Un nouveau serveur

32 7 2
                                    


Je n'avais pas imaginé à quel point avoir un petit boulot à côté des cours était épuisant. Dès que je finissais le lycée, que ce soit à 15 heures ou à 18, le lundi ou le mercredi, je filais vers le Centre-ville. Pour avoir un alibi valable, pour qu'on me voie bien avoir un boulot de serveur comme tous mes proches, parents compris, le pensaient, en plus de nourrir M.Corman, ce qui me répugnait mais j'y reviendrais plus tard, je jouais vraiment les serveurs, plateau et stylo à la main, prêt à servir les clients.

Mon père n'avait pas tardé à approuver l'idée, il était même venu parler au Rougeard un jour alors que j'étais en cours pour établir des règles et parler des termes du contrat.

<<ce sont des gens formidables>> m'avait-il dit quand je suis rentré à la maison le soir.

C'est ainsi que malgré moi je me retrouvais à avoir un job. Je dis "malgré moi" car je vous rappelle qu'au début accepté ce job relevait plus de la nécessité que d'un choix personnel.

Heureusement, je n'avais pas à porter un de ces uniformes noir et blanc comme on peut en voir dans des grandes-ville. A 10 ans ma mère m'avait amené à Tour pour aller voir un orthodontiste (oui j'ai porté un appareil dentaire jusqu'à mes 13 ans et alors?). Après le rendez-vous ma mère m'avait proposé de boire à un café. L'homme qui nous avait servis était vêtu d'un uniforme en queue de pie franchement ridicule. Ma mère et moi en avions rigolé toute la journée. Encore aujourd'hui j'en ai les larmes aux yeux rien qu'à y repenser. Et puis le bar était quand même fréquenté par beaucoup d'élèves de mon lycée. D'ailleurs j'en ai vu beaucoup, certains qui étaient juste venus prendre un verre comme ils avaient coutumes de le faire et d'autre, pas mal d'amis ou de vagues connaissances, curieux de voir un de leur consort avoir un travail. Certes, beaucoup avait prévu de prendre un petit boulot pendant les vacances, mais après le BAC, pas avant. Je vis même quelques regards envieux, une petite récompense en plus de mes cinq euros de l'heure.

Un mercredi, j'eu l'agréable surprise de découvrir Victor ainsi que deux filles et trois garçons de ma classe, tous venus manger là où je travaillais.

-Bonjour, qu'est-ce qui vous ferait plaisir? fis-je d'un ton professionnel.

-On va tous prendre steak frite, commanda Victor, tu rajouteras trois coca, deux diabolo citron et un fraise.

Je sortie de ma poche mon carnet à noter les commandes, qu'au passage j'avais dû m'acheter avec mes propres économies... et qui finit par terre. Rageant contre moi-même, je me penchai pour le ramasser, moi qui voulais faire en quelque sorte bonne impression, c'était plus que loupé pour le coup.

-C'est pas trop dur? s'enquit une des filles.

-Parfois si, mais je m'en sors, marmonnais-je tandis que je notais les plats et boissons en essayant de ne pas faire d'erreur.

-N'empêche, chapeau Benoît! me complimenta Victor avec une moue d'approbation. Avoir un travail en plus des cours.

Les autres à la table hochèrent la tête.

-Sans être indiscret, comment as-tu faits pour trouver un job ici? continua-t-il.

J'avais réfléchi à une petite histoire à raconter qui m'évitait de passer pour un fils à papa, comme l'aurais fait le << c'était un ami de mon père>>. Il m'arrive d'être lassé d'être celui qui doit et devras toujours tout à son père.

-J'ai rendu un service aux Rougeard, leur voiture était en panne et j'ai pu la réparer.

Bon, je n'avais aucune compétence en mécanique mais eux l'ignorait et je passais l'espace d'une discussion pour un héros, ce qui n'était pas désagréable pour mon estime de moi.

Vin de luneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant