Chapitre 3 ~

5.3K 235 50
                                    

Moi : Ça... Aussi... Tu le fais avec tes potes après le match ? (Je souris).

Il n'avait pas l'air d'avoir saisi ma blague. "Débile ? Pourquoi tu as gaché ce moment !". Il détourna les yeux, et fixa le sol, enleva ses bras qui s'accoudeaient sur mes épaules et retira ses mains posées sur ma nuque.

Antoine : Peut-être bien.

Il était censé prononcer ses paroles ironiquement, mais tout ce qui sortit de sa bouche était un ton froid, distrait, vide.
"Je n'aurais jamais du lui faire cette blague pourrie..".

Il se leva, prit sa serviette, l'enroula autour de sa taille, et quitta la douche en prenant soin de laisser la porte grande ouverte. "Quel connard."

Je prit ma douche vite fait, mais sincèrement, tout ce que je faisais était me frotter les cheveux avec le même shampoing que j'avais mis il y'avait trente minutes en repensant à ce qui venait de se passer.

"Quel connard". C'est tout ce que je me répétais en essayant de me remémorer le chemin pour rentrer. "Quel connard !". Moi ? D'avoir fait cette foutue blague à deux balles ? Ou lui ? De m'avoir laissé seul dans un stade en plein milieu du desert.

Après quinze minutes de marche, mais surtout de tournage en rond, je vis au loin la maison d'Antoine que j'avais appris à reconnaître. C'était celle qui marquait la fin du village, un pas si grand village, avec vingt ou trente habitants, tous venus passer leurs vacances, et certains, comme Antoine, qui y travaillent.

20h34, affichait ma montre, le soleil avait presque disparu de l'horizon et le ciel était vêtu de sa cape violette étoilée de la nuit. Je montai directement à ma chambre, pas envie de parler, pas envie de manger, non, juste envie de dormir et chasser son image qui revenait en boucle hanter mon esprit.

BAM.

Un bruit sourd interrompit mon sommeil, un bruit volent dont j'en déduist directement l'origine : La fenêtre.
J'ouvris la fenêtre d'un geste brusque, et je le vis... Antoine... Là, debout, le regard qui se balançait à sa droite et à sa gauche. Puis, le regard, qui croisa le mien.

Moi : Antoine ? Qu'est ce que tu fais à cet heure, t'es malade ? (Je murmure).

Antoine : Allez ! Descend ! Je veux juste te parler... Et puis m'excuser pour aujourd'hui... Enfin, pour hier...

Il avait la voix qui tremblait, d'ailleurs tout son corps tremblait, il bougeait beaucoup.

Moi : J'arrive, attend une minute !

J'ouvris ma porte méticuleusement pour ne pas qu'elle grince, puis descendit les escaliers, un par un, dans l'ombre, en prenant soin de minimiser les bruits de mes pas. Puis j'attéris enfin devant la porte d'entrée, après ce qui m'avait semblé être le parcours du combattant.

Je sortis dehors, il regardait derrière, vers la forêt, alors il sursauta quand je lui mis la main sur l'épaule.
Il se retourna.

Moi : Quoi ? Ne me dis pas que.... Oh ? Tu bois toi ? (Dis-je perplexe).

Antoine : Juste un verre... De temps en temps... Quand je me sens triste...

Un verre ? J'en doute ! Je le tirai un peu loin de la lumière des lampadaires qui semblait lui aveugler les yeux, et nous nous asseyâmes sur un banc à l'entrée du bois.

Moi : Et je peux savoir... Pourquoi tu es triste ?

Il ne daignait même pas me regarder. Ses yeux étaient éteints, perdus quelque part sur le sol.

Antoine : Je sais pas... Tu ne te sens pas triste, toi, des fois, quand tu es seul la nuit, à fixer ton plafond aussi sombre que tes pensées ?

Je souris. Avant de lacher un rire instinctif, hystérique.

Moi : Et tu me réveilles à trois heures du matin pour me dire ça ?

Antoine : Tu sais... Euh... Akram... On se connait depuis à peine deux jours... Mais... Euh... Je t'apprécie vraiment... Enfin... Tu vois, je vois en toi le frère que j'ai jamais eu... (Je souris). Tu es tellement simple, et rassurant...

Moi : Humm... Toujours pas assez pour justifier le fait que tu jettes des pierres à ma fenêtre à trois...

Il sourit et m'interromps.

Antoine : Tu parles trop, Akram... Je l'ai lu dans tes yeux la première fois qu'on s'est vu !

Moi : Tu as l'air d'avoir de l'expérience... Lire dans les yeux des gens... Tu liras dans les miens là maintenant, que j'ai juste une putain d'envie d'aller me recoucher.

Antoine : Tu mens.

Je mentais.

Antoine : Ça te fait plaisir de me voir. À moitié ivre, tu attendais toujours ça, non ?

Oui.

Moi : Comment pourrais-je, attendre ça depuis toujours, alors que je te connais depuis avant hier ?

Je me lève. Mais il me tient la main.

Antoine : Tu ne veux pas rester un peu ? Parler de nos vies ? Discuter ?

Moi : Je n'ai rien d'intéressant à raconter.

Antoine : Moi si... Assois toi.

Je m'assoyeai. Je n'arrivais pas à croiser ses yeux bleus qui devenaient noirs dans l'obscurité, alors je me contentais de guetter le village endormi au loin.

Antoine : Au faite... Je n'ai rien d'intéressant à raconter... Non plus...

Moi : Voilà, problème reglé, j'y vais maintenant ! (Dis-je avec un faux sourire.).

Antoine : Quoi ? Tu boudes ?

Bien sûr que je boude, débile.
Il me prit dans ses bras. Ce n'était pas une accolade normale, non, il s'affala sur moi, comme s'il ne tenait plus assis.
Il se resaisit.

Antoine : Je fais souvent, des trucs que je regrette, toujours. Aujourd'hui... Enfin hier... La douche...

Moi : Quel douche ?

Antoine : Oui héhé... (Sourire géné). Tu le fais bien, mais... On doit en parler... Tu aimes les mecs ?

Moi : Non. Ils me dégoutent.

Je n'aurais sûrement pas du dire ça, mais ma dignité passait avant ses doux yeux bleus, son beau sourire.

Antoine : Moi non plus.

Alors pourquoi tu m'as demandé de te toucher le torse connard ?

Antoine : J'étais... Désespéré, d'ailleurs, je le suis toujours. (Sourire triste, désolé). Je repense à elle des fois, je repensais à elle en te touchant... Mais je n'y arrivais pas ! Je n'arrivais pas à t'imaginer à sa place, tout ce que je ressentais, c'était des mains d'homme qui ne me procu...

"Arrête Antoine, s'il te plait arrête."
Je l'interrompt.

Moi : Tu sais que j'en ai quelque chose à foutre de ce que tu as ressenti ? Tu me réveilles à trois heures du matin en me racontant ta merde, tu crois me rassurer, où te rassurer toi même dans ta pauvre fierté d'hétéro ? T'es un gamin foutu en l'air, Antoine.

Mes dernières paroles, raisonnaient dans le vide, dans le vide de la forêt, dans le bon du village, dans le vide de mes pensées, comme un écho qui se repetait, infiniment.
"T'es un gamin foutu en l'air, Antoine". Ses yeux devinrent pensifs, toujours aussi noirs en l'absence de lumière, mais toujours aussi beaux et toujours aussi craquants que le premier jour où on s'est vu.

Je me levai, et partit en direction de ma maison, le laissant derrière.

Alors c'est comme ça qu'on tombe amoureux ? Au milieu de la nuit, au milieu de nul part, d'une personne moitié ivre, à l'esprit éteint ?

T'es un gamin foutu en l'air, Antoine. Mais je suis gay, et tu es hétéro.

Straight Love. [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant