14 : Salomé

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Quinze jours et demi sont passés depuis que je me suis décidée à ne plus retourner dans ce bar. J'ai essayé de l'oublier, de ne plus penser à lui. Mais comment est-ce possible quand chaque moment de sommeil se transforme en histoire passionnelle avec lui.  Je ne contrôle plus mes pensées, et encore moins mes rêves. Je me tartine chaque jour le visage d'anti-cernes pour ne pas montrer à quel point je suis épuisée. Il faut vraiment que je trouve une solution avant de finir enterrée six pieds sous terre juste pour un mec qui n'en vaut même pas la peine. Il n'a pas essayé ni de me joindre, ni de me voir depuis ce fameux soir. Pourtant c'était si magique. Peut-être que lui n'a rien ressenti.
Zappe-le Salomé, zappe-le !
Je m'en veux tellement d'être tombée sous son charme. Je sens que je vais finir vieille fille. Seule ! Toute ma vie.
Mais non Salomé, tu n'as que 20 ans ! 20 ans ! Ce n'est rien. Tu as toute la vie devant toi !
Oui mais quand même. Ce n'est pas comme si j'avais eu de la chance dans la vie.
Me voilà entrain de soliloquer. Je deviens grave. Il faut que je me reprenne en main !

Le téléphone sonne :

- Allo Salomé ?

- Ah tiens, bonjour maman.

- Tu n'es pas morte ?

- Bah non tu le vois bien je te réponds.

- Merci pour les nouvelles des dernières semaines.

- Oh désolée maman, je suis overbookée en ce moment.

- Tu ne vas pas me dire que tu ne peux pas prendre cinq minutes pour m'appeler.

- Non tu as raison. Navrée, je ne recommencerai plus. Tu sais je suis fatiguée. Il faut que je m'adapte à ma nouvelle vie. Ça devrait vite aller mieux.

- Des soucis ?

- Non du tout ! Le salon tourne bien. Nous allons bientôt pouvoir embaucher du personnel. Les deux autres appartements pourront bientôt être en location. Les travaux débutent dans quinze jours.

- Et pourquoi je manque de nouvelle alors ? Aurais-tu rencontrer mon beau-fils ?

- Roh Maman !

- Tu ne veux pas raconter à ta mère ta vie.

- Euh,...

- Pardon ma puce, je ne voulais pas te gêner.

- Ce n'est pas ça. Non, je n'ai rencontré personne.

- D'accord. J'espère que tu me tiendras au courant avant ton mariage quand même.

- Maman,... Tu ne vas pas recommencer. Ma vie sentimentale c'est le néant. Je n'ai rien à te raconter. Et quand je trouverai quelqu'un, je déciderai le moment où je t'en parlerai.

- Je disais ça pour rire ma puce. Restes calme. Tu as vraiment l'air d'être sur les nerfs.

- Mais non ça va. Bon maman je te laisse. J'ai de la paperasse à remplir et à envoyer au plus vite.

- Tu nous manques à ton père et à moi.

- Vous aussi vous me manquez.

- Ton père t'embrasse.

- Bonne soirée à vous deux.

- Oublies pas de donner des nouvelles stp. Bonne soirée.

- Promis maman, bisous, ciao.

Non pas que j'oublie mes parents, mais je ne prends jamais le temps de les appeler. Je suis toujours débordée par le travail, la paperasse, ou encore mes pensées. Pourtant sans eux, je ne serais pas là aujourd'hui. Heureusement qu'ils nous ont aidées pour ce projet, sinon nous n'aurions jamais pu ouvrir notre salon.

Ma mère a tendance à être trop curieuse. Elle veut toujours tout savoir, surtout ce qui concerne ma vie privée. Elle ne sait pas un gramme de ma vie sentimentale. Alors elle cherche toujours le petit truc qui me fera craquer. Je n'aime pas ça parler de ma vie, de mes sentiments. Alors elle peut encore chercher. Tout reste enfoui en moi.

Après avoir fini ma paperasse je pars me coucher. J'envoie un message à Naëllia ;

" Coucou poulette. J'ai eu la mère au téléphone. Donne des nouvelles aux tiens avant de te prendre la morale. Bisous My Love "

Réponse immédiate de sa part ;

"Elles ont dû se donner le mot. J'ai eu le droit à une vraie leçon de morale. Bisous My Love"

"Je vais me coucher bonne nuit. Bisous My Love"

"Pareil ! Au fait, réfléchis pour samedi, j'aimerais sortir avec toi. Tiens moi au courant demain. Bisous My Love"

Qui dit sortir, dit Dream of The Night. Depuis qu'elle sort avec Mika elle est toujours fourrée là-bas. Moi je n'y suis pas retournée depuis ce fameux soir. J'ai besoin de sortir, de m'aérer un peu la tête. Je crois que je vais accepter de sortir, à la condition que nous allions autre part que dans ce bar.

"Ok pour ce week-end, mais je choisis le lieu. Bisous My Love"

"Ok, Bisous My Love"

Bisous My Love, un petit rituel que nous avons pour habitude de mettre en fin de message. Ça s'est fait tout naturellement. Les rares fois où nous ne l'écrivons pas, c'est en cas d'extrême urgence. Ou alors, quand nous sommes fâchées, ce qui pour le moment et j'espère que ça continuera comme ça, n'arrive qu'une fois tous les 36 du mois.

Je m'allonge dans mon lit, les écouteurs sur les oreilles. Ma chambre n'est pas très grande, juste assez pour dormir. De toute façon, je n'ai pas besoin de plus. Il y a des placards intégrés. Ça permet de mettre toute ma garde-robe dedans. Garde robe que je ferais mieux de trier. J'ai toujours détesté faire les essayages pour voir ce qui me va encore ou non. Du coup j'achète du nouveau, mais ne retire jamais les vieux trucs. J'ai des fringues qui doivent dater de l'antiquité. Bon, j'abuse peut-être, mais quand même. D'autres personnes pourraient en profiter, au lieu de ça, je les fais mourir dans mon placard.

Une dernière musique avant de m'endormir. Je ferme ma lampe de chevet après avoir enclenché ma chanson préférée, celle de London Grammar. Wasting my young years. Elle me rend triste à chaque fois que je l'écoute, mais qu'est-ce que je l'aime. Je ne peux pas m'empêcher de la mettre avant de m'endormir, c'est une sorte de rituel.
J'écoute chaque parole, je vis chaque mot, chaque note raisonne en moi, chaque son me frissonne.
Des larmes coulent le long de mes joues.
Je retire mes écouteurs, plonge la tête dans mon oreiller, et pour une fois, je m'endors sans difficulté.

PassionnellementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant