Teenage Girl

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Lucy Quinzel

Ma mère me hurlait encore que j'allais être en retard pour les cours. Je lui répondis que j'arrivais tout en m'habillant précipitamment. Je me déplaçai à cloche-pied le temps de mettre ma paire de chaussettes jusqu'à mon téléphone pour le récupérer et le mettre dans la poche de mon jeans bleu et délavé. Une fois le mobile sur moi, je sortis de ma chambre et pris la collation de la matinée qu'elle avait emballé dans un sachet cartonné. Je pris mon sac de cours déjà prêt en allant vers le hall d'entrée et saluai ma mère en criant. 

Je sortis de chez moi et vis mon bus stopper devant mon arrête. Je me mis à courir pour atteindre l'immense véhicule jaune qui me mène au lycée depuis le début de l'année. Je m'installai au fond, comme d'habitude et écoutai de la musique. Une fois à destination, je rejoignis les quelques connaissances qui m'accompagnent depuis la rentrée des vacances d'Été. Je n'aimais pas les qualifier d'amis. Je ne me sentais pas proche d'elles, même si je papotais et riais beaucoup avec elles. Jamais elles ne m'avaient vu en dehors des cours, elles n'étaient même pas à mes cours de danse.

J'entrai avec les deux garçons et la fille dans le bâtiment principal de mon lycée. On traîna dans les couloirs le temps que les cours commencent. Les prochaines vacances étaient dans une semaine. J'allais pouvoir me reposer et revoir Jayden en dehors de mes cours de danse. Ce garçon était un ami d'enfance que j'avais perdu de vue. Depuis l'année dernière, il vivait à quelques pâtés de maisons de chez moi, mais il n'allait pas dans le même lycée que moi. J'avais hâte de finir les cours aujourd'hui pour rejoindre mon ami en danse. Mes compagnons de l'année me sortirent de mes rêveries.

- Tu es bien songeuse, Lucy, remarqua Ted.

- Moi, je dis qu'elle pense à son chéri, taquina Mary.

- Je n'ai pas de chéri, soupirai-je en levant les yeux au ciel.

- Même pas Jayden, interrogea William.

Je lâchai un énième soupir en assassinant du regard mon "ami". J'étais vraiment proche de mon partenaire de danse, au point de le considérer comme un frère, mais ça s'arrêtait là. L'amour est la chose qui m'intéressait le moins, et je n'avais pas envie de vivre une petite histoire avec lui.

- Jayden est comme un frère pour moi, rappelai-je.

- Comme les Lannister? blagua Mary en faisant référence à la série Trônes.

- Ni comme les Lannister, ni en aucun couple incestueux de quelconque univers, bougonnai-je.

- Eh! Détends-toi, Lucy, intervint Ted.

- C'est vrai Lulu, pourquoi tu es contrariée?

Oh non... Pas maintenant... Je fermai les yeux et me calmai en respirant à fond puis en vidant l'air de mes poumons avant de m'excuser auprès de mes compagnons. Ils oublièrent vite mon irritabilité en voyant des élèves venant d'une autre classe se joindre à notre table. Ils étaient quelques amis de mes connaissances. Nous mangions notre déjeuner dans la bonne humeur mais aussi avec les ragots qu'ils échangeaient. J'étais un peu à l'écart des conversations, j'étais comme une spectatrice, et cela me fit rendre compte que j'étais une fille assez différente. Je n'étais pas friande de potins, je n'adorais pas parler garçons ou filles, je n'écoutais pas non plus des musiques actuelles comme ceux et celles qui m'entouraient.

Pendant que les autres discutaient autour de moi, je les regardai. Je remarquai que je n'étais pas la seule à être à l'écart de la discussion. Il y avait à la table un garçon cheveux châtains qui faisait la même chose que moi, mais il n'osait pas affronter mon regard. Je dois probablement l'intimider, bien que je n'ai rien d'impressionnant. Il me semble qu'il s'appelait Peter. Il avait l'air d'être une sorte de geek, un passionné de jeux vidéos, quelque chose dans le genre.

N'allez surtout pas penser que je finirai avec lui. Je ne suis pas ce genre de fille qui finit avec le mec timide ou le bad boy de l'école. Considérez-moi comme une extra-terrestre. Et ne pensez pas que ce sera la même chose pour Jayden. D'ailleurs, il savait parfaitement bien que ces choses-là ne m'intéressaient pas, comme devrait le comprendre les autres. Mais comment échapper à tout ça avec tous ces films et toutes ces séries à l'eau de rose qui vendent tout ces clichés?

Le déjeuner se termina, et nous partîmes tous en cours après avoir vidé et rangé les plateaux. Mary me fit évidemment remarquer que Peter n'avait pas arrêté de m'éviter du regard durant la pause déjeuner et me demanda s'il y avait quelque chose entre lui et moi.

- Il n'y a rien du tout, soupirai-je. S'il t'intéresse, tu peux tenter ta chance, plaisantai-je avec un petit sourire pour sembler convaincante.

Nous ne pûmes poursuivre la conversation, nous rentrions en cours. Cette après-midi sembla durer une éternité, mais plus l'heure de la fin de la journée arrivait, plus j'étais impatiente de prendre le bus et d'aller au cours de danse. Mais soudain, je réalisai que nous n'étions pas le bon jour. Je faillis jurer durant l'interrogation de maths. Le cours de danse n'était que demain. Je soupirais suite à cette petite déception. J'aimais tellement danser que j'avais du mal à avoir la notion du temps, je suis toujours pressée d'être le Mercredi et le Vendredi. Les cours terminés, je sortis tranquillement du lycée et me dirigeai vers l'arrêt de bus. Je pris mes écouteurs et lançai ma playlist. Le véhicule jaune s'arrêta et pris les passagers qui l'attendaient. Je m'installais au fond et oubliais que j'existais.

Le bus s'arrêta à proximité de la maison. Je descendis immédiatement en n'oubliant pas de souhaiter une bonne fin de journée à Gus, le chauffeur du bus. Je fis entrer la clé dans la serrure de la maison et alla à l'intérieur. Je me déchaussai après avoir posé mon sac à terre puis je filai dans la cuisine pour prendre des barres de céréales et un bidon de lait. J'allais littéralement me goinfrer devant la télévision avant de faire la corvée de tous les élèves: les devoirs. Je regardai ces stupides téléfilms de l'après-midi en mangeant, ou devrais-je dire en engloutissant, chacune des barres de céréales chocolatées. Une fois la collation terminée, je jetai les emballages à la poubelle et rangeai le bidon de lait dans le frigo. Je pris mon sac dans le couloir et revins dans le séjour pour m'installer sur la table et réviser, faire des exercices. La routine, en somme. Mes parents n'allaient pas entrer avant dix-huit heures trente. Ma mère était vendeuse dans un magasin de vêtements pour femme et mon père était professeur à l'université de Gotham.

- Tu perds ton temps, Lulu, souffla une voix rauque.

- Laisse-moi tranquille...  marmonnai-je en m'arrêtant d'écrire. Je travaille.

Ça, c'est Joe... une voix dans ma tête. Pas très agréable à avoir dans le crâne. A une époque, il était bien silencieux, puisque je prenais des médicaments. Mais il semblerait que je lui manquais trop pour qu'il revienne... J'avais préféré ne pas en parler à mes parents. Ils ont eu assez de frais avec moi, et puis j'en avais ras-le-bol de prendre tous ces cachetons.

- Je croyais qu'on ne devait pas blaguer pendant les devoirs.

- Je ne blague pas, Joe. Va tourmenter une partie inconsciente de mon cerveau, lui envoyai-je en regardant en l'air. 

- Ne me tente pas, petite idiote! Je me ferais une joie de te faire pleurer cette nuit tant le cauchemar sera terrible. Je me marrerais encore à voir la pauvre petite Lulu déboussolée et triste dans les bras de sa petite maman chérie, se moqua-t-il.

- Arrête de m'appeler Lulu, ordonnai-je en serrant les dents.

- Plus tu me diras d'arrêter, et plus je continuerai, chantonna-t-il. Lulu, m'appela-t-il en exagérant la prononciation de mon surnom.

Je préférai ignorer ce que venait de dire la voix dans ma tête. Mes devoirs valaient bien plus la peine d'avoir mon attention que cet idiot de Joe. Apprendre à vivre avec lui n'était vraiment pas du gâteau, mais j'arrivais tout de même à m'en sortir.

- Eh! Lucy! appela Joe alors que je venais de reprendre mes devoirs. On t'observe... Encore.

The Joke's On LucyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant