Cinquante ans ça se fête

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L'anniversaire de mon père avait lieu le dimanche. Le 15 novembre pour être précis. Tout semblait parfait. Ma mère avait commandé un gâteau à la pâtisserie à cent mètres de chez nous. Non, vraiment tout avait été planifié pour faire de ce week-end un moment mémorable... tout sauf l'imprévisible, l'inimaginable. La prédiction du sorcier n'annonçait pas un évènement situé mille ans dans le future, ni dix ans, ni même plusieurs mois... et son exactitude était proprement effrayante. On raconte que le Vendredi 13 porte malheur... J'ai du mal à croire que cette date fut une coïncidence... presque un an après un autre tragique évènement similaire, dans des conditions similaires, perpétré par des êtres aux motivations similaires...Vous commencez à voir où je veux en venir?

Le magnétiseur avait raison. Ce vendredi-là ce ne fut pas des vampires qui tuèrent des hommes, ni des loups garous, pas même des sorciers, mais des hommes, leur semblables.

On se souvient tous de ce que l'on faisait lorsque l'on a appris certains évènements, ou durant la réalisation de ceux-ci. Pour ma part, je regardais le match amical France-Allemagne. Sur quelle chaine ça je ne m'en souviens plus.

Vers 21 heure 30 mon père entra avec fracas dans le salon.

-Benoît! Me lança-t-il, d'une voix légèrement chevrotante, zappe sur la 15, vite!

J'obtempérai devant l'empressement dont il faisait preuve. J'ignorais à ce moment-là que nous ne quitterions pas l'écran avant 2 heures du matin du lendemain. Je suivis l'actualité en directe. L'explosion au stade de France (que je n'avais pas entendu lorsque je regardais le match), les fusillades en terrasse de café et enfin le Bataclan. Mon père perdit un de ses collaborateur ce jour-là, même s'il ne l'appris que le lendemain.

Samedi, mon père resta prostré dans son bureau à côté de sa chambre à passer des coups de fils à travers toute la France. Ma mère elle passa sa journée devant la télévision à suivre les révélations, minces dans un premier temps il faut l'avouer.

Autant dire que le contexte n'était pas idéal pour fêter l'anniversaire de mon père.

Nous avions dressé la table. Nous reçûmes trois amis de mon père, une femme et deux hommes, tous des surnaturels collègues de mon père sauf un qui travaillait avec ma mère à la BSIS.

Ils arrivèrent vers 19 heure.

-Philipe! s'exclama Sarah, la femme d'Alain, l'homme d'une quarantaine d'années qui la suivait une bouteille de vin à la main.

Elle fit la bise à mon père avant de se diriger vers ma mère. Ses cheveux blonds coupés au carrée contrastaient avec sa peau bronzé.

-Je suis vraiment désolé pour votre fille.

Dorian, le dernier invité arriva quelques minutes après, c'était un loup-garou assez corpulent, trapus, plus âgé que mon père d'au moins cinq ans.

A peine furent-t-ils installés pour commencer l'apéro que la discussion vira sur leur collègue, partie injustement. D'après ce que je compris, c'était un loup-garou marié à une humaine. Avec sa femme, ils étaient allés au concert des Eagles of Death Metal au Bataclan. Il était au mauvais endroit au mauvais moment.

-Un brave type ce Christian, se désola Alain, qui de tous ceux présents avait été le plus proche du concerné, bosseur, toujours accueillant. Quand sa femme m'a appelé hier pour me dire qu'il y était... J'ai refusé d'y croire. Elle-même a failli y passer, il s'en est fallu de peu. Elle était allée acheter des clopes à un supermarché plus loin pendant l'entracte. Elle a entendu les coups de feu... C'était la panique, elle m'a raconté. Les gens qui couraient dans tous les sens... les bruit de coup de feu... le sang sur le sol... les cris... Ils ont mis un moment à comprendre ce qui se passait... Les CRS ont dû l'empêcher d'y retourner manu-militari...

Vin de luneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant