Chapitre 15 #

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Il y'eut un silence, une pause. Antoine avait l'air tellement triste, pas ce genre de petite tristesse non, il sentait la dépression, le cafard, le désespoir.

Il faisait froid. Beaucoup trop froid, mais la chaleur de son corps bloquant le mien rendait mes oreilles brulantes.

Antoine : Je vais te le dire, je vais te le dire Akram.

Il pleurait. Il pleurait à chaudes larmes, ses mains quittèrent mon visage pour se poser contre la portière derrière moi, il cacha son visage avec son autre main.

Akram : Antoine... Tu... Pourquoi tu pleures ?

Il ressortit une autre clope, l'alluma, puis avança jusqu'au troittoir pour s'y assoir.

Akram : Arrête de fumer s'il te plait ! Tu n'as pas besoin de ça !

Il sourit. Et me regarda à travers ses yeux tristement larmoyants.

Antoine : Je suis pas le genre de mec à qui on fait confiance, Akram, fuis pendant qu'il est encore temps. Ce village, c'est de la merde, y'a que des gens pourris.

Akram : Arrête Antoine, arrête de pleurer s'il te plait. Des villages pourris y'en a aux quatres coins du monde, et puis, je sais moi, tu n'es pas si mauvais que ça.

Antoine : Harry avait raison. Je suis un loup. Pierre, Serge, Safae et tous ces autres joueurs, tu t'es jamais demandé comment on faisait pour vivre sans bosser ?

Il ne me regardait plus, m'épargnant ainsi ses regards pleins de haine et de dégout.

Il murmura quelque chose. Comme un secret dans le silence de la forêt.

Antoine : On vend de la drogue. On est des vendeurs de drogue Akram.

Il le répéta quatre ou cinq fois, comme s'il tentait de s'en convaincre.

Ça expliquait tout, mais je n'avais pas besoin d'explications. Je ne savais même pas quoi penser, j'en avais marre de penser à vrai dire. Tout ça était trop pour moi.

Je souris.

Akram : C'est un métier comme un autre.

Non, ce n'était pas un métier comme un autre. C'était le métier qui m'avait fait perdre deux de mes amis et surement le troisième aussi.

Antoine : Non, y'a autre chose que tu dois savoir. Safae et Serge, on s'était mis d'accord pour qu'un de nous te séduise, pour te recruter car on avait besoin de personnes comme toi, mineur, bouille d'ange, insoupçonnable.

Il se leva. Et affronta mes yeux.

Antoine : Tout ça, cette douche et ces merdes, c'était juste pour te recruter imbécile, je ne t'aime pas, tu es vraiment un connard naïf Akram, regarde toi putain ! En trois jours tu étais prêt à me baiser les pieds. T'es qu'un débile Akram, un putain de gosse, même pas capable de sauver tes deux putains de potes.

Je feignais ne rien avoir entendu. Mais chaque mot qu'il prononçait, chaque lettre qui sortait de sa bouche était comme une dague qui s'enfonçait dans mon cœur. Alors je restais debout, dans le vide, essayant de fuir cette réalité pourrie.

Il pris mes bras de ses mains et me secoua.

Antoine : Répond putain. Dis moi quelque chose ! Reste pas comme ça ! Prend cette voiture et casse toi, casse toi Akram pendant qu'il est encore temps.

Je pleurais. J'avais essayé de ne pas le faire mais ses mots étaient tellement durs, ses yeux tellement haineux. Ce n'était pas le Antoine que je conaissais. Mais qu'est ce que je connais moi ? C'était surement là son vrai visage.

Mais je pleurais et j'étais incapable de bouger.

Je ne lui en voulais même pas.

Putain mais déteste le, frappe le, défonce le !

Je voulais fermer les yeux. Je n'avais plus la force, plus la force d'exister.

Il remit sa clope dans sa bouche mordue, et se rassit à ce trottoir aussi sale que ses vêtements.

Il regardait le sol.

Akram : Pourquoi tu dis ça Antoine ? C'est pas vrai tout ça n'est ce pas ? C'est pour me faire oublier mes potes ?

Je m'étais surpris moi même. Je n'aurais jamais pensé pouvoir dire ça.

Antoine : Putain mais t'es débile ou quoi ? Toi, tes amis, j'en ai rien à foutre, je m'en bats les couilles mec. Arrête de faire ta tafiole, allez casse toi !

Je souris. Ça ne lui allait pas, les mots qu'ils prononçaient on aurait dit qu'on les lui avait appris. Ça sonnait drôle dans sa bouche, ironique.

Antoine : Mais bordel arrête de sourire... Tu piges pas quoi dans tout ça ? T'as vraiment cru que j'allais m'intéresser à quelqu'un comme toi, mais bordel tu me fais rire.

Il riait. Mais il ne me regardait pas dans les yeux. Il riait mais il ne me regardait pas dans les yeux. J'y aurais presque cru, mais j'avais besoin de voir ses yeux qui virent d'une couleur à l'autre pour le croire.

Il regardait mes chaussures.

Antoine : Pars.

Il semblait épuisé, triste puis agacé. Il l'avait craché comme la dernière goutte d'un poison qu'il gardait au fond de lui et qui le rongeait de l'intérieur.

Je ne répondis même pas. Au fait, je n'avais pas grand chose à dire. Il avait surement raison mais je voulais lui prouver qu'il avait tort.

J'obéïs, montai dans la voiture, et la démarrai.

Je ne savais pas où aller, je ne pensais même pas à la route, je me contentais d'aller tout droit, mais Antoine ?

Antoine ? Tout ça, c'était un mensonge ? Une blague ? C'était plutôt réussi. Mais putain j'arrivais même pas à y croire.

Deux amis morts. Un putain d'acteur. Ça devait être un rêve, je devais rêver, bordel. Mais je l'aurais jamais cru, Antoine, Antoine sourire, Antoine yeux bleus puis peut-être gris, Antoine blagues pourries.

Il était tard, trop tard, le soleil se levait peut-être déja, j'étais fatigué, mais pas assez pour dormir.

Je vis le village au loin, et je décidai de continuer à pied, pour me remettre les idées en place mais surtout pour assumer la décision que je venais de prendre dans ma tête.

Je toquai chez Antoine. Au début calmement, puis violemment.

Safae arriva après quelques minutes pour ouvrir. Elle portait un peignoir, cheveux mal coiffés, non maquillée, dégueulasse.

Safae : Toi ? Qu'est ce tu viens me péter les ovaires à cette heure ?

Je souris. La regarder en sale état me procurait une jouissance intérieure. Moi au moins, je n'avais pas besoin de maquillage pour paraître potable.

Mais je n'étais pas mieux qu'elle, les larmes, la fatigue, la peur et la décéption devaient surement me rendre tout aussi dégueulasse qu'elle.

Akram : J'accepte.

Elle semblait pas comprendre.

Safae : Bon, j'ai pas le temps pour tes énigmes de merde, je veux dormir moi !

Débile.

Akram : J'accepte de bosser avec vous. Je suis prêt à le faire.

Elle sourit.

Straight Love. [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant