chapitre 6

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Chapitre 6

On n'entendait que les cliquetis des couverts, ce matin. Adrien babillait tranquillement, amenant un sourire fugace aux deux adultes qui étaient assis de part et d'autre de la grande table. Mais une tension sous-jacente imprégnait l'air. Les deux hommes évitaient de se regarder et étaient heureux d'avoir comme distraction le jeune garçon épanoui qui décrivait ses découvertes, au détour de ses pérégrinations.

Fritz referma la porte et traversa le vestibule en marbre pour remettre le journal à un autre valet posté en bas de l'escalier d'honneur.

- Le Times de Sa Seigneurie, annonça-t-il.

Le domestique fila en direction de la salle à manger où le duc et ses invités, achevaient leur petit déjeuner.

- Le journal, votre Grâce, murmura timidement le valet en déposant le journal à côté de la tasse de café.

Il le débarrassa de son assiette et le Duc s'empara du journal sans mot dire.

Tout cela se déroulait avec la minutie et la conformité d'un ballet habilement orchestré. Le Duc De Fiennes était un maître exigeant, mais bon. Et la vie à Elton Hall ou à son hôtel londonien était réglée comme une horloge.

En revanche, Christopher ne pouvait qu'admettre un fait, qui avait pris une part obsédante depuis quelques temps. Ces derniers jours, après leur mémorable rencontre lors de cette nuit, avaient laissé des traces invisibles. Une tension sous-jacente, orageuse, imprégnait l'atmosphère dès lors que les deux hommes se trouvaient en présence l'un de l'autre. Aussi, Sébastian avait redoublé d'ardeur pour éviter de rencontrer son beau-frère, se heurtant au silence un brin moqueur de ce dernier. Il ne sortait plus de sa chambre à l'orée de la nuit, ne souhaitant pas croiser ce dernier au détour d'un couloir.

Christopher jetait des coups d'œil à son beau-frère, tout en affectant de lire le journal. Le jeune homme avait l'air perdu dans ses pensées et seul son fils le sortait de celles-ci. Il réalisa qu'il s'était laisser emporter par ses émotions et d'autres instincts, lors de leur dernier accrochage, au lieu de l'amadouer, il l'avait mis en colère et lui avait fait peur. Ce qui était un flagrant manque de présence d'esprit de sa part. Mais, il devait reconnaitre en son for intérieur, que l'homme qui lui faisait face à présent ne ressemblait en rien à celui qu'il avait rencontré quelques années auparavant. Plongé dans ses pensées, il sursauta quand il entendit la voix rauque de Sébastian. Intrigué, il reposa le Times et se pencha, écoutant attentivement ce que son beau-frère allait lui annoncer.

- Votre Grace, je souhaitais vous remercier pour votre accueil tellement chaleureux (levant un sourcil de manière sarcastique), mais les bonnes choses ont une fin. J'ai consulté mon avoué et il s'avère qu'il a trouvé un charmant pied-à-terre en plein cœur de Londres, à quelques pas de Mayfair. Je souhaite que mon fils puisse avoir l'opportunité de connaitre la capitale. De plus, mes affaires m'obligent à prendre congé.

- Vos affaires ? Vous nous quittez ?

- Effectivement, répondit Sébastian d'un ton résolu. Je vous remercie pour votre hospitalité, mais vous comprenez que nous ne pouvons pas en abuser. De plus, je souhaiterais qu'Adrien ait l'occasion de rencontrer la branche paternelle de sa famille.

- Vous me mettez en quelque sorte devant le fait accompli, rétorqua Christopher d'un ton narquois. Ce qui somme toute semble être une habitude chez vous. Soit ! Je prends note de l'information. Quand souhaitez-vous partir ?

- On s'en va, papa ? Demanda Adrien de sa voix fluette.

Le père se retourna vers son fils.

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