël, elle était enceinte. J'ai d'abord cru que j'étais liée à sa mère et pour éviter qu'elle ne souffre j'ai ressuscité son fils avant qu'elle ne sache qu'il était mort dans son ventre. Mais quand Raphaël est né j'ai compris que c'était lui que j'étais condamnée à surveiller. Mais la contrepartie de sa résurrection est ses yeux, le truc c'est qu'il était trop jeune pour que son pouvoir fonctionne correctement. Alors, ses yeux ont mis du temps a s'éveiller. Mais à partir d'aujourd'hui, ses capacités de visions vont s'améliorer jusqu'à ce qu'il soit capable de voir à travers des tissus, des vitres teintées... pas forcément des choses très impressionnantes mais des choses que même lui ne pouvait pas voir jusque là. »



Je sais pas vraiment quoi dire. J'ai du mal à analyser ce qu'elle vient de dire. Raphaël quand à lui n'a évidemment rien entendu de la conversation.



Bon bin, j'ai plus qu'à répéter.



Et voilà maintenant il a encore plus l'air d'un idiot. Mais bon je peux pas lui en vouloir, il vient d'apprendre qu'il est mort et que la déesse de la pauvreté l'a ressuscité. D'ailleurs comment elle a fait ?



« Hum Pénia ? Comment tu as fait pour le ressusciter ? Je veux dire, t'es une déesse d'accord mais Osiris est le Dieu de la mort et de la renaissance alors j'imagine comment il a fait, mais toi t'es la déesse de la pauvreté alors...

-Tu sais, j'ai pas toujours été la déesse de la pauvreté. Avant Raphaël j'étais la déesse de la fortune figure toi.

-Vous vous êtes ruinée pour lui sauver la vie ?

-J'avais pas vraiment le choix. »



Et encore une fois je dois expliquer ce que je viens d'apprendre à Raphaël. Nous avons discuté encore un peu avec Pénia, toujours sur le même schéma de conversation, je lui parle et j'explique à Raphaël, pour savoir si elle a une solution pour cacher ses yeux. Finalement nous nous sommes endormis sur la promesse de la déesse de faire des recherches cette nuit.



Le lendemain matin, après une bonne nuit de sommeil ; ce qui n'était pas arrivé depuis longtemps ; j'ai ouvert les yeux pour voir avec horreur l'heure affichée sur mon réveil : 7H30. Je suis en retard ! Je regarde le matelas par terre et remarque que Raphaël n'est pas là. Il aurait quand même pu me réveiller ! Sérieux, comment je vais faire pour être à l'heure ? Bon, de toute façon j'ai pas 36 mille solutions, il va falloir faire vite. J'ai un quart d'heure top chrono pour me préparer.



Et par je ne sais quel miracle, j'ai réussi à être prête à tant, et je suis arrivée au lycée au moment où ça a sonné. Mais évidemment, c'est ce jour-là que le professeur a décidé d'arriver en avance et j'ai dû courir jusqu'à ma salle de cours pour ne pas être en retard. Au final j'ai rattrapé tout le monde au moment où ils allaient entrer dans la salle. A l'heure de la récréation, alors que je parlais avec Manuella et Roxie (comme d'habitude quoi), on est passées à côté de Raphaël et ses amis. Et je l'ai frappé, gentiment, sur l'épaule.



« La prochaine fois, ça serait pas mal que t'éteignes pas le réveil. »



Il a ri mais a fini par acquiescer.



« Oh fait, joli pull. Je me demande où tu l'a eu, lança-t-il, une lueur amusée dans le regard. »



J'ai baissé les yeux pour voir mon pull.



Oups ! Il est pas à moi celui-là. J'ai dû prendre un des pulls à Raphaël en me précipitant ce matin.



Mais, comme je déteste perdre la face et encore plus si c'est face à lui, j'ai relevé les yeux.



« Ouais, je sais. Je l'ai emprunté à mon ami gay. Il s'éparpille un peu chez moi en ce moment.

-En tout cas il a bon goût.

-Mouais, mais je préfère dire que c'est moi qui le rend beau. »



Il secoua la tête, un sourire amusé étirant ses lèvres.



« Évidemment quand tu dis que tu "le" rends beau tu parles du pull, dit-il sarcastique.

-Évidemment ! Qu'est-ce que tu vas t'imaginer ?

-Moi ? Mais j'ai rien dit. »



Et voilà ! Ce sourire idiot, qu'est-ce qu'il m'énerve! Je jure que je vais l'étriper s'il arrête pas d'exhiber sa fossette dès qu'il en a l'occasion !



J'ai pris Manuella et Roxie par le bras sans rien ajouter. Il a le don de me taper sur les nerfs, c'est impressionnant. Quant à mes amies, elles étaient... comment dire... perdues? Visiblement elles n'avaient pas compris grand chose de notre conversation ; et, après vérification, les amis de Raphaël essayaient plus de comprendre, comment leur ami avait réussi à tenir une aussi longue conversation avec moi plutôt que le contenu de la dite conversation.



La journée s'est terminée sans plus de désagréments mais, au fond de moi, je ruminais encore ce qu'il s'était passé ce matin. Quand les filles ont eu fini d'analyser la conversation que j'avais eu avec Raphaël, elles m'avaient assassinée de questions. "Il a dormi chez toi?" "Il est passé te chercher?", "Vous sortez ensemble?", "T'as vraiment un ami gay? Tu nous le présentes?"... Suivi d'une cascade d'affirmations stupides et ridicules. "J'ai toujours voulu avoir un ami gay.", "Moi je le trouve génial ce pull."... Mais la pire et probablement la phrase la plus drôle et clichée qu'elle m'ont sortie a été : "Tu sais, on se connaît depuis longtemps, on est amies, on se dit tout, alors si l'une de nous a un mec ou un ami et qu'il a des copains qui sont beaux, même pas trop moches c'est suffisant, tu nous les présenterais c'est évident non? Tu nous cacherais quand même pas des informations aussi importantes?". Ça, c'est le genre de phrase qui sont tournées en question mais où t'as pas vraiment le choix pour répondre, alors tu dis "oui" bêtement, mais pas moi, non ! Moi ? J'ai explosé de rire et je suis partie sans leur répondre. Elles sont restées perplexes un moment puis elles m'ont suivies sans poser plus de questions. Je suis obligée d'admettre que dans le genre je-réagis-bizarrement, je suis très douée et elles ont l'habitude. Mais j'ai pas vraiment ri à cause de leur question. En fait, je riais parce que même si elles sont très intelligentes, très intuitives et qu'elles se font des films très rapidement, elles n'avaient pas compris que "mon ami gay" c'était Raphaël.



Mais dès que je suis rentrée chez moi, je me suis, comme qui dirait, tendue. Je savais que Raphaël n'allait pas tarder à arriver et, devant la maison, se trouvait sa mère. Ou autrement dit la seule personne qu'il doit à tout prix éviter !

Le jour où tout a basculé (En Réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant