Ethan a dans l'idée de rejouer la scène de notre rencontre. Il a tenu maintes et maintes fois à me faire comprendre le déroulement du rôle que chacun devait jouer. Je prends donc place devant cette fameuse machine à café. À ce qu'il paraît, c'est là que tout a commencé.
Tout est calme autour de moi, les employés ont laissé place au silence. Un gobelet vide à la main simulant un café, j'endosse mon rôle d'actrice en partant dans une hâte excessive au travers du couloir, quant au bout du chemin, ses deux mains tendues s'agrippent à mes épaules. Mon corps trésaille du brusque contact qu'il m'impose, toutefois, je n'en saisis le sens. Quel est l'intérêt de me tenir à bout de bras ? De créer une collision déjà conter cinq minutes auparavant ?
Mon regard remonte s'accrocher à celui d'Ethan, un sourire joyeux fend ses lèvres d'avoir accompli une bonne chose. Seulement, devant mon air hébété, la déception lui sort par tous les pores de la peau. Il me fait mal au cœur.
— Tu ne te souviens de rien ?
— De quoi aurais-je dû me rappeler ?
— De la plus belle chose qui nous soit arrivée, mais ce n'est pas grave. J'aurais dû me douter que ça n'allait pas fonctionner.
Le désespoir détruit ses ambitions. Il met à néant tout son monde. Aucun remède contre ce criminel si ce n'est que je retrouve la mémoire. Cependant, la route est longue, douteuse, perdant les batailles les unes après les autres.
Comment ne pas sombrer lorsque l'on va d'échec en échec ?
— On peut... On peut, peut-être trouver autre cho...
— C'était notre dernière issue. Il n'y a plus rien à faire mis à part laisser le temps nous séparer.
Il tourne les talons, l'âme défoutue, jetant de désespérance son dossier à la poubelle.
Je presse le pas pour rattraper Ethan, récupérant au passage le dossier de quelques feuilles éparpillées sur un tas de déchets. Or, quand mes doigts tournent les pages pour peut-être y trouver une réponse, mon cœur se fêle, mes pas s'arrêtent. Je tiens entre les mains, le contenu de mon corps expérimenté.
Mon regard affolé parcourt les actions menées, les dates, les jours minutieusement étalés sur ces bouts de papier retraçant la vie d'une amnésique. Abasourdie, ma voix chuchote en consultant les lignes écrites.
— Tu m'as prise pour un cobaye... ? Ethan Niels, tu m'as prise pour un cobaye ?
Je n'arrive à freiner les battements affolés de mon cœur ni les cris stridents qui sortent de ma gorge enragée.
— Attends deux minutes ! Arrête-toi ! Arrête-toi, je te dis !
Ma main tremblante de rage tire tant sur le tissu de son veston que mes ongles en griffent chacune des fibres hors de prix.
— Pourquoi avoir recueilli toutes ces renseignements sur moi et la progression de mon état ?
— C'était pour contribuer à ta guérison !
Je recherche la source de ma question en parcourant d'une grande rapidité le tas de paperasse déclassé, puis lui colle sous le nez la liste des noms détaillés de breuvages médicamenteux.
— Et ça ? Qu'est-ce que c'est que ces séries de produits pharmaceutiques ? Tu m'as droguée ?
— Ce sont des préparations qui boostent la mémoire.
— Et tu m'injectes ces merdes dans mon propre corps sans m'en parler ?
— Ce sont des plantes naturelles ! Jamais, je n'aurai mis ta santé en péril, tu devrais le savoir !
Non, je ne sais pas, justement.
— Alors, pourquoi ce dossier avec toutes ces données ?
— Pour ne pas refaire les mêmes erreurs ! Pour enfin espérer qu'une de ces solutions puisse me venir en aide, cependant, comme tu as pu le constater par toi-même, chacune d'elles s'est conclue par un échec ! Je suis un échec, une véritable erreur ! Chaque tentative est une réelle catastrophe qui t'éloigne de moi un peu plus de jour en jour, et ce comportement, je ne le supporte pas !
Sa voix essoufflée trahit sa peur. C'est un cri loyal, ivre de haine contre cette mémoire absente, contre cette mémoire vide, sans souvenirs.
— Je ne sais plus quoi faire, Lysa...
— On ne peut pas baisser les bras, si ?
— Jamais, je n'abdiquerai, tu m'entends ? On va persister pour la liberté, se soumettre pour tout donner.
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L'envie d'aimer - Tome 2
RomanceL'amour ne suffit parfois pas pour combattre la misère. Quelquefois implacable et hors la loi, elle peut être tragique, atroce, mais très souvent, quand deux êtres s'aiment, elle reste spirituelle.